Pour accueillir le chef du gouvernement, le président de l’Ordre des médecins n’a pas eu trop de toute son autorité pour calmer le millier de médecins et d’ordinaux présents au 2e congrès de l’institution.
Dans son discours inaugural, le Dr Patrick Bouet annonçait la prochaine intervention du Premier ministre Manuel Valls, et excusait la ministre de la Santé, empêchée par la discussion du PLFSS : la seule évocation de Marisol Touraine a déclenché une véritable bronca dans le grand auditorium du palais des Congrès, contraignant Patrick Bouet à remettre vertement les pendules a l’heure : « Nous sommes ici dans un pacte républicain, a-t-il lancé à la salle, nous devons le respect au Premier ministre et à la ministre de la Santé, quelles que soient nos opinions personnelles. »
Année de tension
Patrick Bouet n’a pas caché les nombreux désaccords de la profession avec les pouvoirs publics. Parlant d’année de tension, le président de l’Ordre a rappelé que la profession avait le sentiment d’être attaquée par les pouvoirs publics. « Les médecins ont l’impression que le gouvernement leur impose ses décisions, ce qui provoque amertume et incompréhension. »
Tiers payant, gouvernance en région, contenu des métiers, Patrick Bouet a listé les sujets qui fâchent, et a prévenu Manuel Valls : « Il n’y aura de réforme durable que quand les objectifs et les moyens seront partagés. »
C’est dans cet esprit que l’Ordre a lancé sa grande consultation, a poursuivi le président de l’Ordre. « Son objectif, c’est le retour du consensus, a-t-il assuré, les propositions qui en sortiront serviront de base à la réflexion sur la réforme du système de santé », et à la Grande conférence de santé voulue par Manuel Valls.
Appel au dialogue
Dans son intervention, Manuel Valls s’est voulu rassurant, insistant sur la nécessité du dialogue. « Ma présence est le signe de l’importance que le gouvernement accorde aux médecins et à l’Ordre », a-t-il commencé.
S’ensuit un éloge de la profession. « Être médecin, c’est plus qu’un métier, reconnaît-il, c’est soigner, accompagner, écouter, être là quand il faut. C’est donc aussi ne pas compter ses heures ni sa fatigue. »
Manuel Valls entre dans le vif du sujet, c’est-à-dire l’opposition des médecins à la loi de santé, mais il assure que, pour autant, « le dialogue n’a jamais été rompu ». Il rappelle aussi que, « contrairement à d’autres auparavant, jamais nous n’avons brandi la menace de la coercition, parce que nous croyons au civisme de votre profession ». Le Premier ministre rappelle au passage que « la France est l’un des seuls pays à laisser les médecins s’installer où ils veulent, à laisser les patients choisir leur médecin comme ils le souhaitent, et à assurer la solvabilité d’un système grâce à la solidarité nationale ». Et pour lui, la loi de santé « n’est pas les caricatures d’étatisation que certains en font, elle est la protection de notre modèle ». Les médecins sont prévenus.
Le tiers payant ? « Simple à mettre en œuvre »
Manuel Valls liste à son tour les sujets de discorde et assure que le tiers payant sera simple à mettre en œuvre, et que jamais un gouvernement n’était allé aussi loin dans la responsabilité confiée aux professionnels en matière d’organisation territoriale des soins.
Une grande conférence de santé le 11 février
Quant à la grande conférence de santé, qui se tiendra le 11 février, il « veut croire » qu’elle sera nourrie par la grande concertation organisée par l’Ordre.
Manuel Valls liste les thèmes qu’elle abordera. La formation, « qui doit être mieux adaptée aux besoins » ; la réforme du 3e cycle d’études, « qui se fait très majoritairement en CHU, et qui pourrait se diversifier » ; l’amélioration des parcours professionnels, « pour permettre aux jeunes d’avoir un parcours diversifié entre cabinet et hôpital, entre salariat et exercice libéral ».
Sur tous ces points, insiste Manuel Valls, « j’attends des idées fortes de cette grande conférence ».
Le Premier ministre n’a pas oublié les prochaines négociations conventionnelles. Au-delà des questions tarifaires, « elles doivent permettre de contribuer aux nouvelles orientations en matière de coordination et d’exercice de la médecine ».
En concluant son discours, le Premier ministre a encore insisté : « Continuons donc, État et médecins, libéraux, salariés ou hospitaliers, à unir nos efforts pour continuer à faire vivre un modèle social unique au monde. »
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