Prélèvement et greffe d’organes à partir de donneurs de la catégorie III de Maastricht

Un protocole autour de trois grands principes

Publié le 13/04/2017
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PROTOCOLE

PROTOCOLE
Crédit photo : PHANIE

La classification des décès après arrêt circulatoire (1) décrit des situations cliniques différentes. La catégorie III implique qu’il y ait en amont une décision de limitation ou d’arrêt des thérapeutiques (LAT), dans le cadre de la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie (dite Loi Léonetti, 2 005) [2].

Après une phase de réflexion et de débats sur les questions éthiques, il a été demandé à l’Agence de la biomédecine d’engager la rédaction d’un protocole en collaboration étroite avec les professionnels de la réanimation, du prélèvement et de la greffe. Ce protocole s’articule autour de 3 grands principes :

- les soins de fin de vie incluent l’opportunité de donner ses organes et tissus après sa mort ;

- l’éventualité d’un prélèvement ne peut interférer ni dans la décision de LAT, ni dans son mode de réalisation, ni dans les soins palliatifs d’accompagnement. Elle ne doit en rien conduire à causer ou accélérer le décès ;

- la décision et la mise en œuvre de la LAT sont sous la responsabilité de l’équipe médicale de réanimation indépendamment de toute procédure potentielle de don d’organes.

Donneurs de moins de 66 ans

Les critères de sélection du donneur ont été choisis en vue de limiter le risque de non fonction ou de dysfonction des organes après la greffe et n’autorisent le prélèvement d’organes et la greffe que chez les donneurs de moins de 66 ans et sous condition du respect des durées d’ischémie chaude compatibles avec la viabilité des greffons. Le diagnostic de mort par arrêt circulatoire implique la constatation pendant 5 minutes, sans la moindre intervention médicale de la disparition de la pulsatilité artérielle et le constat des signes cliniques de la mort encéphalique (SME : sujets en état de mort encéphalique).

L’interrogation du registre national des refus (RNR) se fait dès la déclaration de décès signée. La dernière partie du protocole est consacrée aux conditions à réunir pour garantir la qualité des organes et aux modalités de sélection et d’information des receveurs. La pose d’une circulation normothermique limitée à l’étage abdominal (circulation régionale normothermique : CRN) est recommandée, après la déclaration de décès et l’interrogation du registre des refus. La sélection des receveurs a pour but d’éviter les situations où le risque de mauvaise tolérance de l’ischémie chaude est élevé (3,4).

Excellents résultats

Après plus de 2 ans d’activité, 145 donneurs ont été recensés sur 9 sites, 75 ont été prélevés permettant la réalisation de 133 greffes rénales. Les greffes rénales présentent d’excellents résultats avec un taux de reprise retardée de fonction significativement plus bas (9 % vs 20 %) et une meilleure clairance de la créatinine à la sortie et à 1 an comparés aux greffes rénales issues de SME. De plus, 37 greffes hépatiques et 3 pulmonaires ont été réalisées avec d’excellents résultats post-greffe.

Ces bons résultats sont dus à un protocole très précis et consensuel et au choix innovant des professionnels de mettre en place un reconditionnement postischémique avec le recours à la CRN. L’extension de ce programme à d’autres centres hospitaliers est en cours sur l’ensemble du territoire.

Agence de la biomédecine

Références
(1) Thuong M. et al. Transpl Int. 2 016 Mar 17. Review.
(2) Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. JO n° 95 du 23 avril 2005.
(3) Videcoq M. et al. Courrier de la Transplantation Vol XV – n° 3, p 109-116.
(4) Antoine C et al. Soins, n° 808, sept 2016, p 26-31.

Dr Corinne Antoine

Source : Bilan Spécialiste