Contre les violences envers les soignants, François Braun prône la « tolérance zéro »

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Publié le 25/05/2023

Crédit photo : AFP

Trois jours après l'agression mortelle d'une infirmière au CHU de Reims, François Braun a demandé « la tolérance zéro » contre les violences visant les soignants, lors d'une réunion ce jeudi matin, boycottée par la plupart des syndicats hospitaliers qui dénoncent une « opération de communication ». « Contre les violences faites aux soignants, la seule position c'est la tolérance zéro », a déclaré le ministre de la Santé, en introduction de cette réunion convoquée en urgence après le décès de Carène Mezino, infirmière de 38 ans, poignardée lundi après-midi sur son lieu de travail à Reims par un homme souffrant de troubles psychiatriques.

« Une tragédie inqualifiable », qui illustre « un contexte de violence accrue », a souligné François Braun, appelant les représentants des professionnels de santé et du secteur hospitalier à « ne rien laisser passer ». Qu'il s'agisse d'une injure, d'une menace ou d'un crachat, « le dépôt de plainte doit être systématique » et les employeurs « à chaque fois en soutien et en appui », a insisté l'ancien chef des urgences du CHR de Metz.

Le ministre a également demandé des comptes aux hôpitaux, pour lesquels l'État consacre 25 millions d'euros par an pour sécuriser les locaux – de l'éclairage du parking aux digicodes des portes sécurisées. « C'est à ça que sert cette enveloppe, et je veux savoir comment elle est utilisée », a-t-il ajouté.

Pas question de banaliser

« Lever la main sur une infirmière ce n'est pas un geste d'humeur c'est une violence, a dit François Braun. Dégrader le véhicule d'un médecin, menacer un professionnel, lui cracher au visage, ce sont des violences qui sont toujours inacceptables ».

« Cette violence, elle touche tous les professionnels de santé bien sûr, a-t-il encore ajouté. Je pense notamment aux libéraux qui se déplacent chez les patients, à ceux qui exercent dans des zones plus isolées. Quelles que soient les circonstances, il n’est pas question de banaliser ».

D'autres mesures suivront « rapidement », a-t-il promis. Le 1er juin, sa ministre déléguée Agnès Firmin Le Bodo devrait recevoir le rapport sur la sécurité des soignants qui avait été demandé en janvier dernier au Dr Jean-Christophe Masseron, président de SOS médecins, et à Nathalie Nion, cadre supérieure de santé à l'AP-HP. « Nous serons intraitables », a-t-elle affirmé jeudi, souhaitant « réfléchir à ce que la réponse pénale le soit également ».

Réunion boycottée

Mais la démarche ne fait pas l'unanimité. Quatre des cinq principaux syndicats de personnels hospitaliers (CGT, FO, SUD, Unsa) ont décidé de « ne pas participer à cette réunion qui, pour nous, n'est qu'une opération de communication », a déclaré Didier Birig, secrétaire général de FO-Santé, venu devant le ministère justifier ce boycott. « Pour commencer, on laisse passer les obsèques avant de faire quoi que ce soit », a-t-il jugé, dénonçant un ministère « aux abonnés absents sur les effectifs, les budgets, les conditions de travail », qui constituent selon lui le fond du problème. Diagnostic partagé par son homologue de l'Unsa-Santé, Yann Le Baron : « Changer des digicodes et mettre des caméras, ce n’est pas ça qui fera la sécurité. La sécurité, elle sera là quand il y aura les effectifs nécessaires pour prendre en charge correctement les patients ».

Deux jours après la publication du rapport de l'Ordre faisant état d'un nombre record de déclarations d'incidents auprès de l'observatoire de la sécurité des médecins depuis 20 ans, l'Ordre des infirmiers a également publié sa propre enquête. Il en ressort que, sur les plus de 30 000 professionnels ayant répondu à sa consultation, 66 % déclarent avoir été victimes de violences dans leur exercice professionnel et 73 % en ont été témoins.
Pour 40 % d’entre eux, plusieurs fois par an, et pour 15 % d’entre eux toutes les semaines ou presque. Et dans la majorité des cas, la violence provient des patients. Cela a été le cas pour les deux tiers des victimes ou des témoins. 

Temps du deuil

« Le temps du deuil ne permet pas celui de l’expression, ici et maintenant, de nos légitimes demandes des personnels des hôpitaux, avait régi l'INPH mardi, appelant à un temps de recueillement avant de reprendre l’expression de nos revendications nécessaires de nos métiers de santé ».

Quant aux quatre organisations de psychiatres hospitaliers, elles ont appelé mercredi à une « nécessaire prise de conscience du risque auquel sont exposés les soignants et professionnels de l’hôpital, et de la réalité de violence à laquelle nous sommes tous confrontés ». Ce jeudi matin, le ministre de la Santé a souligné un point « à garder en tête » : « Nous ne faisons pas le procès de la psychiatrie, même si bien sûr, je n'en nie pas les difficultés ».


Source : lequotidiendumedecin.fr