Réquisitions, IPA, plan blanc, loi Matras : le SNPHAR-e dénonce une « médecine low-cost »

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Publié le 26/11/2021
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Crédit photo : S.Toubon

Le système de santé français est au « bord de l’effondrement », en train de basculer inexorablement vers une « médecine low-cost », alerte le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (SNPHAR-e).

Selon le syndicat, le dernier « DGS-Urgent » en est la parfaite illustration. Le mail évoquait ouvertement des « mesures plus coercitives » (plans blancs, réquisition des intérimaires ou des libéraux, etc.) pour adapter l'offre de soins « aux situations de tensions » jusqu'à janvier 2022. Ce qui est ni plus ni moins un « aveu de perte de contrôle face à la crise sanitaire structurelle de nos services de soins » pour le SNPHAR-e.

Contacté par « Le Quotidien », le Dr Anouar Ben Hellal, secrétaire général adjoint du syndicat, persiste et signe. Ce « DGS-Urgent » serait la preuve que « la DGS a été prise par un vent de panique ». Selon l’urgentiste du CH de Versailles, le ministère a été « surpris » de voir un nombre important de professionnels de santé quitter l’hôpital ces derniers mois. Alors que la cinquième vague se profile, celui-ci se demanderait donc s’il « sera capable de faire face », dans un contexte de réduction du capacitaire des hôpitaux.

Plans blancs

« Normalement, gouverner, c’est prévoir, mais le ministère n’a rien prévu. Donc il utilise le bâton et la force pour faire travailler les professionnels », poursuit le secrétaire général adjoint du SNPHAR-e. Il estime que la réactivation des plans blancs est aussi une manière dévoyée d’empêcher les soignants de quitter l’hôpital. « Quand les plans blancs ont pris fin cet été, beaucoup d’infirmiers sont partis, décrit-il. Donc, on les réinstaure pour bloquer les départs. »

Toujours est-il que de nombreux médecins et personnels paramédicaux ont quitté l’hôpital des derniers mois. On ne peut donc pas dire que le Ségur de la santé a résolu la problématique de l’attractivité. « Il paraît que les milliards pleuvent sur l’hôpital, on n’en voit aucun effet sur le terrain », tacle le SNPHAR-e, persuadé au contraire que la désorganisation s’accentue avec une « volonté de démédicaliser les urgences ».

Une médecine de moindre coût ?

Le syndicat fait référence à la création de l’IPA en médecine d’urgence fin octobre dernier, qui aurait selon lui l’objectif de « remplacer les médecins urgentistes ». Ces IPA pourront « interroger, examiner les patients, prescrire des médicaments et des examens comme un médecin » après une formation spécialisée d’un an (sur deux au total).

Initialement imaginée pour la prise en charge au long cours de patients atteints de pathologies chroniques, cette profession tend à se généraliser à toutes les spécialités médicales, affirme le SNPHAR-e qui fustige « une médecine de moindre coût, sans évaluation de la qualité et de la sécurité des prises en charge ». Le syndicat demande la révision du décret des IPA d’urgence, afin de clarifier et de sanctuariser les places respectives du médecin et de l’IPA dans la prise en charge des patients aux urgences.

Numéro unique

Autre sujet qui fâche : la loi Matras, qui prévoit (entre autres) l'expérimentation un « numéro unique d'appel » d'urgence pour la police (17), les pompiers (18) et le SAMU (15), et propose aussi « une vision secouriste et non médicale des prises en charge des patients en médecine pré hospitalière », dénonce le syndicat.

Selon le Dr Ben Hellal, le texte prévoirait de« réduire les coûts de fonctionnement du Smur ». Un décret pourrait permettre à de « simples secouristes » de faire des gestes multiples et variés comme « injecter de produits, donner des aérosols, faire des électrocardiogrammes, et tout cela sans formation préalable », enrage le médecin. Il considère que cela reviendrait à terme à confier la médecine d'urgence à des secouristes et non plus aux médecins.


Source : lequotidiendumedecin.fr