Vote solennel aujourd’hui à l’Assemblée nationale

Fin de l’acte I pour la loi Bachelot

Publié le 17/03/2009
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FIN DE PARTIE pour les députés. Le projet de loi Bachelot achève aujourd’hui à 16 heures, avec le vote solennel, son parcours au palais Bourbon. Il n’y aura pas de deuxième lecture, la procédure d’urgence prévaut. Une « urgence » toute relative puisque c’est… le 12 mai seulement que les sénateurs entameront à leur tour l’examen du texte. Ce calendrier étiré laisse des délais bien courts à la mise en musique de la loi, le ministère ayant énoncé le souhait d’en publier les décrets d’application avant l’été.

En tout état de cause, soucieux de garder le cap, le président de la République a donné le ton vendredi dernier à Rambouillet (« le Quotidien » du 16 mars), affirmant qu’il ne céderait pas aux lobbies et répétant son attachement à une réforme qui se dessine ainsi après amendement par les députés :

• À l’hôpital, le directeur est bien le patron.

Les députés ont suivi le gouvernement. La gouvernance des hôpitaux est une nouvelle fois révisée. L’actuel conseil d’administration devient un « conseil de surveillance » ; à la tête d’un « directoire » où il est secondé par le président de CME, le directeur est le patron. Sur cette question sensible, l’Assemblée a introduit le principe d’une représentation majoritaire du personnel médical au sein du directoire et posé des garde-fous déontologiques aux décisions du directeur.

Un nouveau statut contractuel est inventé pour les médecins à l’hôpital : ceux qui le choisiront seront des « cliniciens hospitaliers », ont décidé les députés. Le secteur privé à but non lucratif, lui, change de nom : ses établissements seront dits « d’intérêt collectif ». L’hospitalisation à domicile (HAD), quand à elle, est labellisée - l’utilisation abusive de l’appellation sera sanctionnée. Les députés ont donné leur feu vert à la constitution de « communautés hospitalières de territoire », sur le modèle de l’intercommunalité.

• Accès aux soins : vif débat autour de la liberté d’installation

Dans le titre II du projet de loi HPST, les députés ont validé l’organisation des soins de premier recours et les missions du médecin généraliste en la matière, ainsi que la constitution de pôles de santé entre professionnels libéraux, réseaux, maisons de santé, ou hôpitaux locaux. Concernant l’installation des médecins, les députés ont finalement repoussé à 2013, au plus tôt, les mesures coercitives. Après un délai de trois ans et si l’offre de soins s’avère insuffisante dans certains territoires de santé, l’amendement Rolland autorise les directeurs d’Agences régionales de santé (ARS) à proposer aux médecins libéraux un contrat santé solidarité « par lequel ils s’engagent à contribuer à répondre aux besoins de la population » des zones sous-médicalisées. En cas de refus d’un tel contrat ou de non-respect des engagements, les médecins devront alors s’acquitter d’une contribution forfaitaire annuelle (d’un montant inférieur ou égal au plafond mensuel de la Sécurité sociale, qui a été fixé à 2 859 euros en 2009 et fait l’objet d’une revalorisation chaque année).

Le texte prévoit aussi la régulation régionale du numerus clausus, la répartition quinquennale des postes d’internes en fonction des besoins, la valorisation de la filière universitaire de médecine générale et, enfin, l’attribution de bourses aux étudiants en médecine volontaires pour aller exercer d’abord en zone médicalement sous-dotée pendant deux ans. L’amendement Poletti instaure un enseignement spécifique sur l’IVG et la contraception au cours du Deuxième cycle des études médicales, tandis qu’un autre amendement étend les compétences des sages-femmes à la prévention du cancer du col de l’utérus (pour la femme enceinte), au suivi gynécologique et à la prescription de contraceptifs. La FMC et l’évaluation des pratiques professionnelles fusionnent pour laisser la place au Développement professionnel continu (DPC). L’organisation et le financement de la permanence des soins sont confiés aux ARS.

• Alcool, obésité, tabac : le champ de bataille

Avec le titre III du projet de loi, ce sont d’autres lobbies que ceux des professionnels de santé qui sont entrés dans l’hémicycle. La bataille, prévisible, s’est terminée ainsi : les cigarettes-bonbons sont prohibées, la vente d’alcool et de tabac aux moins de 18 ans est interdite mais la publicité pour les vins et spiritueux est autorisée sur Internet ; les open bars (vente d’alcool au forfait) sont interdits mais la vente d’alcool reste possible dans les stations-services entre 8 heures et 18 heures.

La prévention de l’obésité et du surpoids devient une « priorité » (mais pas une grande cause nationale). Les députés ont décidé au passage que les programmes scolaires intégreraient au moins 30 minutes d’activité physique pour chaque enfant ; ils ont également choisi de permettre aux salariés d’acheter des fruits et légumes avec des tickets restaurants.

• Création des agences régionales de santé en 2010

Les nouvelles Agences régionales de santé (ARS) seront mises en place au 1er janvier 2010 en fusionnant sept types de structures existantes («  le Quotidien  » du 13 mars) : Agences régionales de l’hospitalisation (ARH), Unions régionales des caisses d’assurance-maladie (URCAM), le versant sanitaire des Caisses régionales d’assurance-maladie (CRAM), les pôles santé et médico-social des Directions départementales et régionales des Affaires sanitaires et sociales (DDASS et DRASS), les Groupements régionaux de santé publique (GRSP), les Missions régionales de santé (MRS). Unissant des services de l’État et de l’Assurance-maladie au sein d’un nouvel établissement public de l’État, les ARS auront un champ de compétences transversal, de l’ambulatoire à l’hospitalisation en passant par le secteur médico-social, la prévention, la promotion de la santé et la sécurité sanitaire. Outre les SROS étendus au secteur ambulatoire, des contrats d’un nouveau type pourront être passés entre l’ARS et les établissements ou les professionnels à titre individuel.

Il y aura, parmi les différents partenaires de chaque ARS, une nouvelle Union régionale des professionnels de santé (URPS) qui sera composée de représentants libéraux élus de chaque profession. L’amendement Domergue institue non plus deux mais trois collèges pour les médecins libéraux (généralistes, spécialistes et praticiens des plateaux techniques).

 AGNÈS BOURGUIGNON ET KARINE PIGANEAU

Source : lequotidiendumedecin.fr