Journée pour la médecine du trafic

Aider les médecins à mieux comprendre la route

Publié le 14/10/2013
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ISSU DE LA COOPÉRATION entre l’Automobile-Club Médical de France ( ACMF) et la Mutuelle d’Assurance des Professionnels de Santé (MACSF), le  Collège Français de Médecine du Trafic ( CFMT) vient de tenir à Paris sa première journée scientifique sur ce thème. Si certaines bases de données visent principalement à améliorer la sécurité des occupants des véhicules en cas de choc ou à optimiser l’organisation des secours – en démontrant par exemple l’intérêt majeur de la régulation médicale ou des interventions héliportées -, d’autres permettent aussi de mieux suivre le devenir des victimes d’accidents. C’est ainsi par exemple que l’étude « ESPARR » qui porte sur plus de 1 000 blessés de la route dans le Rhône a montré l’ampleur des séquelles, y compris psychologiques, laissées par ces accidents.

Un an après leur survenue, a souligné le Dr Martine Hours (Lyon), seul un tiers des blessés disent avoir totalement retrouvé leur état antérieur, et ils ne sont que 43 % à l’affirmer au bout de trois ans. Près de 18 % des blessés présentent un syndrome de stress post traumatique souvent trop mal connu des médecins, alors qu’une prise en charge précoce permettrait d’en réduire les effets. Par ailleurs, les conséquences familiales, sociales et professionnelles des accidents sont souvent lourdes, avec notamment un grand nombre de ruptures de couples dans les temps qui suivent l’accident.

Surreprésentation des ALD

C’est aussi en croisant les procès verbaux et registres d’accidents de la route avec d’autres données, dont celles de l’assurance maladie, que l’on peut mieux cerner certains facteurs d’accidents, dont la prise des médicaments au volant. Ces études ont déjà permis d’incriminer les médicaments dans près de 3 % des accidents, et ont validé la mise en place des pictogrammes jaunes, orange et rouge sur les boites de médicaments. D’autres études plus récentes ont encore affiné ces données, a montré le Dr Ludivine Orriols (Bordeaux). Elles montrent par exemple une surreprésentation des patients souffrant d’affections de longue durée (ALD) parmi les accidentés, notamment pour les patients asthmatiques, ce qui était peu connu. Les maladies cardio vasculaires ne génèrent pas de sur risque, pas plus que la maladie d’Alzheimer, dans la mesure où les patients atteints arrêtent rapidement de conduire. Mais il manque encore de nombreuses études sur ces sujets, en particulier sur le rôle des médicaments sans ordonnances, par définition non inscrits dans les statistiques de l’assurance maladie. Par ailleurs, a relevé le Dr Philippe Lauwick ( ACMF), les médecins doivent être très prudents lorsqu’ils conseillent à un patient de ne pas conduire s’ils prennent tel ou tel médicament, car ils peuvent être tentés de faire exactement l’inverse, c’est-à-dire arrêter le médicament et prendre le volant, ce qui peut être redoutable.

Comprendre ls réalités de la route.

Le Pr René Amalberti, professeur honoraire de neurophysiologie au Val-de-Grâce, vient de succéder au Dr Michèle Muhlmann-Weill à la tête du CFMT. Pour lui, la diffusion de ces travaux à l’ensemble des médecins doit les aider à affiner leurs stratégies et à mieux comprendre les réalités de la route. Le CFMT se donne pour objectif de créer un véritable réseau de professionnels de santé oeuvrant dans le domaine de la sécurité routière, largement ouvert à la médecine praticienne. Sa prochaine réunion portera sur le vieillissement et la conduite, et se tiendra le 19 mars dans les locaux de la MACSF.

 DENIS DURAND DE BOUSINGEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9271