Incivilités, agressions, menace terroriste

La sécurisation des établissements au milieu du gué

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Publié le 13/11/2017
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securisation hopitaux

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« Notre dispositif est par nature fragile. Les défis pour renforcer son efficacité sont nombreux », a reconnu Agnès Buzyn, ministre de la Santé, en clôture d'un colloque consacré au bilan du plan d'action de sécurisation des établissements de santé, lancé il y an un an exactement.

Devant quelque 200 participants, la ministre de la Santé, consciente des difficultés, a encouragé la communauté hospitalière à s'inscrire dans une « démarche pluriannuelle d'amélioration ». Pour les cadres des hôpitaux, elle a annoncé une formation spécifique aux enjeux de sûreté délivrée par l'École des hautes études en santé publique (EHESP). 

Culture à diffuser 

Lancé par Marisol Touraine, le plan visant à renforcer la sécurité des hôpitaux – non seulement face à la menace terroriste mais aussi aux agressions quotidiennes – se met en place lentement. Il charge les hôpitaux d'élaborer un plan de sécurisation d'établissement (PSE) et de conclure (ou renouveler) une convention santé/sécurité/justice définissant une démarche commune entre les hôpitaux, la police et l'autorité judiciaire. Il délègue aux ARS un rôle de coordination ainsi que la définition d'une cartographie des sites prioritaires qui pourront bénéficier d'un financement spécifique.  

Le plan a-t-il été décliné sur le terrain ? Des mesures se concrétisent comme les conventions santé/sécurité/justice et la cartographie des sites prioritaires. Mais l'implication varie. « Il n'est pas facile de mettre en place de la sécurité dans les lieux ouverts comme un hôpital. Tous les établissements ne fonctionnement pas de la même façon », concède Jean-Pierre Robelet, directeur adjoint de l'ARS Ile-de-France. 

Autre frein : le personnel soignant lui-même. « La diffusion d'une culture de sécurité est lente en raison du métier de soignant, bienveillant envers le patient », analyse Arnaud Pouillart, directeur général de la Fondation Lenval, à Nice. Certains hésitent à signaler, à porter plainte. « La question de la sensibilisation du personnel est importante », relève Thomas Le Ludec, directeur général du CHU de Montpellier, qui insiste sur le rôle moteur du directeur d'établissement.

Frédéric Lauze, directeur départemental de la sécurité publique du Val-d'Oise, refuse la langue de bois. « Les conventions sont bien écrites mais marchent mal car elles manquent d'un caractère opérationnel notamment en cas de crise. Je mets en cause le rôle de l'ARS. En cas de conflit, il est difficile d'avoir un interlocuteur », a-t-il déclaré sous des applaudissements. 

En première ligne

L'insécurité à l'hôpital reste hélas d'actualité. Selon Vincent Terrenoir, délégué pour la sécurité générale à la DGOS (ministère), chargé de l'observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), la menace terroriste reste particulièrement élevée.

Concernant les atteintes aux personnes et aux biens, 17 596 signalements ont été déclarés en 2016 par 360 établissements sanitaires et médico-sociaux (contre 15 990 en 2015). Et sur les quelque 14 500 atteintes aux personnes, la moitié sont des violences volontaires et menaces avec arme... Quant aux atteintes aux biens, elles concernent surtout des vols sans effraction et dégradations légères (89%). La psychiatrie (20 % des signalements), les urgences (13 %) et les unités de soins longue durée/EHPAD (11 %) sont les trois services hospitaliers les plus exposés. 

Plus de 22 641 victimes ont été répertoriées cette année dont 84 % sont des professionnels de santé (8 % de médecins, 47 % d'infirmiers). Le personnel hospitalier est souvent en première ligne : « 57 % des atteintes aux personnes sont gérées par le personnel de l'hôpital avant le service de sécurité et la police », précise Vincent Terrenoir.  

 

 

 

Loan Tranthimy

Source : Le Quotidien du médecin: 9618