Accès aux antirétroviraux dans le monde

Cinq millions de patients attendent toujours

Publié le 30/09/2009
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« BEAUCOUP a été accompli depuis l’Assemblée générale des Nations unies de 2006 au cours de laquelle les leaders politiques mondiaux se sont engagés à atteindre l’objectif d’un accès universel à la prévention, aux traitements, aux soins et au soutien en matière de VIH d’ici à 2010 », notent avec satisfaction Margaret CHAN, directrice générale de l’OMS, Michel Sidibe et Ann M. Veneman, directeurs exécutifs, respectivement, de l’ONUSIDA et l’UNICEF. Le rapport publié par les organisations qu’ils représentent, le troisième depuis 2006, montre en effet que des progrès ont été réalisés dans la riposte contre le VIH/sida, même si « dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire, les objectifs sont encore loin d’être atteints ».

Parmi les succès enregistrés en 2008, les auteurs du rapport notent la nette amélioration du volume et de la portée des données, ce qui témoigne d’une extension des programmes nationaux de lutte. Pour la première fois, l’OMS, l’UNICEF et l’ONUSIDA ont pu disposer de données pour 158 des 192 États membres de l’ONU (139 pays à revenu faible ou intermédiaire et 19 pays à revenu élevé), qui ont utilisé le même outil de notification avec pas moins de 46 indicateurs.

Du mieux en Afrique subsaharienne.

L’accès au traitement, qui a continué de s’étendre à un rythme rapide, constitue une des avancées notables de l’année 2008. Plus de 4 millions de personnes, adultes et enfants, dans les pays à faible et moyen revenu, ont bénéficié d’antirétroviraux cette année-là. C’est plus de 1 million de plus (36 %) qu’à la même époque de 2007 et 10 fois plus qu’il y a cinq ans. La plus forte croissance du nombre de patients sous traitement a été observée en Afrique subsaharienne, région la plus gravement touchée, où près de 3 millions de personnes étaient sous traitement, contre 2 millions en 2007. La couverture en traitement dans la région s’est améliorée, passant de 33 % en 2007 à 44 %. Les femmes ont le plus bénéficié des traitements : elles représentent près de 60 % des adultes sous antirétroviraux et 55 % des personnes qui en ont besoin.

Ces bons résultats doivent cependant être tempérés : seulement 38 % des 730 000 enfants qui avaient besoin d’un traitement y avaient accès et « plus de 5 millions des 9,5 millions de personnes qui en auraient besoin ne bénéficient toujours pas d’antirétroviraux », souligne le rapport. Par ailleurs, si les patients mis sous traitement, le restent (75 % le sont encore au bout de 12 mois, 67 % au bout de 24 mois), avec un taux de résistance aux traitements faible (moins de 5 %), beaucoup sont diagnostiqués et traités trop tardivement.

Dépistage et conseil.

Pourtant, les programmes de dépistage et de prévention progressent. En 2008, 21 % (contre 15 %) des femmes enceintes ont bénéficié d’un test de dépistage et près de la moitié de celles qui étaient séropositives a bénéficié d’un traitement. Près de 90 % des pays qui ont transmis des données possédaient une politique nationale de conseil et de dépistage en 2008, contre 70 % en 2007, avec un nombre d’établissements assurant ces services en augmentation de 25 000 à 33 600 (données établis pour 66 pays qui possédaient des données comparables). Dans la plupart des pays, les tests de dépistage sont gratuits. Les enquêtes démographiques montrent que le pourcentage de personnes qui déclarent avoir fait un test et en avoir reçu le résultat est passé de 15 % (2005-2006 dans 12 pays) à 39 % (2007-2008 dans 7 pays). Les femmes sont plus nombreuses que les hommes à avoir accès aux services de conseil et de dépistage. « Ces résultats peuvent être attribués à l’expansion du conseil et du dépistage à l’initiative du soignant dans les établissements de santé, ainsi qu’aux différentes approches à l’initiative du patient et avec une assise communautaire », indique le rapport.

Des obstacles et difficultés quant au dépistage demeurent : la connaissance du statut sérologique reste modeste – seulement 40 % des personnes vivant avec le VIH connaissent leur séropositivité ; les populations à risque élevé d’infection, en particulier, les homosexuels, les professionnel(le)s du sexe, les consommateurs de drogues injectables et les prisonniers continuent d’avoir un accès limité au dépistage.

Circoncision dans 13 pays.

L’accès à la prévention dans ces populations est également plus problématique. Si les programmes d’échanges d’aiguilles et de seringues sont de plus en plus disponibles (au moins 30 pays ont affirmé le proposer), tout comme les programmes de traitement de substitution aux opiacés (dans 26 pays), le rapport indique aussi que « la criminalisation de l’injection de drogues et l’incapacité de déceler des comorbidités chez beaucoup de toxicomanes » demeurent des freins à l’élargissement de services adaptés. Le taux d’utilisation du préservatif lors du dernier rapport annal est de 60 % chez les homosexuels, une population dans laquelle les dernières données mettent en évidence la dynamique de l’épidémie, notamment en Afrique subsaharienne, où les relations entre personnes du même sexe sont taboues. Chez les professionnels du sexe, le taux d’utilisation du préservatif est plus élevé (86 %), grâce sans doute aux campagnes de promotion du préservatif.

L’année 2008 a aussi été marquée par la mise en place de nouvelles stratégies de prévention, telle que la circoncision. Les 13 pays prioritaires d’Afrique subsaharienne, ceux qui enregistrent les taux de transmission hétérosexuelle les plus élevés avec une faible proportion de personnes circoncises, ont tous mis en place des programmes afin d’accélérer ce type d’intervention. La plupart des pays (107 parmi les 110 à revenu faible ou intermédiaire) possèdent des protocoles nationaux pour assurer une prophylaxie post-exposition. En revanche, la sécurité transfusionnelle continue de représenter un grave problème : 25 % des pays qui ont transmis des renseignements sur le dépistage des infections transmissibles par transfusion (VIH, hépatite B et C, syphilis) reconnaissent être dans l’incapacité d’assurer la sécurité des dons de sang.

En conclusion du rapport, les auteurs mettent en exergue les points qui restent à améliorer. Ils soulignent en particulier la nécessite d’intensifier les efforts pour répondre à la double épidémie de VIH et de tuberculose, première cause de mortalité chez les patients infectés par le VIH. Toutefois, le défi majeur et ambitieux pour les années à venir reste sans doute le financement de la riposte à hauteur des enjeux, immenses, dans le contexte du ralentissement économique mondial actuel. Selon eux, « l’écart entre les besoins et les ressources aujourd’hui disponibles est de plus de 6 milliards de dollars (4 milliards d’euros) ».

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : lequotidiendumedecin.fr