Sécurité sociale : les comptes de la branche famille perclus d'« erreurs », la branche maladie s'en tire mieux malgré des anomalies

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Publié le 17/05/2023
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Crédit photo : Phanie

C'est un exercice de validation financière attendu chaque année avec inquiétude par les responsables des différentes branches de la Sécu (et par leurs comptables).

La Cour des comptes vient de certifier « avec réserve » les comptes 2022 de quatre des cinq branches de prestations du régime général, ainsi que ceux de l'activité de recouvrement. Mais elle a carrément refusé de certifier ceux de la branche famille (réseau des CAF) et de son bras armé – la Cnaf – au regard de l'ampleur des anomalies comptables. 

Près de six milliards d'euros par pertes et profits

Sur la branche famille, donc, le constat est très sévère. « Le montant des erreurs non corrigées par les actions de contrôle interne est beaucoup trop élevé : 5,8 milliards d'euros de versements indus mais aussi de prestations non versées à tort ont été constatés à la fin de 2022, qui ne seront jamais régularisés, explique la haute juridiction. Ce montant a doublé en quatre ans. De plus, les actions de contrôle n'ont pas été adaptées à cette dégradation. Malgré ses alertes l'an dernier, la Cour n'a pas constaté d'actions de redressement de la situation à court terme et appelle la Cnaf à amplifier ses efforts pour retrouver une meilleure qualité de liquidation. » 

Ces erreurs représentent 7,6 % du montant des prestations l'an passé et concernent notamment le RSA, la prime d'activité et les aides au logement. En particulier, un quart des montants versés au titre du RSA est entaché d'erreurs. Et celles liées aux opérations internes effectuées par les CAF restent à un niveau élevé (1,7 milliards d'euros). 

Le directeur de la Cnaf, Nicolas Grivel, explique notamment cette situation par « un système de prestations hypercomplexe » et une succession d'événements (Covid, réforme des APL...) qui « ont fait exploser les indicateurs d'erreurs ».
 
Branche maladie : une IJ nouvelle sur dix est erronée !
 
Les autres périmètres de la Sécu s'en tirent mieux. La Cour valide mais avec réserve les comptes des branches maladie et accident du travail-maladie professionnelle (AT– MP) et ceux plus généralement de la Cnam. La rue Cambon précise que le montant estimé des erreurs affectant les règlements de frais de santé atteint 3,4 milliards d'euros (3,3 % de leur montant), « essentiellement au détriment de l'Assurance-maladie ». Ce chiffre n'intègre ni les règlements au bénéfice d'assurés qui ne remplissent plus les conditions d'affiliation, ni les erreurs de facturation des hôpitaux publics et privés non lucratifs ni les fraudes avérées. Précisément, les fraudes – estimées par la Cnam sur un périmètre encore incomplet – font apparaître un préjudice important (0,9 à 1,3 milliard d'euros), grâce à des études ciblées (infirmiers, médecins généralistes, kinés...). 

Enfin et surtout, la Cour précise qu'une indemnité journalière (IJ) nouvellement attribuée sur six est « erronée ».
 
Erreurs aussi sur la branche vieillesse 

La Cour a certifié également avec réserve les comptes de la branche vieillesse et ceux de la Caisse nationale d'assurance-vieillesse (Cnav). En 2022, une prestation de retraite sur sept attribuée à d'anciens salariés comporte une erreur financière. Les anomalies commises par les caisses de retraite portent sur 1,1 % du montant des nouvelles prestations. S'agissant des retraites des indépendants, « les erreurs de calcul ne sont pas mesurées avec la même précision que pour les salariés », ajoute la Cour.

Enfin, les comptes de la branche autonomie ont eux aussi été validés avec réserve. Des erreurs affectent une partie des enregistrements comptables. Et le contrôle interne des opérations effectuées par la CNSA ou pour son compte par les branches maladie et famille présente « des faiblesses »

Parmi les axes prioritaires visant à améliorer la fiabilité des comptes du régime général, la Cour recommande de réduire « à la source » les risques financiers liés à la gestion des prestations et des prélèvements sociaux, d'accroître les contrôles portant sur les processus de gestion à « forts enjeux financiers » et d'intégrer le contrôle interne dès la conception des mesures nouvelles, pour stopper les risques d'indus et limiter le risque de non-recouvrement.  

C.D. (avec AFP)

Source : lequotidiendumedecin.fr