Accusés de rente sur le dos des dialysés, les néphrologues ripostent en s’unissant

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Publié le 28/06/2016
DIALYSE

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Crédit photo : S. TOUBON

Neuf mois après la publication du rapport de la Cour des comptes appelant à une prise en charge plus « efficiente » de l’insuffisance rénale chronique terminale, les néphrologues ne décolèrent pas.

Il faut dire que la Cour a tiré à boulets rouges sur une organisation des soins où prédomine la dialyse en « centres lourds » et en « unités médicalisées ». Les magistrats évoquant même une « rente financière » des néphrologues autour de la dialyse qui freinerait littéralement les évolutions de prise en charge alternatives de ces insuffisants rénaux.

En mai dernier, des représentants de la communauté de patients Renaloo ont ravivé les braises en publiant dans le quotidien « le Monde » une tribune où la dialyse est comparée à « une prison qui met la vie en suspens ». Les auteurs dénonçant à leur tour « les dérives d’une organisation qui conduisent à une répartition inéquitable des ressources et une diminution des chances pour le patient ».

En marge d’une journée sur la maladie rénale chronique organisée la semaine dernière à Paris, la FHP-Dialyse, le SNL et la SFNDT ont tapé du poing sur la table. Le Pr Christian Combe, président de la SFNDT a dénoncé « des campagnes de presse absolument insupportables », avec « beaucoup de désinformation » autour de la prise en charge et du financement de la maladie rénale chronique. « Le secteur de la néphrologie libérale n’est pas figé sur une rente de situation », a déclaré le Dr José Brasseur, président du SNL.

Agir plus en amont

Rejointes par la Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux (FNAIR), ces trois organisations de néphrologues annoncent la création d’une « alliance pour le rein » destinée à « faire des propositions concrètes aux pouvoirs publics » afin d’améliorer la prise en charge de l’insuffisance rénale. Alors que 43 000 Français sont aujourd’hui dialysés pour un coût annuel de l’ordre de 3 milliards d’euros, « il faut agir très en amont, ce que ne favorise pas la tarification actuelle », fait remarquer le Pr Combe. « La prise en charge d’un patient insuffisant rénal nécessite par ailleurs des soins de support (diététicienne, psychologue, spécialiste de l’activité physique, infirmière d’éducation thérapeutique…) dont la plupart ne sont pas facturables », poursuit le président de la SFNDT.

Objectifs illusoires

Alors que la Cour des comptes puis la communauté Renaloo ont appelé à donner une nouvelle impulsion à la greffe – notamment préemptive (sans passer par la dialyse) – les néphrologues s’érigent contre « les appels irréalistes au tout transplantation ». Pour le Dr Gilles Schutz, président de la FHP-dialyse, « rajouter tous les patients quels que soient leur degré de comorbidité et leur situation psychique, apparaît déraisonnable » au risque d’allonger davantage les listes d’attente.

Actuellement, 14 000 patients sont déjà en attente d’une greffe de rein pour environ 3 500 transplantations chaque année. Enfin, sur l’hémodialyse à domicile comme alternative à la dialyse en centre, les néphrologues ne voient pas non plus de grandes marges de manœuvre du fait de la « lourdeur » et de la « faible autonomie » de très nombreux patients. « Mettons à domicile les malades qui peuvent l’être, mais il serait illusoire d’imaginer aller au-delà des 15 % » de patients insuffisants rénaux chroniques terminaux, souligne le Dr Schutz.

David Bilhaut

Source : lequotidiendumedecin.fr