« Nous disposons, depuis une quinzaine d'années, d'implants très performants à valeur réfractive ajoutée, dits premium, qui permettent de corriger à peu près toutes les amétropies dans le cadre de la chirurgie de la cataracte », rappelle le Dr Pascal Rozot (Clinique Juge, Marseille). Ils se sont pourtant encore peu diffusés aujourd'hui en France.
« Il est important de connaître plusieurs modèles d'implants et de personnaliser le choix en fonction de chaque personne, de son mode de vie et de ses attentes, résume le Dr Rozot. Il faut aussi bien accompagner les patients en période postopératoire, de façon à leur indiquer les mesures simples, comme le recours à un éclairage plus important pour voir de près et de leur expliquer la progressivité du processus de neuro-adaptation à ce nouveau mode de vision ». Dans sa pratique personnelle, le surcoût pour le patient de ces implants est rarement un frein à leur utilisation.
Toriques : question de temps
Les implants toriques, d'abord : destinés à corriger l'astigmatisme – présent chez environ 40 % des candidats à la phacoémulsification – ils devraient a priori être proposés à la très grande majorité des patients, exception faite de ceux à qui on maintient une myopie postopératoire à dessein et qui présentent un astigmatisme modéré ou inverse.
Mais, dans la réalité, ce n'est pas le cas. « Le principal frein à la diffusion de ces implants est le manque de temps », souligne le Dr Rozot. Temps pour analyser précisément l’astigmatisme, en utilisant généralement la topographie cornéenne, temps de calcul de la puissance torique de l'implant, en utilisant les calculateurs en ligne dédiés, qui intègrent désormais l’astigmatisme postérieur ou les systèmes automatisés d’acquisition d’image, assortis ou non aux biomètres (IOLMaster/Callisto, Verion) ou encore temps de vérification de la position de l’implant torique en post opératoire. La procédure d'alignement de l'implant pendant la chirurgie est cependant facilitée par les outils de réalité virtuelle assortis au microscope opératoire. « Une solution est la délégation de tâches aux orthoptistes, qui peuvent réaliser la topographie cornéenne et les acquisitions d’image et utiliser les calculateurs en ligne, au besoin avec un soutien logistique des représentants des laboratoires proposant les implants toriques, avec un contrôle de l'ophtalmologiste », estime le Dr Rozot.
Multifocaux : sélection et accompagnement
Classiques (diffractifs ou réfractifs) ou à profondeur de champ (EDOF pour enhanced depth of focus, dont il existe une quinzaine de modèles en France), les implants multifocaux permettent de restituer une vision de près, de loin et intermédiaire pour certains, voire de corriger concomitamment un astigmatisme cornéen même minime pour améliorer la qualité visuelle.
Comme les toriques, ces implants sont sous-utilisés, représentant à peine 5 % des poses en France. À cela plusieurs raisons, notamment la nécessité d'une sélection très précise des patients qui peuvent en bénéficier et la crainte d'une insatisfaction post-opératoire.
Ces implants doivent en effet être proposés à bon escient : en l'absence de contre-indication médicale (glaucome et dégénérescence maculaire liée à l'âge en particulier), professionnelle (métiers avec une exigence visuelle élevée, car il y a une baisse des contrastes) ou psychologique. « Il faut donc être très précis lors de l'évaluation préopératoire et notamment pour les mesures biométriques qui exigent l’emmétropie », rapporte le Dr Pascal Rozot.
Le deuxième frein à la diffusion de ces implants est la crainte d'une insatisfaction du patient. En effet, ils ne garantissent pas l'absence totale de correction optique ultérieure et ils exposent à la survenue d'éblouissements et de halos nocturnes, prix à payer pour la correction de près, mais qui disparaissent la plupart du temps dans les 6 à 12 mois. Il est indispensable de passer un minimum de temps à la consultation préopératoire pour donner une information loyale et objective concernant la fréquence de ces effets adverses, qui s’estompent pour la plupart après quelques semaines.
Actuellement, de hauts niveaux de satisfaction sont désormais obtenus avec ces lentilles intraoculaires, dont les performances optiques ont été grandement améliorées par les fabricants au point qu’ils sont utilisés, dans les centres entraînés, en chirurgie réfractive du cristallin clair. L’ophtalmologiste qui s’intéresse à la multifocalité dans le cadre de la cataracte a tout intérêt à démarrer avec des implants à profondeur de champ, certes moins puissants de près, mais mieux tolérés, et dont la gestion est donc facilitée.
Entretien avec le Dr Pascal Rozot, Clinique Juge, Marseille
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature