Pour sa santé ou par solidarité, les raisons diverses et variées de participer au « Dry January » mises en évidence par Santé publique France

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Publié le 04/03/2022

Crédit photo : PHANIE

Permettre à chacun de questionner son rapport à l'alcool et prendre conscience du poids social qui entoure sa consommation, tel est l'objectif du défi de janvier. Dans une publication récente, Santé publique France a questionné la perception et la motivation d'un groupe de participants à la première édition française de janvier 2020.

Un total de 47 participants (22 inscrits sur le site de l'opération et 25 non-inscrits) a été interrogé, de même que 24 non-participants. Il en ressort que les motivations sont avant tout individuelles (questionner sa consommation et sa capacité à s’abstenir, retrouver une meilleure hygiène de vie…), mais aussi collectives (s'engager dans une sorte de jeu dont le but est d'encourager un proche à réduire sa consommation d'alcool…). Ces motivations diverses sont associées à des niveaux d’engagement plus ou moins forts.

La peur de la stigmatisation

Pour plusieurs participants, l'entrée dans le Dry January est motivée par des expériences d’effets négatifs de l’alcool. Certains évoquent « la gueule de
bois », plus difficile à supporter après 30 ans, et les pertes de contrôle parfois répétitives. Un des autres aspects négatifs de l’alcool mis en avant est la pression à consommer même lorsque l’on n'en a pas envie. Les risques à long terme semblent, en revanche, peu connus, en dehors du risque de prise de poids. Enfin, l’automatisme de la consommation suscite peut susciter des inquiétudes et des craintes de développer une dépendance.

En ce qui concerne les freins à la participation, les personnes interrogées ont témoigné d'une crainte d'être identifiées comme quelqu’un qui a un problème avec l’alcool. Les non-participants, quant à eux, ne s'identifiaient pas comme des cibles de cette opération qu'ils destinent en priorité à des personnes dépendantes ou des jeunes consommateurs qui ne maîtriseraient pas leur consommation. Ils ne perçoivent pas non plus l'intérêt de l'arrêt de la consommation d'alcool, faute de bénéfice à court terme bien déterminé. Dans l'ensemble, le coût social de l'abstinence est bien identifié.

Les participants jugent la communication autour du défi trop faible

Santé publique France propose des pistes d'amélioration, comme le développement de la médiatisation (jugée faible par les participants à l'étude) et la mise à disposition d'outils de soutien adaptés aux expériences et profils des participants.

Rappelons que l'agence sanitaire devait initialement apporter son soutien, et notamment en termes de communication, au « défi de janvier », mais en a été empêchée par décision du chef de l'État. Paradoxalement, « le débat médiatique autour de l’absence de soutien de l’État a parfois été une source d’information, constatent les auteurs. L’indignation que cela a suscitée chez certains participants s’est avérée structurante dans leur rapport au défi, qui la décrivent alors comme le déclencheur chez eux d’un souhait de s’inscrire au défi pour le soutenir, de façon quasi militante. »

En France, la consommation d'alcool fait partie des trois premières causes de mortalité évitable. On estime que 41 000 décès de personnes de 15 ans et plus résidant en France étaient attribuables à l’alcool en 2015. Le défi de janvier s'inscrit dans la tendance qui consiste à s'appuyer sur les dispositifs de marketing social pour promouvoir un changement de comportement dans la population. Les initiatives de « mois sans alcool » se sont multipliées à l'étranger. Les auteurs de Santé publique France ont dénombré au moins 16 campagnes d’envergure nationale dans 12 pays dont neuf européens. La plus ancienne campagne du genre avait eu lieu en Finlande en 2004.

« Les évaluations des dispositifs en Angleterre et Belgique ont documenté des expériences positives pour les participants et des résultats encourageants en matière de santé publique », précisent les auteurs. En France, selon les données communiquées par les organisateurs, l'application Try Dry, disponible en version française depuis l'édition 2021, a comptabilisé 15 000 téléchargements (soit 9 % de plus qu'en 2020). Par ailleurs, un sondage BVA-La Ligue contre le cancer montre que 35 % des Français sont prêts à participer au Dry January.

 

La consommation d'alcool vieillit le cerveau
Foie, cœur, côlon, sein, œsophage… et maintenant le cerveau ? La liste des organes que la consommation régulière d'alcool expose à un risque d'altération ne cesse de s'allonger. Selon une étude publiée dans « Nature Communications » et réalisée à partir des données de plus de 36 000 adultes par les chercheurs de l'université de Pennsylvanie, la consommation quotidienne d'alcool est associée à une altération de la structure cérébrale et au risque de déclin cognitif. Les auteurs se sont basés sur l'étude de clichés IRM de patients britanniques pour qui les niveaux de consommation étaient renseignés. Ils ont observé une association entre une diminution du volume occupé par les substances blanches et grises et la consommation d'alcool. Ils en concluent qu'un patient de 50 ans qui consomme deux verres d'alcool chaque jour a un cerveau structurellement âgé de 2 ans de plus qu'un autre qui ne boirait qu'un seul verre par jour. « Il ne s'agit pas d'une progression linéaire, préviennent les auteurs. La dégradation est de plus en plus marquée avec l'augmentation de la consommation d'alcool. »

Source : lequotidiendumedecin.fr