Cancer du rein disséminé : rémission complète de plus de un an après vaccin

Publié le 03/01/2001
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L A recherche d'antigènes tumoraux spécifiques et les tentatives d'immunisation à partir de ces antigènes était ces dernières années, l'un des axes majeurs de la recherche en immunothérapie anticancéreuse. Mais ces études se sont heurtées au polymorphisme antigénique de ces tumeurs qui, monoclonales au départ, se diversifient très rapidement au plan antigénique rendant plus que minces les chances de réussite d'une vaccin trop spécifique. On s'oriente donc actuellement vers des répertoires immunisants beaucoup plus larges, quitte à ce que le contenu n'en soit pas parfaitement connu, voie adoptée par une équipe allemande dont les travaux sont rapportés dans
« Nature Medicine ». Les cellules tumorales fusionnées à des cellules dendritiques (cellules allogéniques de type HLA aléatoire par rapport au receveur) est le facteur immunisant utilisé. Précisons que les cellules dendritiques stimulent à la fois les lymphocytes T cytotoxiques et les helper T.

Dix-sept patients

Une fois obtenue, les cellules hybrides ont été irradiées pour éviter leur prolifération puis administrée en sous-cutanée à proximité de ganglions inguinaux à raison de 5 x 10 puissance 7 hybrides. Un premier rappel a été effectué dans les mêmes conditions six semaines plus tard. Il a été renouvelé tous les trois mois chez les patients dont la maladie s'était stabilisée.
Au total, dix-sept patients atteints de carcinomes rénaux disséminés ont bénéficié de ce nouveau traitement. Après un suivi moyen de treize mois et un recul maximal de vingt et un mois, quatre d'entre eux ont entièrement rejeté leurs métastases, deux autres présentent une réduction supérieure à 50 % de leur masse tumorale, et un patient présente une réponse
« mixte » : certaines localisations progressent alors que d'autres ont disparues. Biologiquement, on a constaté une induction des lymphocytes T cytotoxiques dirigés contre l'antigène tumoral Muc-1 ainsi que le recrutement de lymphocytes CD8 aux sites où étaient injectées de faibles doses de cellules tumorales inactivées.

Une réaction immunitaire intense

Trois constatations méritent d'être soulignées. La première est qu'aucun effet secondaire important n'a été rapporté hormis une fièvre de courte durée et des douleurs au niveau des localisations métastatiques. La deuxième est que trois des quatre patients en rémission ont rejeté toutes leurs métastases dans les trois premiers mois après seulement deux injections. Les auteurs précisent que des réductions de masse tumorale interviennent typiquement dans les semaines qui suivent la première vaccination. Il s'agit donc d'une intense réaction immunitaire. Enfin troisièmement, l'insuffisance de la réaction notée chez le patient présentant une réponse « mixte » tient probablement à une antigénicité des métastases osseuses non représentées dans le vaccin. En effet, les métastases osseuses de ce patient ont progressé alors que disparaissait une masse tumorale dépassant 500 ml.
Un des grands enjeux des prochains travaux sera donc de déterminer si une réponse peut être obtenue aux sites initialement non-répondeurs avec un vaccin de seconde ligne préparé avec des cellules prélevées directement sur ces sites.

D'autres cancers à l'étude

D'ores et déjà, on peut qualifier ces résultats de spectaculaires et encourageants. Reste à attendre leur confirmation sur des effectifs plus grands avec un recul supérieur.
D'autres cancers, comme le cancer du sein et d'autres carcinomes où l'antigène Muc-1 est surexprimé pourraient bénéficier de ce type de traitement.

(1) A. Kugler et coll. « Nature Medicine », vo.  6, n° 3, mars 2000

Dr Marie-Laure DIEGO-BOISSONNET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6828