Le premier suicide assisté en Italie relance le débat sur l’euthanasie

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Publié le 20/06/2022
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Crédit photo : PHANIE

« La vie est magnifique mais je n’ai aucune autonomie dans la vie au quotidien, je dépends des autres pour tout, je suis comme un bateau à la dérive au milieu de l’océan, je suis tranquille, j’ai fait mon choix et maintenant, je suis finalement libre de voler où je veux ». Ces mots ont été prononcés par Federico Carboni quelques heures avant sa mort ce 16 juin. Le premier cas de suicide assisté en Italie.

En novembre 2021, cet ancien routier devenu tétraplégique en 2010 après un accident de la route, avait obtenu le feu vert du comité éthique de l’Agence de santé des Marches (centre), où il était hospitalisé depuis lors. Saisi par les avocats de ce patient qui réclamait le droit de mourir dans la dignité, le comité avait autorisé son suicide assisté en s’appuyant sur une décision rendue par la Cour constitutionnelle en 2019 dans une affaire identique.

Toutefois, malgré l’avis favorable du comité éthique, la sécurité sociale italienne a refusé de prendre en charge les frais de la procédure, c'est-à-dire l’appareil pour l’auto-injection et le produit létal. Pour couvrir ces dépenses qui s’élèvent à près de 5 000 euros, l’association Luca Coscioni qui milite depuis plus de dix ans pour la légalisation de l’euthanasie en Italie, a organisé une levée de fonds.

Un référendum favorable

Ce premier suicide assisté en Italie relance à nouveau le débat sur l’euthanasie qui traîne au Parlement depuis 1984. Un dossier ponctuellement remis sur la table tandis que tout aussi ponctuellement, les députés décident de ne pas décider. L’été dernier pourtant, les associations pro-euthanasie avaient réussi à déposer une pétition signée par plus d’un million d’Italiens auprès de la Cour constitutionnelle pour obtenir la tenue d’un référendum. Cette consultation sur le droit de mourir devait avoir lieu en avril dernier. Mais en février, la Cour Constitutionnelle a rendu un avis défavorable au motif qu’avec l’euthanasie, les normes sur la protection de la vie inscrites dans la Constitution italienne ne seraient plus préservées.

 

Pression de l'Église catholique

Aux réticences des parlementaires et des juges de la Cour constitutionnelle italienne, s’ajoutent aussi les pressions de l’Église à travers la Conférence épiscopale qui accepte le recours à des soins palliatifs comme les médicaments antidouleur mais sûrement pas l’euthanasie. Pourtant, cette position ne fait pas l’unanimité au sein de l’Église où des voix discordantes s’élèvent pour défendre la liberté de choix. « La question n’est pas politique, elle est philosophique et si la science affirme que la vie ne peut pas être récupérée pourquoi dois-je faire vivre l’enfer sur terre à un être humain ? Il faut dépasser cette attitude négative du christianisme », argumente Don Ettore Cannavera, ex-chapelain d’un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs.

Ariel F. Dumont à Rome

Source : lequotidiendumedecin.fr