Ordre : les kinés privés de représentation à l’échelon départemental

Publié le 17/03/2009
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L’un des amendements surprise déposés par les députés lors de la discussion précise que, s’agissant des ordres paramédicaux, « les conseils départementaux sont institués lorsque la démographie de la profession est égale ou supérieure à 100 000 sur l’ensemble du territoire français ». Or, parmi les institutions ordinales concernées (infirmiers, pédicures-podologues et masseurs-kinésithérapeutes), la seule à compter moins de 100 000 inscrits, tout en ayant un échelon départemental, est celui des kinés, dont els responsables s’émeuvent de cette disposition.

Pour son président, René Couratier, cette mesure tombe d’autant plus mal que la création de son ordre remonte à trois ans seulement : « Nous avons passé beaucoup de temps et dépensé beaucoup d’argent pour mettre en place cet échelon départemental, indique-t-il au « Quotidien » . Cela représente 120 personnes salariées en CDI, des contrats avec des conseils juridiques et des baux signés pour nos locaux dans chaque département. Je ne sais pas ce que nous allons faire maintenant ».

Mauvais coup

René Couratier a néanmoins sa petite idée sur l’origine de ce qu’il appelle « un mauvais coup porté à l’Ordre : il s’agit d’un règlement de compte. Sur les 65 000 masseurs-kinésithérapeutes exerçant en France, il y en a 4 ou 5 000 qui sont salariés et qui refusent de s’inscrire à notre Ordre. A sa création, nous avons pu disposer du fichier Adeli pour répertorier les kinés, mais pour ceux qui exercent en salarié, nous ne disposons d’aucune information. Nous nous sommes adressés au ministère et aux établissements pour tenter de les répertorier, mais cela n’a pas plu, et les centrales syndicales de salariés ont mené leur campagne anti-ordre ».

Au SNMKR (Syndicat national des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs), qui fédère des kinés libéraux, même tonalité. Tristan Maréchal, son président, qui insiste sur « son attachement à la structure ordinale dans son état actuel », ne serait « pas étonné que cet amendement ait pour but d’obtenir quelque chose du président Couratier ».

Chez les parlementaires, on se fait plus précis et on estime que, compte tenu des 65 000 inscrits au tableau de l’Ordre des kinés, l’échelon départemental ne se justifie pas. D’autant, ajoute-t-on, que cet échelon intermédiaire génère des coûts de fonctionnement qui ne seraient pas étrangers à la fronde des kinés salariés, peu empressés de payer 130 euros annuels (280 euros pour un kiné libéral) à un ordre qui leur apporte peu compte tenu de leur statut.

Face à la contestation des kinés salariés qui ont commencé à se mettre en grève, la solution de cet amendement aurait été imaginée en particulier pour ramener le calme dans la profession mais aussi pour des raisons d’économies. Il est vrai que la lecture des comptes de l’Ordre départemental du Morbihan fait apparaître un budget annuel de 57 000 euros. Et selon un kiné du département, « en trois ans, et pour un budget cumulé de 171 000 euros, l’Ordre départemental aura traité deux dossiers de médiation conciliation. Et sur 28 relevés de pratiques illégales, aucun n’a été suivi d’une action judiciaire ».

Manque de concertation

A l’Ordre des pédicures-podologues, qui ne rassemble il est vrai que 10 200 inscrits, la déléguée générale, Camille Cochet indique que dès sa création il y a environ deux ans, son Ordre n’a pas prévu d’échelon départemental : « Cela ne se justifiait pas », précise-t-elle au « Quotidien ».

Dominique Lebœuf, présidente du Conseil national de l’Ordre des infirmiers, soutient l’Ordre des kinés : « La moindre des choses aurait été de mettre en place une concertation préalable », affirme-t-elle .

Côté parlementaire, on estime cependant que les jeux ne sont pas faits, et qu’à l’occasion de l’examen du texte par le Sénat, celui-ci pourrait encore être modifié si, par exemple, l’Ordre des kinés baissait sa cotisation pour les kinés salariés, « afin de donner le sentiment de relations apaisées ».

 HENRI DE SAINT ROMAN

Source : lequotidiendumedecin.fr