Dans une mise à jour de ses préconisations thérapeutiques contre le Covid-19 publiée ce 22 avril, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande « fortement » l’utilisation de l’antiviral de Pfizer, le Paxlovid, combinant nirmatrelvir et ritonavir, pour les patients atteints d’une forme non sévère de l'infection, mais à risque élevé d’hospitalisation, comme les patients non-vaccinés, âgés ou immunodéprimés.
Dans le « BMJ », le groupe d'experts chargé d’élaborer les lignes directrices de l’OMS estime que le Paxlovid représente « un choix supérieur » aux alternatives disponibles, prévenant « plus d’hospitalisations » tout en entraînant « moins de risques potentiels » que le molnupiravir (Lagevrio, laboratoire Merck) et en étant « plus facile à administrer que les options intraveineuses telles que le remdesivir et les traitements par anticorps ».
La vaccination reste une « intervention clé »
Cette recommandation s’appuie sur de nouvelles données « probantes de certitude modérée », issues de deux essais contrôlés randomisés impliquant 3 100 patients, montrant une réduction des admissions à l'hôpital (84 admissions de moins pour 1 000 patients), sans « différence importante sur la mortalité ».
Les données manquent en revanche pour une utilisation du Paxlovid chez les moins de 18 ans, ainsi que chez les femmes enceintes ou allaitantes. La recommandation ne concerne pas non plus les patients atteints de formes sévères, là aussi faute de données dans cette population.
Une recommandation « conditionnelle » (faible) porte aussi sur le remdesivir (Veklury) pour les patients atteints de Covid-19 non sévère à haut risque d'hospitalisation. L’antiviral de Gilead était jusqu’ici déconseillé par l’OMS, mais de nouvelles données issues de cinq essais contrôlés randomisés impliquant 2 700 patients ont fait évoluer l’avis des experts. Chez les patients les plus à risque, les admissions à l'hôpital ont été réduites (73 admissions de moins pour 1 000 patients).
Le laboratoire ne désespère pas de voir son traitement reconnu pour la prise en charge des patients, quelle que soit la gravité de la maladie. Les recommandations actualisées de l'OMS « ne reflètent pas pour le moment le large ensemble de données disponibles soutenant l'efficacité de Veklury à divers stades de gravité de la maladie, à la différence de plusieurs autres recommandations thérapeutiques internationales », souligne un communiqué, rappelant que plus de 40 pays, dont les États-Unis, mais aussi la Société européenne de microbiologie clinique et maladies Infectieuses, ont intégré le remdesivir à leurs directives.
En France, si le Paxlovid est recommandé « pour les adultes atteints de Covid-19 ne nécessitant pas d'oxygénothérapie et à risque élevé d'évolution vers une forme grave de la maladie », le remdesivir ne fait toujours pas partie de l'arsenal thérapeutique préconisé par la Haute Autorité de santé (HAS).
En parallèle de ces nouvelles options thérapeutiques, qui s'ajoutent aux recommandations conditionnelles précédentes*, les experts de l’OMS continuent de plaider en faveur de la vaccination. « Il est crucial d'empêcher les gens de développer une forme grave de la maladie, de mourir. Et la vaccination est une intervention clé pour la prévention », a insisté la Dr Janet Diaz, responsable de l’équipe clinique chargée de la riposte au Covid-19 à l'OMS, lors d’une conférence de presse, rappelant l’incertitude qui persiste par ailleurs sur le risque d'émergence de résistances.
Pfizer appelé à plus de transparence
La vaccination reste une intervention prioritaire d’autant que les conditions d’administration des deux traitements recommandés peuvent être un frein à leur déploiement dans les pays à revenus faible ou intermédiaire, alertent les experts. Ces antiviraux doivent être en effet administrés « le plus tôt possible au cours de la maladie », ce qui implique un accès aux tests de diagnostic. Le Paxlovid doit être administré oralement pendant 5 jours dans les 5 jours suivant l’apparition des symptômes, tandis que le remdesivir doit être injecté par voie intraveineuse sur 3 jours, dans les 7 jours.
Aussi, « certaines implications en termes de coûts et de ressources peuvent rendre difficile l'accès » aux antiviraux pour ces pays parmi les plus pauvres, ajoutent les experts, jugeant que le déploiement représente un « défi majeur ».
L’OMS pointe en particulier le manque de transparence de Pfizer, rendant « difficile pour les organisations de santé publique d'obtenir une image précise de la disponibilité du médicament, des pays impliqués dans des accords bilatéraux et de ce qu'ils paient ». Et, alors que l’accord de licences signé par le laboratoire avec le « Medicine Patent Pool » (MPP) est limité à un nombre restreint de pays, l'OMS invite « vivement » Pfizer à « rendre ses prix et ses accords plus transparents » et à « élargir la portée géographique de sa licence avec le MPP afin que davantage de fabricants de génériques puissent commencer à produire le médicament et le rendre disponible plus rapidement à des prix abordables ».
* Les experts de l’OMS ont déjà émis des recommandations en faveur de l'utilisation du molnupiravir, du sotrovimab (Xevudy) ou du casirivimab-imdevimab (Ronapreve) chez les patients à haut risque atteints de Covid-19 non sévère. Ils se sont en revanche prononcés contre le recours au plasma convalescent, à l’ivermectine et à l'hydroxychloroquine, quelle que soit la gravité de la maladie. Pour les patients atteints de Covid-19 sévère, l'OMS recommande fortement les corticoïdes, avec l'ajout d'inhibiteurs des récepteurs de l'IL-6 ou de baricitinib.
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