27° Journées francophones de pathologie Digestive 29 mars - 2 avril 2003 à Paris

Chimioprévention du cancer colique : un marqueur de l'efficacité de l'aspirine est identifié

Publié le 30/03/2003
Article réservé aux abonnés
1276283111F_Img116918.jpg

1276283111F_Img116918.jpg

Congrès-Hebdo

On estime que plus de 85 % des cancers du côlon se développent à partir des adénomes coliques, dont la fréquence après 50 ans est comprise entre 15 et 40 %, selon les tranches d'âge. Seuls certains de ces adénomes se transforment en cancer.

Jusqu'à présent, la seule stratégie efficace repose sur la recherche et l'ablation des adénomes par voie endoscopique.
Des alternatives sont néanmoins envisagées et, parmi celles-ci, la chimioprévention apparaît comme l'une des meilleures voies d'avenir. Au sein des médicaments en cours d'évaluation, l'aspirine est un bon candidat. L'étude prospective, multicentrique nationale, APACC, a montré que de faibles doses d'acétylsalycilate de lysine permettent de diminuer la récidive des adénomes à un an. Cette étude interventionnelle, la première disponible, confirme l'efficacité de cette approche de chimioprévention, mais le recul est insuffisant pour préconiser son utilisation en pratique quotidienne. Il faudra attendre les résultats à quatre ans, qui devraient être divulgués à la fin de l'année, pour confirmer l'efficacité à long terme de l'aspirine. Encore faudra-t-il définir quelles sont les populations cibles.
Le travail présenté dans le cadre des Journées francophones de pathologie digestive devrait contribuer à définir les patients qui pourraient bénéficier d'une telle chimioprévention. Il s'agit d'une étude immunohistochimique sur l'expression de la cyclooxygénase 2 (COX-2) dans les polypes. A faible dose, l'aspirine, on le sait, inhibe la cyclooxygénase de type 1 (COX-1) et diminue le taux des prostaglandines de la muqueuse colique, qui jouent un rôle clé dans la carcinogenèse.

COX-2 est surexprimée dans 40 % des adénomes

Leur concentration est augmentée dans les adénomes et les cancers coliques, augmentation qui est la conséquence de la surexpression de la COX-2 observée dans 40 % des adénomes et 90 % des cancers coliques.
L'objectif de l'étude coordonnée par le Dr R. Benamouzig était l'évaluation du rôle de la COX-2 sur la récurrence des adénomes coliques à un an chez les patients inclus dans l'essai APACC traités ou non par aspirine.
Vingt des 49 patients, soit 41 %, dont l'expression initiale de COX-2 était basse, ont présenté une récurrence d'au moins un adénome, alors que seuls 32 des 102 sujets (31 %) dont l'expression de la COX-2 était élevée ont eu cette évolution défavorable. La récurrence d'au moins un adénome a été observée chez 23 des 83 (28 %) patients du groupé traité par aspirine contre 29 des 68 (42 %) sujets inclus dans le groupe placebo. L'effet protecteur de l'aspirine sur la récurrence à un an n'est significatif que dans le groupe présentant une expression initiale basse de COX-2. Ces résultats suggèrent que la mesure de l'expression de COX-2 dans les adénomes coliques pourrait permettre d'identifier les patients « répondeurs » à une chimioprévention par l'aspirine.
Deux essais publiés au début du mois de mars dans le « New England Journal of Medicine  », confirment l'intérêt de l'aspirine à faible dose, le premier chez les patients ayant un antécédent de cancer colo-rectal (1) et le secoond chez des sujets porteurs d'adénomes coliques (2).
Des études similaires sont actuellement en cours avec des inhibiteurs de la COX-2. L'équipe du Dr Benamouzig participe d'ailleurs à un vaste essai international dont les résultats, très attendus, devraient être présentés à l'automne prochain.

D'après un entretien avec le Dr Robert Benamouzig, service d'hépato-gastro-entérologie, hôpital Avicenne, Bobigny.
(1) Sandler RS et al. « N Engl J Med » 2003 ; 348 : 883-890.
(2) Baron JA et al. « N Engl J Med »v 2003 ; 348 : 891-899.

Dr Marie JORAS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7305