Moins de réadmissions à l'hôpital et de décès à 12 mois

La VNI à domicile bénéfique dans un sous-groupe de BPCO sévère

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Publié le 22/05/2017
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BPCO

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Crédit photo : PHANIE

La ventilation non invasive (VNI) à domicile est-elle en train de trouver (enfin) sa place dans la prise en charge des patients ayant une bronchopathie chronique obstructive (BPCO) ? C'est ce que suggère une étude britannique randomisée britannique en association à l'oxygénothérapie chez 116 sujets ayant une BPCO sévère avec une hypercapnie franche (PaCO2 > 53 mmHg) et persistante.

Cette étude publiée dans le « JAMA » montre que chez les sujets ventilés à domicile, le taux de réadmission à l'hôpital ou de décès est significativement plus bas que dans le groupe non ventilé, avec une durée médiane de réadmission respectivement de 4,3 mois versus 1,4 mois.

Pour l'équipe dirigée par le Dr Patrick Murphy du Saint Thomas' Hospital (Londres), ces nouvelles données favorables à l'association de la VNI à domicile à l'oxygénothérapie fait que la ventilation à domicile « devrait être examinée » dans ce sous-groupe de patients hypoxémqiues ayant une hypercapnie persistante à distance d'une exacerbation (2 à 4 semaines).

Les rebondissements d'une controverse ancienne

L'intérêt de la VNI au long cours est resté longtemps très controversé avec des données de faible niveau de preuve, variables et contradictoires. En 2012, dans un rapport sur la ventilation mécanique à domicile, la Haute Autorité de santé (HAS) émet la recommandation suivante : « Dans l'attente d'études permettant d'identifier le sous-groupe de patients répondeurs, la VNI à domicile ne doit pas être systématique, en tout cas pas sur la base d'une hypercapnie (avec PaCO2≥55 mmHg) isolée. »

Alors que l'OMS estime que la BPCO sera la 3e cause mortalité en 2020, la question n'en finit pas de susciter l'intérêt. Et deux études randomisées enfin bien montées (environ 200 inclusions dans chaque) sont publiées en 2014… mais, là encore, avec des résultats contradictoires. Retour à la case départ. L'une publiée dans « The Lancet Respiratory Medicine » par l'équipe de Köhnlein conclut à une réduction de la mortalité à 12 mois par rapport au traitement standard, l'autre (RESCUE trial) publiée dans « Thorax » ne met aucune différence entre les deux prises en charge (taux de réadmission, mortalité, fréquence des exacerbations, fonction pulmonaire, qualité de vie).

Ici, par rapport à l'étude RESCUE, les chercheurs ont pris grand soin de sélectionner des patients plus graves. Ces derniers avaient non seulement une hypoxémie chronique mais aussi une hypercapnie persistante stable (PaCo2 ≥ 53 mmHg), au moins 2 à 4 semaines après la résolution d'un épisode aigu d'acidose respiratoire. Étaient exclus les sujets obèses, ayant un syndrome d'apnées obstructif du sommeil (SAOS) ou d'autres causes de détresse respiratoire.

Un profil mieux cerné… mais pas encore assez

Les auteurs ne se disent pas surpris par le peu d'effet observé sur la qualité de vie. « C'est sans doute prévisible compte tenu de la gravité de la maladie dans la cohorte BPCO constituée et compte tenu du niveau élevé d'incapacité physique au départ », écrivent-ils. À l'inverse, ils s'estiment rassurés que la mise en place d'une ventilation à domicile n'ait pas alourdi le fardeau de la maladie. L'observance dans l'étude est d'ailleurs satisfaisante (4,7 heures/nuit à 6 semaines et 7,6 heures/nuit à 12 mois), soulignent deux pneumologues, l'un américain, le Dr Nicholas Hill, l'autre turc, le Dr Aylin Ozsancak, dans un éditorial.

Si les mécanismes d'amélioration restent « non élucidés », les éditorialistes estiment « qu'il devient possible d'élaborer un profil pour sélectionner les patients et les paramètres du ventilateur le plus susceptibles d'être bénéfiques pour la ventilation non invasive en pression positive à domicile au long cours ». Comme la HAS le mentionnait déjà en 2012, les spécialistes font remarquer que « l'overlap syndrome », ce syndrome associant un SAOS et une BPCO, « est un autre marqueur prédictif de bénéfice de la VNI ».

Pour les éditorialistes, « après tant de preuves contradictoires accumulées à ce jour, d'autres études sont nécessaires pour confirmer ces récents résultats et mieux définir les caractéristiques des patients (y compris l'existence de respiration perturbée lors du sommeil) et les aspects techniques qui vont optimiser les chances de succès de la VNI à domicile chez les patients BPCO ».

 

 

 

 

Dr Irène Drogou

Source : Le Quotidien du médecin: 9583