Aide au développement : des paroles et des actes ?

Publié le 28/10/2011
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Crédit photo : DR

LE PRÉSIDENT français l’a assuré le 21 octobre en ouverture de la conférence de préparation du G20 sur le thème du développement. Lors du sommet de Cannes, la France soutiendra des « propositions concrètes » dans des domaines cruciaux tels que la sécurité alimentaire, la protection sociale ou les financements innovants. Pour « relever le défi alimentaire », les ministres du G20 proposeront « un plan d’action » en faveur de l’agriculture, où ne devra pas être éludée la question de la volatilité des prix des denrées alimentaires. Ce plan sera censé « encourager les investissements dans toutes les agricultures » du globe, « soutenir l’effort de recherche dans le domaine agricole » et « développer des instruments de couverture des risques (…) qui ne soient pas réservés aux agriculteurs les plus riches », précise Nicolas Sarkozy.

« Pour nous, c’est un minimum que le président du G20 s’empare aujourd’hui de la sécurité alimentaire. Maintenant nous attendons des résultats concrets », déclare Benoît Miribel, président de l’ONG Action contre la faim. Aux côtés de plusieurs ONG, ACF a soumis aux dirigeants des États membres du G20 sept recommandations pour « opérer un véritable changement dans la lutte contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition »*. Néanmoins, les organisations ne sont pas dupes. Il y aura des résistances au sein du G20. Après la réunion annuelle du Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies (CSA), qui s’est tenue le 22 octobre à Rome, Oxfam France constate que « plusieurs gouvernements, notamment des pays exportateurs membres du G20, ne sont pas encore prêts à faire face aux causes profondes des défaillances du système alimentaire mondial, ni à reconnaître les vérités qui dérangent sur les lacunes de leurs politiques ».

Des attentes sur la protection sociale.

Sans plus de précision, Nicolas Sarkozy souhaite par ailleurs que le G20 aborde sans détour le thème de la protection sociale. « En 2009, (…) les pays qui avaient mis en place des systèmes sociaux les plus performants ont connu une récession moins forte. Je m’inscris en faux à l’endroit de ceux qui disent qu’un système social performant, c’est un élément qui empêche la croissance. La crise a montré exactement l’inverse », souligne le chef de l’État. « Il est primordial que les questions de protection sociale soient politiquement mises au même niveau que le travail et l’emploi », indique le Dr Olivier Bernard, président de Médecins du monde qui attend « un engagement fort » des membres du G20. Pour soutenir l’aide au développement, le G20 discutera une nouvelle fois de la question de la taxe sur les transactions financières soutenue aujourd’hui par la France et l’Allemagne. « Qui pourrait contester qu’il est légitime de demander une contribution au secteur financier ? (…) La mondialisation doit être encadrée (…), la mondialisation doit obéir à des règles, parmi ces règles, il va y avoir, il doit y avoir une taxe sur les transactions financières », insiste Nicolas Sarkozy.

Le combat pour la taxe.

Dans un rapport publié en août dernier, le Fonds monétaire international (FMI) juge tout à fait possible d’un point de vue pratique de taxer les transactions financières sans que cela nuise à la compétitivité du secteur. À la simple échelle de la France, une telle taxe à 0,05 % « rapporterait entre 10 et 15 milliards d’euros par an », estime Coalition Plus, qui rassemble plusieurs organisations internationales engagées dans le domaine de la lutte contre le VIH/sida. « Nous attendons un engagement fort pour mettre en place une taxe sur les transactions financières qui soit destinée à l’atteinte des objectifs du millénaire », confie Francesca Belli, responsable du plaidoyer international de l’association AIDES. Une pétition internationale en faveur de la création de cette taxe rassemblant 500 000 signataires a été remise à Nicolas Sarkozy. Dans une note publiée lundi, le Conseil pontifical du Vatican s’est rallié à cette idée tout en soutenant la création d’une « autorité mondiale fondée sur la solidarité ». Lors du sommet de Cannes, Bill Gates présentera des propositions dans le domaine des financements innovants qui incluront outre la taxation des transactions financières, d’autres pistes de prélèvements fiscaux supplémentaires sur les revenus du tabac ou sur les carburants destinés aux navires et avions.

Plusieurs pays comme le Royaume-Uni (qui a déjà mis en place une taxation similaire sur les transactions financières), le Canada, les États-Unis, l’Australie ou la Chine restent opposés à la création d’une taxe Tobin. Dans son rapport intitulé, « G20, un fiasco annoncé », l’association Attac France juge impossible la perspective d’un consensus sur une telle mesure à l’issue du sommet de Cannes. « En n’y faisant aucune mention dans sa déclaration finale, le G20 Finances des 14 et 15 octobre a d’ores et déjà enterré » cette possibilité. « Face au refus de la plupart des 20 pays, la présidence française privilégie plutôt aujourd’hui une initiative pilote volontariste, d’un groupe de pays pionniers », à l’instar de la taxe sur les billets d’avion, remarque Attac.

* Ce document est consultable sur Internet : www.feeding20.org.

 DAVID BILHAUT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9034