Une femme médecin française nommée par le Vatican

La « surprise totale » du Dr Catherine Bonnet

Publié le 31/03/2014
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Crédit photo : dr

Rompant le silence qu’elle oppose à toutes les sollicitations médiatiques, le Dr Catherine Bonnet, tout en faisant part du devoir de réserve qui est maintenant le sien, réagit à sa nomination aux côtés de trois autres femmes laïques : l’Irlandaise Marie Collins, qui fut abusée par un prêtre, la psychiatre britannique Sheila Hollins, membre de la Chambre des Lords, et l’ancienne premier ministre polonaise Hanna Suchocka.

Au sein de la commission pontificale créée par le pape François, ces femmes sont en situation de parité, pour une fois, avec quatre autres membres masculins, le cardinal archevêque de Boston O’Malley, deux jésuites et un prêtre psychothérapeute allemand. « Ma surprise est totale, dit la pédopsychiatre au « Quotidien ». C’est un très grand honneur pour moi de participer à cette commission qui va travailler au plan international, scientifique, humain et spirituel sur la question de la protection des mineurs. Je suis d’autant plus impressionnée d’avoir été sollicitée que je ne suis pas particulièrement active dans le domaine religieux et que je considère le pape comme une personnalité d’une très grande humanité. »

Le Dr Bonnet explique qu’elle a accepté de participer à la nouvelle instance vaticane car « c’est capital aujourd’hui de pouvoir échanger sur les enfants et les jeunes de 0 à 18 ans qui sont victimes de violences, qu’elles soient physiques, sexuelles ou psychiques ».

Un combat essentiellement médical

Ce combat, souligne-t-elle, « est essentiellement médical ». « Or, déplore-t-elle, les médecins ne bénéficient toujours pas d’une formation initiale pour détecter ces violences. Les médecins qui ne sont pas fonctionnaires sont confrontés à un dilemme éthique : soit ils signalent selon l’article 226-14 du code pénal leurs soupçons de violences, et ils risquent des poursuites et des sanctions disciplinaires, à l’inverse, un non signalement, peut entraîner des sanctions pénales selon les articles 434-3 et 223-6 du code pénal. Ce sont les enfants qui sont avant tout les premières victimes du manque de clarté de la législation. Il serait indispensable d’étendre l’obligation de signaler à tous les médecins avec une protection de leur responsabilité disciplinaire, civile et pénale comme au Canada et aux États-Unis. De surcroît, nous font défaut en France des études épidémiologiques et cliniques telles que les États-Unis les ont menées. »

Dans son parcours professionnel, le Dr Bonnet s’est trouvée plusieurs fois exposée elle-même à des procédures disciplinaires pour dénonciations calomnieuses et elle a fait l’objet de blâmes. Elle a même été contrainte d’exercer à l’étranger avant d’être réhabilitée en appel et d’être décorée de la Légion d’honneur. Elle est l’auteur de L’enfant cassé (Albin Michel) et de L’enfance muselée (éditions Thomas Mols).

La nouvelle commission du Vatican se met en place un mois après la publication du rapport du comité des droits de l’enfant des Nations Unies, un rapport qui s’inquiétait du « manque d’effort » du Saint-Siège pour combattre les abus. Au-delà des scandales de pédophilie qui ont éclaboussé l’Église catholique ces dernières années, la commission devrait étendre ses travaux au « développement des meilleures pratiques (pour protéger les mineurs), telles qu’elles ont émergé dans les sociétés ».

Christian Delahaye

Source : Le Quotidien du Médecin: 9314