De nouvelles données chez le singe viennent relancer l'intérêt pour l'utilisation du favipiravir dans l'infection par le virus Ebola, tout juste 2 ans après la publication des données finales de l'essai JIKI. À la suite de cet essai mené lors de l'épidémie en Afrique de l'Ouest, les auteurs ne s'étaient en effet pas estimés « en mesure de conclure sur l'efficacité de ce traitement, tandis que les données sur la tolérance ne sont pas aussi solides qu'elles auraient pu l'être ».
L'étude publiée dans « PLOS Medicine » par un groupement d'équipes de l'INSERM basées à Paris, Lyon et Marseille, pourrait changer la donne pour cette molécule initialement indiquée dans le traitement de la grippe. Injecté 2 fois par jour en intraveineux à 26 macaques infectés, en commençant deux jours avant l'infection des animaux, le favipiravir était associé à des survies de 40 %, chez les animaux ayant reçu une dose de 150 mg/kg, et de 60 % chez ceux ayant reçu une dose de 180 mg/kg, contre 0 % chez les animaux ayant reçu une dose de 100 mg/kg ou n'ayant pas été traités.
Des doses 2 fois plus importantes
Les auteurs précisent qu'ils n'observaient une réduction de la virémie qu'à partir du moment où les concentrations plasmatiques de favipiravir étaient supérieures à 70 ou 80 μg/mL. De tels taux sont « 2 fois supérieurs à ceux observés chez les patients qui ont reçu le traitement en Guinée, explique au « Quotidien » Jérémie Guedj, il va falloir trouver combien de doses orales sont nécessaires pour atteindre de tels taux chez l'homme, et si la tolérance reste acceptable ».
Outre la concentration plasmatique plus faible, l'autre explication du relatif échec de l'essai JIKI résiderait dans le fait que les patients ont été traités à un stade trop tardif de la maladie. Pour Jérémie Guedj, « si l'on diffuse l'information qu'un antiviral peut sauver des vies à condition d'être administré tôt, cela peut pousser les communautés à dépister et à adresser leurs proches plus rapidement dans les centres de traitement, espère-t-il. En outre, il faut insister sur le fait que le favipiravir pourrait être employé de façon prophylactique », à des personnes ayant été en contact avec des patients.
Dans l'optique d'une utilisation prophylactique du favirpiravir, il sera important de « vérifier un éventuel risque d'interaction avec le vaccin vivant VSV, en cours de développement, qui pourrait être administré conjointement », prévient Jérémie Guedj.
Le favipiravir n'est pas le premier traitement à faire ses preuves chez l'animal dans cette indication. Quelques autres médicaments ont déjà montré ces dernières années une très bonne efficacité jusqu'à 3 jours après l'infection. « L'originalité du favipiravir, c'est qu'il s'agit d'une molécule en prise orale, déjà approuvée, simple à conserver dans ses deux formulations et qui a déjà été administrée chez des patients Ebola, précise Jérémie Guedj, alors que les autres candidats sont encore en développement et posent un certain nombre de problèmes logistiques (conditionnement, respect de la chaîne du froid). »
Des chercheurs américains posent les bases d'un diagnostic précoce
Les chercheurs de l'université de Boston ont décrit dans un article publié mercredi dans « Science Translational Medecine » un schéma commun à la réponse immunitaire contre le virus Ebola chez 12 singes qu'ils ont infectés dans le cadre d'un travail mené au sein de l'institut de recherche se les maladies infectieuses de l'armée américaine (USAMRIID). Cette réponse immunitaire très particulière survenant au cours de la phase prodromique de la maladie pourrait être utilisée pour diagnostiquer l'infection avant l'apparition des symptômes, entre 2 et 21 jours après l'infection.
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