Le plan pour préserver les antibiotiques

Le juste soin, la juste prescription

Publié le 21/11/2011
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« IL S’AGIT de mettre toutes les chances du côté de chaque patient tout en préservant l’avenir de la collectivité face aux infections bactériennes », a souligné le Dr Jean-Yves Grall, directeur général de la santé, lors du lancement du plan. Une approche en quelque sorte « citoyenne », poursuit le Dr Grall.

Le Pr Benoît Schlemmer, président du Comité national de suivi, l’a rappelé, les antibiotiques sont des « médicaments à part » : « Les antibiotiques comme les anti-infectieux sont les seuls médicaments dont l’impact n’est pas seulement individuel pour ceux qui les prennent mais aussi collectif. »

Dix ans après le premier plan, lancé en 2001, des progrès ont certes été accomplis, notamment avec la mise en place d’un système de surveillance des consommations et des résistances. La baisse de 16 % des consommations a surtout concerné l’antibiothérapie ambulatoire de ville, qui représente 85 à 86 % de ces consommations, notamment chez les enfants. Chez l’adulte, après avoir diminué, la consommation remonte depuis deux ans. Une tendance « préoccupante », selon le Pr Schlemmer. En milieu hospitalier, la tendance est également inquiétante, les résultats y ont été moins bons et « sont extrêmement disparates d’un établissement à un autre ». Enfin, si certaines résistances ont diminué (pneumocoque, staphylocoques dorés), d’autres augmentent, alors que l’émergence des entérobactéries productrices de carbapénèmases inquiète.

Trois axes, 21 mesures.

Le plan 2011-2016 vise donc à prévenir les résistances et le risque d’impasse thérapeutique, « une menace de santé publique majeure », selon les autorités. Son objectif est à la fois quantitatif, la baisse de la consommation de 25 % en 5 ans, et qualitatif, la promotion du « juste soin, de la juste prescription ».

Articulé avec les autres plans concernant les pathologies infectieuses d’origine bactérienne (plan stratégique national de prévention des IAS, programme national de prévention des infections nationales), il se décline en 3 grands axes et 21 mesures.

Le premier axe vise à améliorer l’efficacité de la prise en charge des patients, avec en particulier une meilleure rationalisation des protocoles et des référentiels de prescription grâce au développement d’outils techniques, à l’information et la formation des professionnels de santé et à des actions de sensibilisation du public.

Le deuxième axe constitue un des enjeux importants du plan : préserver l’efficacité des antibiotiques. Pour cela, la surveillance des consommations et des résistances va être renforcée. Une réflexion est cours, avec notamment l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), afin d’identifier et de lister des classes d’antibiotiques particulièrement génératrices de résistances bactériennes. « Nous devons protéger, comme les autres médicaments mais plus que tout autre, ces biens de santé qui sont des produits rares qui doivent être utilisés de façon particulièrement adaptée », a expliqué le Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l’agence. Des recommandations d’encadrement de certaines molécules devront être prises dans le courant de 2012. En milieu hospitalier, outre la généralisation des prescriptions nominatives, chaque établissement devra adapter la liste de ces antibiotiques à dispensation contrôlée en fonction de son profil d’activité. Une réévaluation du traitement à 48-72 heures et à 7-10 jours pour tous les antibiotiques devra être mise en place grâce à la généralisation des référents antibiotiques prévus dans le plan précédent.

En ville, une liste des antibiotiques de dernier recours devra également être établie, alors qu’une révision des RCP et des AMM, en cours à l’AFSSAPS, devrait permettre de limiter l’utilisation des antibiotiques aux situations dans lesquelles ils sont nécessaires. La nouvelle convention prévoit un objectif de 10 % de baisse des prescriptions chez l’adulte non atteint de pathologie lourde ou de maladie chronique. D’autres mesures pourront faire l’objet d’expérimentation, tandis qu’une réflexion est menée sur la possibilité d’un statut spécifique des antibiotiques et d’une ordonnance spécifique.

La recherche constitue le troisième grand axe du plan. Il s’agit d’encourager la recherche fondamentale et appliquée, un enjeu crucial du fait de la baisse tendancielle du nombre d’antibiotiques efficaces disponibles (de 15 % au cours des dix dernières années) mais aussi la recherche en sciences humaines et sociales.

* Disponible sur le site du ministère de la Santé : www.sante.gouv.fr.

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9045