C'était la première saisine de la Haute autorité de la santé par des associations. Cinq longues années plus tard, le résultat est là : un guide de prise en charge des personnes vivant avec le VIH à destination des médecins généralistes. La HAS reprend en grande partie le 8e chapitre des recommandations sur la prise en charge du VIH du conseil national du Sida (CNS). Un texte qui vise à corriger un déséquilibre : moins de 5 % des patients infectés par le VIH sont suivis en médecine de ville.
« Le grand bouleversement concernant cette pathologie est l'amélioration du pronostic. L'espérance de vie des personnes séropositives est désormais identique à celles de la population générale », rappelle le Pr Morlat (CHU de Bordeaux), qui dirige le groupe d'experts chargé de la rédaction des recommandations CNS/ANRS « Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH ». Désormais, les 150 000 Français qui vivent avec le VIH vieillissent (plus de la moitié a plus de 50 ans) et souffrent d'un taux croissant de comorbidités cardiovasculaires, osseuses, cancéreuses, neurocognitives et psychiques.
Attention aux interactions
« Le suivi des patients VIH est proche de celui réalisé par les médecins généralistes en population générale, explique le Pr Morlat. Le médecin généraliste doit pouvoir prendre en charge les questions de comorbidité et faire attention aux interactions médicamenteuses. Le recours au spécialiste peut se restreindre à la question des antirétroviraux ». L'infectiologue pourra également intervenir en cas de problème particulier ou chez les patientes ayant un projet de grossesse. « On souhaite vraiment organiser une correspondance entre médecine de ville et infectiologie hospitalière », insiste le Pr Morlat.
Le texte décrit 2 étapes : l'évaluation globale au cours de la consultation et la gestion du risque accru de certaines pathologies associées. L'évaluation globale commence par un bilan annuel de synthèse et un questionnement sur l'adhésion au traitement antirétroviral, sur l'état général et nutritionnel, le statut vaccinal, la santé sexuelle, etc. Chaque point d'attention renvoie à une conduite à tenir et à des outils à utiliser, comme la mesure de l'indice de masse corporelle pour l'état nutritionnel ou le MMSE (mini mental state evaluation) pour l'état cognitif.
Une recommandation importante : la prévention des consommations de cannabis, de drogue, d'alcool et surtout de tabagisme auquel s'adonnent 40 % des personnes infectées par le VIH. « Les maladies liées au tabac sont la première cause de décès des patients VIH », rappelle le Pr Morlat.
Une fois arrivé à l'étape de la gestion du risque accru, un soin tout particulier est apporté à l'évaluation des risques d'infarctus du myocarde et d'hypertension artérielle par le biais de l'outil SCORE. Les infections à VIH sont en effet considérées comme un facteur de risque cardiovasculaire supplémentaire.
Insister sur le Tasp
« Les médecins généralistes ne sont pas toujours habitués à aborder les questions de sexualité, note Franck Barbier, responsable des nouvelles stratégies de santé de l'association AIDES qui avait participé à la saisine. Il faut insister sur le Tasp (treatment as a prevention) et le fait qu'une personne sous traitement ne transmet plus le VIH, ajoute Franck Barbier, responsable des nouvelles stratégies de santé de l'association AIDES qui avait participé à la saisine. La question des vaccinations est également importante pour les gays », poursuit-il.
Si elle jouera un plus grand rôle auprès des patients VIH, la médecine de ville n'est toutefois pas appelée à prendre en charge la totalité des séropositifs. « Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'une population plus précaire que la population générale, rappelle Franck Barbier. Or l'hôpital permet une prise en charge à 100 %, sans reste à charge, et garantit la présence d'assistantes sociales », poursuit-il.
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