Nouvelles organisations de soins

Les PASS pour inventer la médecine du futur

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Publié le 13/10/2016
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Comment concilier les valeurs de soins avec les contraintes financières ? Comment peut-on tenir compte de la complexité médico-sociale des patients à traiter dans des structures comme les PASS pour permettre un égal accès aux soins pour tous ? Telles sont les questions récurrentes que se posent les dispositifs des Permanences d’Accès aux Soins de Santé.

Ce sont celles qui ont, une nouvelle fois, été retenues, dans le cadre d’une journée de réflexion qui a eu lieu à Marseille dans l’amphithéâtre Toga, à l’initiative du Collectif national des PASS, en partenariat avec l’UMR Anthropologie, Droit, Ethique et Santé (ADES), la Faculté de médecine de l’Université d’Aix Marseille, et l’Assistance Publique Hôpitaux de Marseille, selon le thème ambitieux : « Les PASS : des laboratoires d'un système de santé en devenir ». Ce fut donc l’occasion toute la journée de s’interroger sur les nouvelles pratiques développées dans ces PASS, confrontées à l’accompagnement de personnes en situation de très grande précarité, qui ne parlent parfois pas la langue et dont on ne peut réduire la prise en charge qu’à une affaire de T2A et de rationalisation des soins. Le Collectif PASS tente de redonner confiance à ces soignants qui expérimentent sur le terrain, des solutions artisanales mais qui se révèlent bien efficaces dans un contexte social tendu. « Il ne faut pas oublier, a rappelé le neurologue Bernard Guiraud-Chaumeil, professeur émérite de l’Université de Toulouse, que l’hôpital a été inventé pour pouvoir intégrer les pauvres, les délinquants et tous ceux dont la société ne voulait plus, C’est ce même défi aujourd’hui. Il faut revenir à la clinique oubliée, celle qui permettait d’aller au plus près des gens, qui soulage, qui console, qui donne confiance, tout cela, c’est 60 % de l’examen clinique, 20 % en plus se fait avec la technique, mais pas plus... »

Pas de standardisation dans les PASS

Alors comment accompagner ces personnes qui cumulent difficultés sociales, souffrance psychique et problèmes physiques ? Elles renouvellent la problématique de la demande de soins, plus complexe, plus longue dans le temps car il y a nécessité à « prendre son temps ». Cela force à interroger les limites de l’hyperspécialisation et de la technicité à outrance. « Il ne s’agit pas de diaboliser la technique mais il y aura toujours nécessité à donner un sens au récit du malade », poursuit le Pr Guiraud-Chaumeil. Le psychanalyste Roland Gori, invité à discuter ensuite avec le médecin, rappelle que « la logique technico financière impose un temps d’écoute réduit sauf dans les PASS. Dans les hôpitaux aujourd’hui, il y a confiscation du pouvoir artisanal et appauvrissement symbolique de la manière de pratiquer. Les PASS échappent à cette standardisation ». Ces dispositifs en échappant aux normes en vigueur, peuvent contribuer à construire de nouvelles organisations de soins. Pour poursuivre la réflexion collective, les professionnels des PASS et leurs partenaires reprendront ces questions et celle de l’accueil des migrants malades lors d’un prochain colloque les 16 et 17 mars 2017 à Toulouse.

De notre correspondante à Marseille, Hélène Foxonet

Source : Le Quotidien du médecin: 9525