Face aux inquiétudes des cadres de la CSMF, Véran manque de concret !

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Publié le 10/09/2021

Crédit photo : Philippe Chagnon

Retenu à Paris en raison de la crise sanitaire, Olivier Véran s'est présenté en visio en direct devant la centaine de cadres confédérés réunis à Antibes pour leur 27e Université d'été. Durant une petite demi-heure, il s'est volontiers prêté aux jeux des questions-réponses des congressistes du syndicat majoritaire, sans aucune annonce. En guise d'accueil, le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF a tenu un discours offensif. En première ligne depuis le début de l'épidémie, « les médecins libéraux sont en crise parce qu'ils sont épuisés et fatigués par tant de mois de lutte », dit-il.

Alors qu'ils sont adulés par la population, « ils vont mal car ils ne se sentent pas reconnus à la hauteur de leur engagement, non soutenus dans leurs efforts contre cette pandémie voire méprisés par les pouvoirs politiques ». Le néphrologue de Cabestany appelle le ministre à prendre en compte les difficultés de la médecine libérale comme il a pu le faire pour l'hôpital public. « Ils attendaient beaucoup de l’avenant 9 et ils ont été déçus », a martelé Dr Ortiz, même si son syndicat a accepté de le signer.

Interrogations

Pour répondre aux enjeux de demain, le président de la CSMF dit attendre beaucoup du ministre, comme les quelques cadres qui ont pu lui poser des questions. « Quels actes concrets va-t-il prendre pour soutenir les porteurs de projets d'équipes de soins spécialisées (ESS) ? », lance le Dr Franck Devulder, président des Spécialistes-CSMF. « Alors que le nombre de généralistes est en baisse constante, la hausse de la médecine salariée l'inquiète-t-il ? », renchérit le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF. « L'insuffisance de la rémunération de l'avenant 9 sur le SAS ne risque-t-elle pas de bloquer les expérimentations en cours ? », s'interroge le Dr Sylvaine Le Liboux, secrétaire générale des Généralistes-CSMF et présidente d'une CPTS dans l'Indre. « Êtes-vous prêts à revaloriser les actes cliniques ? », avance le Dr Bernard Perrouty, neurologue à Carpentras.

Exercice coordonné, CPTS, délégation de tâches

Très à l'aise dans ce genre d'exercice, Olivier Véran, a tenu à remercier les libéraux de leur engagement dans la crise sanitaire. Contrairement aux critiques, ajoute-il immédiatement, « les libéraux ont été plus associés à cette vaccination, dans les centres de vaccination mais aussi en ville ». Puis les médecins vont pouvoir disposer du vaccin Pfizer mais pas en monodose car cela« n'existe pas ». « Il y a encore 400 000 personnes âgées très malades qui ne sont pas vaccinées, soit un peu près 10 patients par médecin généraliste. Je sais que vous faites déjà beaucoup d'efforts pour combler le gap vis-à-vis à d'autres pays voisins qui ont réussi à 100 % », évoque le ministre. En habile politique, il rappelle que la CSMF a tout de même signé l'avenant 9 qui représente quand même un investissement de 800 millions d'euros supplémentaires.

Sur les craintes « non fondées » et les déceptions (la rémunération jugée peu attractive par les syndicats signataires = NDLR) concernant le service d'accès aux soins (SAS), Olivier Véran s'est montré ferme. « L'avenant 9 s'appliquera. Je sais que cela va fonctionner car attendu par les patients et les professionnels. S'il y a des problèmes, on les réglera après », rassure-t-il. Quant aux équipes de soins spécialisés (ESS), le ministre incite les médecins à s'en emparer. « C'est à vous de les imaginer. Et les ARS vont être là pour vous aider à le faire ».

Déception

Devant une salle attentive, le ministre réaffirme la ligne politique déjà engagée depuis l'élection d'Emmanuel Macron (décloisonnement, exercice coordonné avec le développement de CPTS, exercice mixte…). Il appelle les médecins à jouer « collectifs » entre médecins mais aussi avec les paramédicaux. « Il faut qu'on sorte de ce paradigme qui fait que lorsqu'on parle de coopération, on prend un acte pour donner à un autre », dit-il. Et comme pour rassurer la Confédération, le locataire de Ségur se dit attaché au paiement à l'acte et à l'existence d'une médecine libérale dans le système de santé. « Mais cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas se poser des questions. Est-ce que notre système n'est pas vieux jeu », ajoute-t-il aussitôt.

Quant à la question de la revalorisation des actes, Olivier Véran a botté en touche  : « Faites-moi des propositions ! Dites-moi comment avec une enveloppe qui est dans le cadre conventionnel, vous souhaitez répartir les choses. Comment on fait pour reconnaître un peu plus le temps passé dans le temps de consultation longue ? Comment on fait pour avoir de valoriser le temps clinique ? ».

Cette courte intervention n'a pas laissé les congressistes de marbre. « J’ai été plutôt déçu, témoigne le Dr Isabelle Nouet-Martinot, généraliste à Angers. J’ai été surprise aussi par ce discours un peu descendant, vendant les CPTS et le SAS, alors qu’il y a beaucoup de points d’alerte sur le terrain sur l’état des praticiens ». Même déception d'une dermato de Meurthe-et-Moselle. « Globalement, je reste sur ma faim, surtout après tout ce que les médecins ont fait pendant la crise Covid ». Le Dr Ortiz, lui, trouve que le ministre a donné des pistes mais sans entrer dans le concret. Pas de quoi rassurer les cadres sur l'avenir.

 


Source : lequotidiendumedecin.fr