Psychiatrie : bronca du syndicat des psychiatres des hôpitaux contre la nouvelle feuille de route 

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Publié le 05/07/2018
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Crédit photo : S. Toubon

Les syndicats hospitaliers publics avaient déjà dénoncé la composition du comité stratégique pour la santé mentale et la psychiatrie (CSSMP) installé le 28 juin par la ministre de la Santé Agnès Buzyn.

C'est désormais la vision de la psychiatrie et les 37 mesures contenues dans sa feuille de route que le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) épingle dans un communiqué, fustigeant « des méthodes innovantes pour mieux avaler les couleuvres ».

Absences de moyens

Le SPH accuse d'abord le gouvernement de se défausser de ses responsabilités (c'est-à-dire ses missions de service public) en mettant l'accent sur le renforcement des compétences psychosociales de l'usager (recours aux groupes de pairs, empowerment…). « C'est s'affranchir sans frais du rôle que l'État devrait jouer sur les facteurs extérieurs de bien-être », considère le syndicat.

Il reproche à la stratégie de briser toute la spécificité de la psychiatrie, en obligeant les hôpitaux psychiatriques à rentrer dans les GHT, « créés pour la rationalisation des dépenses publiques ». « La psychiatrie que dessine la feuille de route n'a même plus de communautés psychiatriques de territoire, dernier bastion d'un parcours de soins coordonnés spécifiques que la loi de santé avait reconnu » s'offusque le SPH.

« Mesures bien légères »

« Santé mentale 3.0, télémédecine, indicateurs HAS… » le SPH raille plusieurs mesures de la feuille de route, qui ne peuvent répondre, à ses yeux, aux défis que doit relever la discipline : inflation des besoins de la population, manque de moyens, démographie médicale vieillissante, conditions de travail difficiles.

L'action 22, qui a pour but de mettre en œuvre le plan d'actions visant la réduction du recours aux soins sans consentement, et notamment aux mesures d'isolement et de contention, « n'esquisse pas l'ombre d'une solution », pas plus que l'annonce du lancement de la construction de la deuxième tranche des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), destinées aux personnes sous main de justice nécessitant une hospitalisation, alors que l'évaluation de la première tranche n'est pas finie.

Enfin, la feuille de route ne saurait contribuer à la destigmatisation de la maladie mentale qu'elle prétend combattre, quand la ministre de la Santé défend en même temps le décret du 23 mai. Agnès Buzyn assure au « Quotidien » que ce texte n'apporte que deux nouveautés au fichier des patients faisant l'objet de soins sans consentement qui existe depuis 1994 : un allongement de la durée de conservation des données (d’un à trois ans), et son extension de l'échelle départementale à nationale. Le SPH, comme l'association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire, dénonce un « fichage des patients » dans le cadre du plan de prévention de la radicalisation.

« En fait de plan pour que la psychiatrie ne soit plus le parent pauvre de la médecine, la feuille de route réactualise le clivage entre une santé mentale revitalisée par les conceptions ayant les faveurs du moment, et la psychiatrie publique recroquevillée avec ses patients, sous le poids des clichés, des restrictions budgétaires et des réflexes de contrôle sécuritaire », conclut le SPH.


Source : lequotidiendumedecin.fr