Prévention de la dépendance

La fragilité des personnes âgées, au cœur des débats.

Publié le 01/02/2012
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LE QUOTIDIEN – Vous venez d’être missionné par la secrétaire d’État à la Santé Nora Berra, pour des travaux de prévention de la fragilité, en quoi va consister votre mission ?
Pr Bruno Vellas –

Il y a dans notre société trois catégories de personnes âgées parmi les plus de 65 ans. La moitié d’entre elles est en bon état de santé, même si elles sont traitées pour du diabète de l’hypertension ou autre chose, elles sont sous contrôle. Quelque 10 % sont des personnes âgées dépendantes et 40 % des personnes âgées fragiles ou préfragiles. C’est à cette dernière catégorie que nous allons nous intéresser. Ces personnes ont ensuite un risque de devenir dépendante, multiplié par trois par rapport aux autres ; or dans notre système de santé personne ne s’occupe d’elles en amont. Notre mission va donc consister à mettre au point un outil pour les repérer et leur proposer un programme d’actions.

Quel type d’outil allez-vous utiliser ?

Pour repérer ces personnes fragiles ou préfragiles, nous mesurons des critères bien précis tels que la grande sédentarité, la vitesse de marche très lente : elles mettent 4 secondes pour parcourir 4 m, la perte de poids involontaire, un sentiment de fatigabilité.

À Toulouse, nous avons déjà réalisé une étude sur la vitesse de marche, testée par une cinquantaine de généralistes auprès de leur patientèle. L’idée est vraiment que les généralistes jouent un rôle important, car ils sont aux premières loges pour repérer ces personnes âgées fragiles. Ensuite, nous avons mis au point et ouvert à l’automne dernier une plateforme d’évaluation et de maintien de l’autonomie unique en France pour ces personnes âgées fragiles. Une centaine de patients, dont la moyenne d’âge atteint les 82 ans, y a déjà été pris en charge. Nous y mesurons le degré et les critères de fragilité et leur proposons un programme d’exercices physiques et des actions avec les aides à domicile.

Enfin, le troisième volet consiste à mettre en place des actions de prévention à long terme, notamment en prévenant la dépendance active à l’hôpital. Il s’agit de mesurer l’autonomie des personnes âgées de plus de 75 ans, à l’entrée et à la sortie de l’hôpital. C’est une action que nous menons déjà au CHU de Toulouse. Mais là aussi c’est une première en France. L’objectif qui nous a été fixé est bien sûr, d’étendre ces dispositifs à la France entière.

Comment allez-vous étendre ces dispositifs ?

Cela va se faire de façon progressive. Dans le SROS de Midi-Pyrénées, nous avons prévu la montée en puissance de cette plateforme en 2012 ; et dès 2013, elle sera dupliquée dans les hôpitaux pivots de la région à Tarbes, Castres, Montauban, etc. et dans les maisons de santé. Nous procéderons de la même manière dans les autres régions de France. Nous avons prévu en avril prochain de faire le bilan de la première plateforme toulousaine et fin 2012, de modéliser et étendre ces structures en Midi-Pyrénées puis au niveau national.

Quel budget vous a été alloué pour cette mission ?

Nous sommes encore dans l’attente de la lettre de mission qui devra préciser ce budget.Mais c’est un projet d’envergure qui va s’étaler sur cinq ans. À titre d’exemple en Haute-Garonne, le budget de l’APA s’élève à 200 millions d’euros par an et il augmente chaque année entre 10 et 20 millions d’euros, notre objectif est de diminuer cette augmentation de 20 %. C’est un domaine sur lequel, il est indispensable d’être présent, sinon nous subirons le vieillissement.

Toulouse avait raté la marche pour l’IHU, cette mission est-elle un peu comme un lot de consolation ?

Je ne dirais pas cela, nous n’avions pas été reconnus au moment de l’IHU, mais en réalité notre projet finit par s’imposer avec le soutien de l’agence régionale de santé, des industriels, des universitaires et maintenant du gouvernement.

 Propos recueillis par BÉATRICE GIRARD.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9076