Congrès de la Société française de santé publique

Les patients, des experts à part entière

Publié le 07/11/2011
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

DE PLUS EN PLUS présents dans le champ de la santé publique, les experts interviennent lors des crises de sécurité sanitaire mais aussi dans la définition des politiques de santé. Par le biais de nombreux organismes comme le Haut Conseil de la santé publique ou la Haute Autorité de santé, des professionnels « experts » apportent leur contribution au système de santé.

Régulièrement contestés pour leur manque d’indépendance vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques ou des décideurs politiques, ils ont une connaissance scientifique et technique dans leurs disciplines respectives qui leur confère un certain pouvoir. Pourtant, de nouvelles formes d’expertises sont en train d’émerger, en dehors du sérail universitaire…

C’est le cas des experts dissidents « lanceurs d’alertes », qui saisissent les autorités sanitaires de problèmes de santé publique. C’est le cas également des experts dits « profanes », recrutés le plus souvent parmi les patients. Par leur connaissance de la maladie et du système, ils ont acquis une expertise qui leur permet de peser sur l’organisation du système de santé. « L’émergence de cette forme d’expertise est liée à une évolution politique. L’extension de processus démocratiques dans des domaines réservés jusque là à des spécialistes a fait mûrir l’idée que des personnes sans formation universitaire mais concernées par ce sujet sont en capacité de développer des connaissances et doivent être prises en considération, explique Madeleine Akrich, directrice du Centre de sociologie de l’innovation Mines Paris-Tech. Le monde d’incertitudes dans lequel nous vivons et les récentes crises sanitaires ont renforcé l’impression qu’il était imprudent de s’appuyer sur une seule expertise. Dans ce contexte, l’expertise profane prend toute sa place. »

Connaissance médicale.

Les associations se sont depuis longtemps emparées de cette possibilité d’action. Constituées au départ pour aider et soutenir les patients, elles ont rapidement constaté que les malades confrontés tous les jours à une pathologie finissaient par acquérir une expérience importante. Grâce au recueil de ces connaissances, elles peuvent mettre en évidence certains problèmes. Une association de patients souffrant d’aplasie médullaire a ainsi mis en évidence des problèmes sexuels et d’infertilité liés à certains médicaments, problèmes qui n’étaient pas pris en considération par les médecins.

« Il ne s’agit pas de considérations d’ordre psychosocial, insiste Madeleine Akrich, mais bien d’informations qui peuvent apporter des éléments de connaissance médicale. »

Les associations de malades, qui souhaitent avoir voix au chapitre, mènent un travail de veille scientifique, allant jusqu’à la saisine de la Haute Autorité de santé lorsqu’elles le jugent nécessaire, pour faire valoir le point de vue des usagers.

« On constate un véritable intérêt des patients par rapport à la science. Cette mobilisation aide les malades à être acteurs de leur santé et à entrer dans un dialogue plus fécond avec les médecins. » Une forme de démocratie participative.

FLORENCE QUILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9037