Covid-19 : « l'école n'amplifie pas la transmission du virus, contrairement à la grippe », explique le Pr Arnaud Fontanet

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Publié le 16/04/2021
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Crédit photo : Phanie

Alors que le retour en classe est prévu le 26 avril pour les élèves de maternelle et de primaire, le Pr Arnaud Fontanet, responsable de l'unité Épidémiologie des maladies émergentes à l'Institut Pasteur, a fait le bilan des connaissances sur le rôle des enfants dans l'épidémie lors du point hebdomadaire de l'ANRS Maladies infectieuses émergentes.

Concernant la susceptibilité à l'infection, « les études les plus informatives sont celles qui ont été faites en milieu familial avec introduction d'une personne infectée, estime l'épidémiologiste. Ce n'est pas encore un consensus scientifique, mais les données tendent à montrer une moindre susceptibilité à l'infection chez les enfants de moins de 10 ans en comparaison aux adolescents et aux adultes, de l'ordre de 30 à 50 % moins importante ». Pour les adolescents, la susceptibilité à l'infection serait identique à celle des adultes.

Circulation virale à l'école, reflet de la communauté

La question de la contagiosité reste également débattue pour les moins de 10 ans. « Les données de charge virale ne sont pas très nombreuses, mais laissent entendre qu'elle serait identique à celle des adultes », note le Pr Fontanet. Le fait que les enfants de moins de 10 ans présentent davantage de forme asymptomatique pourrait expliquer une moindre contagiosité, alors que les symptômes s'accompagnent d'une transmissibilité plus importante, explique-t-il. Les adolescents, quant à eux, sont aussi contagieux que les adultes.

Le rôle des écoles dans la dynamique épidémique a été beaucoup discuté, et pour les pédiatres, la fermeture des établissements scolaires devait être évitée autant que possible. « Les premières études ont été menées à l'automne 2021, et l'impression générale, c'est que la circulation du virus dans les écoles reflète celle au sein de la communauté, mais l'école n'amplifie pas la transmission du virus, contrairement à la grippe », résume le Pr Fontanet.

Par ailleurs, rapporte-t-il, la quasi-totalité des études internationales montre que les enseignants ne sont pas plus à risque d'infection que des personnes du même âge et du même sexe dans d'autres catégories professionnelles : « s'ils sont certainement exposés dans les écoles, ils semblent bien se protéger et ne présentent pas un risque augmenté d'infection ».

Pas de surrisque d'infection pour les parents d'enfants de primaire

Selon l'épidémiologiste, « le vrai problème de la circulation du virus dans les écoles, c'est lorsque le virus est ramené à la maison où les gestes barrières ne sont pas respectés ». Dans le cadre de l'étude ComCor de Pasteur sur les circonstances de contamination, « nous avons observé qu'il y avait une augmentation de risque d'être infecté, de près de 30 % si vous avez un enfant scolarisé au lycée ou au collège, et de l'ordre de 15 % si vous avez des enfants en maternelle ou en crèche », indique le Pr Fontanet. Et pour les parents d'enfants gardés par une assistante maternelle, le risque est augmenté de 39 %. En revanche, l'étude n'a pas mis en évidence de surrisque chez les parents d'enfants scolarisés en primaire.

« Ces résultats, que l'on a retrouvés sur les six mois de l'étude, sont corroborés pour les enfants du collège et du lycée par deux grandes études, l'étude britannique OpenSafely publiée dans le “British Medical Journal” et celle des Américains de l'université Johns-Hopkins en preprint, souligne l'épidémiologiste. La seule différence, c'est l'absence de surrisque dans notre étude associée au fait d'avoir un enfant en primaire ».

L'épidémiologiste, qui appelle à la prudence sur les résultats issus de cette seule étude de Pasteur, avance des pistes pour les expliquer : moindre susceptibilité à l'infection et/ou contagiosité chez les enfants du primaire ou bien encore des contacts plus étroits avec les enfants en bas âge par rapport à ceux de primaire.

La piste des autotests en milieu scolaire

« Nous disposons d'éléments pour dire que l'incidence a baissé depuis deux semaines, en particulier chez les moins de 20 ans », note par ailleurs le Pr Fontanet, évoquant toutefois la possibilité que cette baisse pourrait être liée au fait qu'il n'y ait plus de dépistage en milieu scolaire. Et pour la réouverture prochaine des écoles, il rappelle l'importance de l'aération des salles et évoque la problématique des capteurs de CO2 du fait de la transmission par aérosols. Enfin, le dépistage en milieu scolaire par autotests pourrait être une piste, alors que cette approche a fait ses preuves en Autriche notamment, où le taux d'adhésion est de 98 %.

« À l'automne se posera aussi la question de la vaccination des enfants, qui va être nécessaire je pense pour atteindre l'immunité collective », indique le Pr Fontanet. Les premiers résultats chez les enfants vaccinés avec un vaccin à ARNm sont encourageants.


Source : lequotidiendumedecin.fr