Finances sociales, une dégradation durable

L'équilibre de la Sécu, dans 10 ans ?

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Publié le 28/01/2022
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Le Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) envisage prudemment un retour à l'équilibre de la Sécu à l'horizon 2031, à condition d'agir sur le système de santé et de trouver des recettes.

Après les déficits massifs provoqués par la crise sanitaire, le Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) invite les pouvoirs publics à se doter d'une boussole « raisonnable » : « un rétablissement des comptes sur un horizon de 10 ans ».

Dans son rapport (consensuel) remis à Matignon sur la situation budgétaire post-Covid, cette instance présidée par Dominique Libault, qui est aussi directeur de l'EN3S l'école de la Sécu de Saint-Étienne, souligne à quel point la crise « ébranle » durablement les finances sociales. Pour la branche maladie, le déficit attendu en 2022 est de 20 milliards après les trous d'air de 30 milliards en 2020 et 2021. Le HCFiPS estime qu'il sera encore à 14 milliards en 2025. « Le financement du système de santé de la France apparaît aujourd’hui à nouveau en question », peut-on lire. C'est bien la question de la « soutenabilité » du système qui est posée.

Dans ce contexte, miser sur la seule croissance économique « serait un pari peu crédible », recadre le Haut conseil. Que faire ? Il constate que le rabot budgétaire n'est plus à l'ordre de jour, qu'il s'agisse des salaires des hospitaliers (« le Ségur de la Santé a tourné la page de la modération salariale ») ou de la régulation à la hussarde des produits de santé. « Ce sont des leviers traditionnels de maîtrise moins utilisables » après la crise, analyse Dominique Libault.

Sans originalité mais avec méthode, le Haut conseil propose plutôt de traquer les marges d'efficience à tous les étages (réorganisation de l'offre de soins, décloisonnement, nouvelle gouvernance territoriale), d'intensifier la lutte contre les fraudes (« sur des bases sereines car il ne suffit pas de se pencher pour ramasser des milliards », nuance Dominique Libault) sans oublier de s'attaquer aux frais de gestion administrative (notamment des complémentaires). Parallèlement, le rapport pousse les feux pour une vraie stratégie durable de prévention individuelle et d’anticipation des risques collectifs (santé, vieillesse et autonomie). Côté médecins, il est possible de mobiliser de nouveaux leviers d'intéressement à la prévention, au-delà de la ROSP actuelle.  

Mais cela ne suffira pas et une augmentation d'impôts ou de cotisations ne devrait pas être « un tabou », même si nos taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés au monde limitent les marges de manœuvre. Certaines taxes comportementales pourraient aussi être justifiées sur le tabac, l'alcool ou l'alimentation transformée.


Source : Le Quotidien du médecin