Insultes, agressions physiques et vandalisme en 2015

924 incidents déclarés par les médecins, quasi-record

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Publié le 20/10/2016
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Crédit photo : Données Ipsos

Une très mauvaise année : l'Observatoire de la sécurité des médecins a comptabilisé 924 déclarations d'incidents en 2015 (agressions verbales ou physiques, menaces, vols, dégradations, etc.) – tout proche du pire record de 2013. C'est presque 30 % de plus que la moyenne de 724 déclarations d’incidents par an constatée depuis 2003.

Tous les départements sont touchés mais de façon inégale. Le Nord (64 incidents), les Bouches-du-Rhône (63), l'Isère et la Seine-Maritime (35 chacun), la Loire (33), la Seine-Saint-Denis (27), le Vaucluse (24) et les Hauts-de-Seine (21) arrivent en tête de ce triste palmarès. En bout de liste, on trouve la Côte-d'Or et la Somme (10 incidents chacun), l'Ain, la Charente-Maritime, le Loiret, le Tarn et l'Yonne (9 incidents), les Côtes-d'Armor et l'Hérault (8). Les incidents ont diminué nettement en Île-de-France, baisse qui s'explique par la plus forte présence policière dans la région depuis les attentats, selon l'Ordre.

Le généraliste, principale victime

Dans 65 % des cas désormais, la victime est un médecin généraliste (contre 56 % en 2012) et dans 35 % des cas un spécialiste (contre 44 % en 2012). Les ophtalmologistes concentrent 6 % des incidents déclarés, les médecins du travail 4 %, les psychiatres, gynécologues-obstétriciens et dermatologues 3 %, les radiologues 2 %, les anesthésistes et les neurologues 1 %. « Les spécialités de médecine du travail et radiologie suscitent une forte inquiétude de par la forte progression des déclarations sur un an », constate l'Ordre. Les femmes représentent 44 % des victimes (ce qui équivaut au profil actuel de la profession). Dans un cas sur deux, le patient est à l'origine directe de l'agression. Dans 15 % des cas, c'est un accompagnant qui est l'auteur. L'usage d'une arme régresse : 4 % des agresseurs en utilisaient une en 2014 (contre 2 % en 2015).

Davantage d'incivilités verbales

La proportion d'agressions verbales est en augmentation constante. En 2003, elles représentaient 43 % des déclarations ; le ratio est passé à 69 % en 2015. Parallèlement, la part des vols baisse, passant de 27 % à 19 % sur la même période. Les agressions physiques reculent de 15 % à 8 %. Le vandalisme diminue de 13 % à 8 %.

Le motif de l'incident est variable, mais fréquemment lié à l'exercice. Il s'agit le plus souvent d'un reproche relatif à la prise en charge (33 % des cas), d'un vol (18 %), d'un refus de prescription (16 %), d'un temps d'attente jugé excessif (9 %), ou encore d'un rendez-vous non obtenu. Le refus de payer la consultation (2 %) ou l'état de manque ou d'ébriété de l'agresseur sont des causes plus marginales (1 %).

Les incidents se produisent majoritairement en centre-ville (54 % des cas), en milieu urbain ou proche banlieue (21 %), ou en milieu rural (17 %). Ils ciblent un cabinet libéral dans 71 % des cas et un établissement dans 22 % des situations. Le nombre d'incidents a bondi dans les cliniques (de 3 % à 14 % en un an), les agressions à l'hôpital public restant stables.

Seuls 7 % des incidents signalés donnent lieu à une interruption de travail. L'Ordre regrette que les incidents sans suites légales atteignent un niveau « jamais observé » à 56 % (52 % en 2014). Seuls 32 % des incidents donnent lieu à un dépôt de plainte, et 12 % à un dépôt de main courante. « On peut s'interroger sur une banalisation de l'insécurité », déplore de son côté Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France (FHF).  

Simplification en vue

Dans ce contexte préoccupant, l'Ordre a obtenu de pouvoir se constituer partie civile dans ces affaires. L'institution promet de simplifier « d'ici à la fin de l'année » les déclarations d'incidents, qui pourront se faire en ligne. Mais les initiatives souffrent d'un manque de cohérence nationale. Surtout, le pouvoir judiciaire n'a pas pris la mesure du problème (sur 46 plaintes analysées, le médecin n'a pas été informé de la suite réservée par le parquet dans la moitié des cas). Ces résultats ont été publiés quelques jours après une violente agression commise aux urgences du centre hospitalier de Tourcoing pour laquelle Marisol Touraine a réclamé des « sanctions exemplaires ».

 

 

 

 

Henri de Saint Roman

Source : Le Quotidien du médecin: 9527