Régulation

Comment augmenter l’enveloppe dédiée aux médicaments dans l’Ondam ?

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Publié le 30/06/2022
Les innovations en matière de médicaments se bousculent. Mais le budget pour l’acquisition de ces nouveaux traitements ne serait pas à la hauteur des enjeux. Le CEPS serait-il trop performant ? L’excès de régulation tue-t-elle la régulation ? Analyse.
De gauche à droite : Jean Tirole, Domnique Libault, Olivier Bogillot, Philippe Bouyoux

De gauche à droite : Jean Tirole, Domnique Libault, Olivier Bogillot, Philippe Bouyoux
Crédit photo : Leem

Pourquoi la France est-elle si performante en matière de déficits ? « Notre système de santé souffre d’un déficit d’anticipation », a diagnostiqué Dominique Libault ancien directeur de la Sécurité sociale, lors du colloque organisé par le Leem, « (Ré) inventer l’économie du médicament ». Mais peut-être aussi d’un déficit démocratique. Les parlementaires, confirme Dominique Libault, n’ont guère le temps lors de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale de confronter leur vision du système de santé sur le moyen ou long terme. D’autant que les objectifs de dépenses sont contraints par les exigences européennes. Au cours du premier semestre, la France doit envoyer ses objectifs de dépenses publiques à Bruxelles. Une fois les objectifs validés, les marges de manœuvre, on l’aura compris, sont très limitées.

Déficit de recherche en France et en Europe

Mais le déficit est aussi majeur en matière de recherche. Il frappe la France et l’Europe, comme l’a souligné Olivier Bogillot (Sanofi). Les Etats-Unis et la Chine ont en effet mis en œuvre des budgets qui creusent l’écart avec le Vieux Continent. Sur le poste des aides d’Etat, là encore les deux hyperpuissances ont des longueurs d’avance. « Cela nous incite à aller ailleurs », souligne Olivier Bogillot.

Le CEPS, efficience redoutable

Dans le champ du médicament, le responsable de tous les maux serait-il alors le Comité économique des produits de santé (CEPS) ? En tout état de cause, son efficience est redoutable pour l’industrie pharma. Alors que le secteur médicament représentait 14% en 2010 du budget de l’Ondam, il a chuté à 11% . Dans le même temps la vague d’innovations est majeure avec des percées en thérapie génique et cellulaire accompagnées des prix en hausse. Mais est-ce un tsunami appelé à connaître plusieurs répliques ou seulement un choc initial qui devrait se normaliser à terme ? s’interroge Philippe Bouyoux, le président du CEPS. Au-delà des outils comme l’horizon scanning, développé par le Leem qui recense les innovations à venir, cette réflexion devrait être intégrée dans la construction de l’Ondam, suggère Philippe Bouyoux.

Réguler autrement ?

Vague appelée à se maintenir sur une période de dix ans au minimum ou limitée dans le temps, la régulation à la française peut-elle encore servir ? « Vous êtes face à un mur, lance Olivier Bogillot à Philippe Bouyoux. La base de dépenses du médicament est trop faible alors que la croissance du marché atteint 10% ». Comment desserrer la contrainte ? La réponse sera politique. Faudrait-il augmenter le reste à charge ? Il est en France au niveau le plus bas comparé aux autres pays de l’OCDE. Mais dans un moment où le pouvoir d’achat s’impose comme la thématique prioritaire, une telle mesure serait inenvisageable. Une alternative serait de réduire certaines dépenses sociales afin de réinjecter de nouveaux moyens à l’enveloppe du médicament. « C’est de l’économie politique », précise Olivier Bogillot. Comment alors augmenter l’enveloppe dédiée aux médicaments ? « Il faudrait davantage de croissance, et donc davantage d’innovations et donc davantage de recherche. On se mord la queue », résume Olivier Bogillot. Peut-on mieux dire ?

 

 


Source : lequotidiendumedecin.fr