Les insuffisants rénaux déplorent des obstacles dans l'accès aux soins et l'opacité du registre rein

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Publié le 18/02/2016

En amont de la Journée mondiale du rein du 10 mars 2016, l'association de patients Renaloo dénonce l'insuffisance de l'information relative aux différentes modalités de prise en charge, notamment la dialyse autonome et la greffe, faisant obstacle à un choix libre et éclairé.

Selon un sondage réalisé par Internet entre le 29 janvier et le 11 février 2016, près d'un tiers des 1 038 répondants estime ne pas avoir participé au choix de son traitement ; un taux qui s'élève à 45 % chez les patients dialysés en centre ou en unité de dialyse médicalisée (UDM).

Des progrès à faire sur la greffe précoce et la dialyse autonome

Beaucoup d'ignorance entoure l'accès à la greffe de rein, stratégie la plus efficiente, selon la Haute Autorité de santé (HAS), mais qui ne concerne que 45 % des patients (contre 55 % au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, voire 70 % en Norvège). Plus d'un patient sur deux se sent mal informé sur la greffe préemptive (qui permet d'éviter la dialyse) et 43 % souhaiteraient en savoir davantage.

Environ 42 % des sondés en UDM ne sont pas inscrits sur la liste nationale d'attente (LNA). Si 20 % d'entre eux ne le désirent pas, 14 % ne savent pas pourquoi ils ne sont pas inscrits, et 34 % n'ont pas eu de bilan pré-greffe. Pas normal, « alors que l'inscription sur la liste doit être faite dès les premiers mois » (à 15 ml/min de DFG) juge le vice-président de Renaloo, Christian Baudelot.

Des modalités mal connues

Les modalités d'une dialyse autonome sont mal connues. Un patient sur deux se dit mal ou pas informé sur l'hémodialyse à domicile (qui ne concerne que 0,6 % des insuffisants rénaux en France) et plus de 40 % sont dans le flou au sujet de la dialyse péritonéale à domicile (6,6% des dialysées y ont recours). Globalement, moins de 8 % des patients dialysés bénéficient de ces deux techniques en France, contre 20 à 30 % en Suède, aux Pays-Bas, ou au Canada, déplore Renaloo. Compromis, l'autodialyse dans un établissement touche 18 % des dialysés.

La dialyse non autonome reste ainsi prépondérante en France. L'hémodialyse en centre concerne 56 % des dialysés, tandis que 17 % se rendent en UDM. En 2013, sur 10 000 patients en insuffisance rénale terminale, 87 % ont eu une hémodialyse ; seulement 10 % ont eu une dialyse péritonéale, et 3 % une greffe préemptive. Une situation qui s'explique, selon Yvanie Caillé, directrice de Renaloo, s'appuyant sur le rapport de la Cour des comptes de septembre 2015, par la rentabilité de la dialyse dans le secteur lucratif. Et d'aligner les chiffres : la marge brute d'exploitation des structures de dialyse serait en moyenne de 16 %, leur rentabilité économique de 11 %. Près de 80 % des revenus des néphrologues viendraient des séances de dialyse (dont les honoraires sont de 38,35 euros par séance) et chaque dialysé en centre générerait un revenu de 6 000 euros par an.

Plaidoyer pour la transparence du registre rein

Les disparités régionales sont criantes, reflet de cultures médicales différentes, selon Renaloo. La greffe préemptive concerne 1 % des cas en Martinique, contre 8 % en Limousin. La dialyse péritonéale, 2 % des cas en Aquitaine, 29 % en Franche-Comté, l'hémodialyse en centre, 86 % en Aquitaine, 47 % en Bourgogne. Pour les réduire, l'association milite pour que le réseau épidémiologie et information en néphrologie (REIN), créé en 2002 sur la base de conventions (non obligatoires) entre les structures et l'agence de la biomédecine, livre les données des établissements, et non seulement des régions.

Lettre ouverte de Gérard Bapt à Touraine

Le député socialiste Gérard Bapt reprend ces revendications dans une lettre ouverte datée du 17 février à la ministre de la Santé Marisol Touraine. Il propose notamment d'inscrire dans le code de santé publique l'obligation pour les professionnels de santé d'informer leurs patients sur toutes les modalités de traitement par greffe et dialyse, et de réaliser un bilan pré-greffe précédant l'inscription sur la LNA pour ceux qui le souhaitent.

Gérard Bapt demande enfin la mise en œuvre dans les « meilleurs délais » de l'expérimentation pilote sur le parcours de soin des insuffisants rénaux, qui devrait inclure de nouveaux modes de tarification des traitements. La circulaire d'application, destinée aux agences régionales de santé ne fait toujours pas l'objet d'un consensus. « Il faut que les objectifs du virage ambulatoire soient pris en compte par les acteurs », insiste-t-il.


Source : lequotidiendumedecin.fr