En 2020, 23 millions d'enfants n'ont pas reçu les trois doses du vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (DTP), s’inquiètent l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l'Unicef. Les deux agences craignent les conséquences du retard pris dans les programmes de vaccination à cause de la pandémie de Covid-19, cumulées à une levée trop rapide des mesures de lutte contre l’épidémie. « En 2021, nous avons le potentiel que se produise une catastrophe absolue », avertit la Dr Kate O'Brien, directrice du département Vaccination à l'OMS, à Genève.
Selon les derniers chiffres sur la vaccination des enfants dans le monde publiés ce 15 juillet, jusqu'à 17 millions d'enfants n'ont « probablement pas » reçu un seul vaccin en 2020. Ce sont ainsi 3,5 millions d'enfants de plus qu’en 2019 qui ont manqué leur première dose de DTP et 3 millions d'autres qui n’ont pas reçu leur première dose contre la rougeole.
Un phénomène accéléré par la pandémie
Les campagnes de vaccination infantile ont été affectées par la mobilisation des ressources et des personnels pour lutter contre la pandémie, mais aussi par les restrictions de déplacement et la peur de la contamination. Les enfants vivant dans des zones de conflit, des endroits reculés ou dans des lieux de vie informels (bidonvilles, notamment) ont été particulièrement touchés.
Ce ralentissement de la vaccination infantile n’est pour autant pas complètement imputable à la pandémie qui a seulement accéléré le phénomène. « Même avant la pandémie, il y avait des signes inquiétants que nous commencions à perdre du terrain dans la lutte contre les maladies infantiles évitables, y compris avec les épidémies généralisées de rougeole il y a deux ans », rappelle Henrietta Fore, directrice de l'UNICEF, soulignant qu’au-delà de la crise actuelle, « la distribution des vaccins a toujours été inéquitable ».
Avant la pandémie, les taux mondiaux de vaccination des enfants contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la rougeole et la polio étaient « au point mort depuis plusieurs années à environ 86 % », notent les deux agences, loin des recommandations l’OMS. Avec la pandémie, le taux de vaccination DTP est tombé à seulement 83 %.
Dans le cas de la rougeole, seuls 71 % des enfants ont reçu la deuxième dose, alors que l’OMS recommande une couverture de 95 % afin de maîtriser l’épidémie. « C'est un signal d'alarme », juge le Dr Seth Berkley, PDG de Gavi, l’Alliance pour la vaccination. « Même si les pays réclament à grands cris de mettre la main sur les vaccins contre le Covid-19, nous avons reculé sur d'autres vaccinations, laissant les enfants à risque de maladies dévastatrices mais évitables comme la rougeole, la polio ou la méningite », ajoute le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS.
Un recul inquiétant dans la région Amérique
L’Asie du Sud-Est et la Méditerranée orientale sont les régions les plus touchées par le recul de la vaccination. En Inde, le taux de couverture DTP a chuté de 91 % à 85 % en un an. Sur le continent américain, seulement 82 % des enfants sont complètement vaccinés avec le DTP, alors qu’ils étaient 91 % en 2016. Dans cette région, l’OMS et l’Unicef déplorent une baisse de la couverture vaccinale « alimentée par le manque de financement, la désinformation sur les vaccins, l'instabilité ».
Les inquiétudes portent également sur les taux de vaccination contre le HPV, déjà faibles avant la pandémie. La fermeture des écoles a freiné les programmes de vaccination. Dans les pays où la vaccination est introduite, « environ 1,6 million de filles supplémentaires ont raté l'examen en 2020 », notent les deux agences. En conséquence, 13 % des filles ont été vaccinées en 2020, contre 15 % en 2019.
La priorité doit ainsi être la reprise des programmes de vaccination, les agences insistant sur la nécessité que la vaccination contre le Covid-19 ne se fasse pas au détriment de la vaccination infantile. « Plusieurs épidémies seraient une catastrophe pour des communautés et systèmes de santé qui luttent déjà contre le Covid-19, rendant plus urgente que jamais la nécessité d'investir dans la vaccination infantile », a souligné le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus.
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