Forte mobilisation à l’AP-HP contre la réforme des 35 heures, Hirsch veut renouer le dialogue

Publié le 21/05/2015

Crédit photo : S. TOUBON

Entre 6 000 et 8 000 personnes ont battu le pavé ce jeudi 21 mai, avenue Victoria, devant le siège de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) pour contester le projet de réforme des 35 heures lancé par le directeur de l’AP-HP Martin Hirsch.

Des infirmiers, aides-soignants, techniciens de laboratoire, personnels administratifs, ont endossé blouses blanches, masques et banderoles prônant « Ne touchez pas à nos RTT, sinon… ça va péter ». Selon l’AP-HP, le taux de mobilisation des grévistes a atteint 34 %.

En l’espace de deux heures, l’avenue Victoria s’est remplie. Musique, discours : les syndicats CGT, SUD, CFDT, FO AP-HP avec la CFCT, l’UNSA et la CGC se sont retrouvés pour dire non au projet de réorganisation des 35 heures avant même que les négociations aient débuté. « Il n’y a plus d’avantages à travailler à l’AP-HP », lâche une infirmière de l’hôpital Robert-Debré. « Toutes les personnes travaillant 7 h 36 par jour vont passer à 7 heures, cela nous sucre 5 à 6 jours de RTT par an. »

« On ne tiendra pas le coup »

Actuellement, plus de 60 % des agents travaillent 7 h 36, équivalent à 38 heures par semaine ou 7 h 50, soit 39 h 10 par semaine avec un nombre de RTT oscillant entre 18 et 20 jours annuels, auxquels s’ajoutent des jours de congés (fêtes des mères, jour des médailles, etc.).

 

La réforme proposée par Martin Hirsch permettrait d’économiser 20 millions d’euros par an, sans baisser les effectifs. En raison du manque de personnel, les journées non prises s’accumulent sur les comptes épargne temps. Ce stock serait évalué à 74,7 millions d’euros fin 2014, selon la direction.

 

« Martin Hirsch noie le poisson dans les médias. Diminuer la durée journalière de travail, supprimer des jours de RTT et des jours de congés contribuera à nous épuiser. On ne tiendra pas le coup », s’époumonent deux infirmières de Sainte-Périne au micro. Selon elles, il y a du chantage dans l’air, entre réduire les RTT ou supprimer 4 000 emplois sur quatre ans à l’AP-HP.

Très mobilisés, les syndicats craignent que cette réforme aboutisse à une dégradation de la qualité de soins et de la prise en charge des patients. Certains appellent même à la démission de Martin Hirsch. « Il faut être humain. Nous ne sommes pas des machines », scande une autre infirmière. Nombreux sont ceux qui affirment que cette réforme ne respecte pas leurs valeurs. « Nous avons choisi de travailler en public car nous estimons que tous les individus ont le droit d’être soignés correctement », explique une infirmière de l’hôpital Tenon, qui s’interroge sur son avenir dans ce secteur si la réforme venait à passer. « Je vais peut-être me tourner vers le privé », poursuit-elle.

Besoin d’embaucher

Même son de cloche du côté des aides-soignants. Sous pression face au manque de personnel, la profession craint que l’épuisement mène au bâclage de leur activité. « Nous ne voulons pas de ça ! », s’insurge une aide-soignante ayant plus de 24 ans d’expérience et qui n’a pas beaucoup vu bouger son salaire depuis des années. Selon elle, de nombreux professionnels de santé sont déjà au bord du burn-out avec un emploi du temps soutenu et des heures supplémentaires qui s’accumulent.
 

Des professionnels des laboratoires d’analyse relatent également leur combat contre le manque de personnel mais aussi de matériel. « Nous ne sommes pas des fonctionnaires fainéants, notre travail est un véritable produit. Mais il y a une vraie démotivation, des collègues sont confrontés à des angoisses en arrivant au travail, on travaille en flux tendu, ce n’est pas normal », explique une laborantine de la Pitié-Salpêtrière. Les syndicats craignent également de perdre d’autres droits, comme la comptabilisation de la pause déjeuner de 30 minutes dans le temps de travail effectif.

L’ouverture de Hirsch

La Fédération SUD Santé Sociaux a salué la mobilisation, « sans précédent depuis 20 ans » et demandé, avec les autres organisations syndicales, le retrait total sans conditions du plan « Hirsch ».
 

Martin Hirsch a reçu les organisations syndicales de l’AP-HP pendant plus d’une heure, ce jeudi, et leur a rappelé sa volonté de ne pas remettre en cause le cadre légal et réglementaire des 35 heures. Le DG de l’AP-HP a proposé de renouer le dialogue en « mettant au centre des discussions les améliorations des conditions et de l’organisation du travail » ("déprécarisation" des personnels, logements, plannings, burn-out, formation...). Une première réunion consacrée aux sujets d’amélioration des conditions de travail doit avoir lieu le mardi 26 mai prochain.

Sophie Martos

Source : lequotidiendumedecin.fr