Quel cadre juridique pour le contrat de travail ?

Embaucher son premier salarié : attention aux pièges !

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Publié le 25/01/2018
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GESTION

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

C’est décidé. Vos recettes ont augmenté et vous voulez maintenant fidéliser votre clientèle. Vous souhaitez donc vous passer du secrétariat téléphonique et engager une secrétaire. Mais comment faire ? L’embauche d’un salarié présente en effet de nombreux pièges qu’il est important d’éviter. Voici les principaux conseils que nous pouvons vous donner pour surmonter ce parcours d’obstacles !

CDI ou CDD ?

Première question à vous poser : devez-vous proposer à votre future secrétaire un « contrat à durée déterminée » (CDD) ou un « contrat à durée indéterminée » (CDI) ? Vous craignez en effet de vous engager sur une durée trop longue, sans savoir si vous pourrez supporter le poids des salaires et des charges sociales.

Malheureusement, votre marge de manœuvre est très limitée, car le CDD ne peut être utilisé que dans des cas très particuliers. Un médecin ne peut en effet conclure un CDD que pour deux motifs : pour remplacer un salarié absent (par exemple, en cas de maladie, de maternité ou de congé parental), ou en cas d’accroissement temporaire d’activité du cabinet.

Il n’est pas possible de conclure un CDD pour pourvoir un poste lié à l’activité normale et permanente du cabinet. Résultat : pour embaucher votre première secrétaire, vous devez lui proposer un CDI.

Mais que risquez-vous si vous lui faites malgré tout un CDD ? Dans ce cas, votre secrétaire pourra demander aux prud’hommes de requalifier son contrat en CDI et donc de considérer qu’à la fin du « CDD », il y a licenciement sans cause réelle et sérieuse… Ce qui vous coûtera très cher.

Il faut remarquer, en outre, que le CDD est plus onéreux que le CDI puisque vous devez verser à votre salarié une « prime de précarité » égale à 10 % du salaire brut perçu pendant toute la durée du contrat (sauf si vous embauchez le salarié en CDI à l’issue du CDD).

Le temps partiel

Question suivante : quelle durée de travail allez-vous proposer à votre secrétaire ? Dans votre cas, le contrat de travail ne sera pas vraisemblablement « à temps complet », c'est-à-dire d’une durée hebdomadaire de 35 heures, mais un contrat « à temps partiel », d’une durée hebdomadaire inférieure à 35 heures. Toutefois, vous ne pouvez pas appliquer n’importe quel horaire. Les contrats à temps partiel doivent avoir une durée minimale, variable selon les différentes branches d’activité.

Selon l’avenant du 1er juillet 2014 à la convention collective des personnels des cabinets médicaux, la durée minimale de travail des salariés à temps partiel est de 16 heures par semaine. Pour le personnel de nettoyage et d’entretien, la durée minimale est de 5 heures par semaine. Par conséquent, vous ne pouvez pas conclure de contrats de travail avec un horaire hebdomadaire inférieur à 16 heures par semaine (ou à cinq heures par semaine pour le personnel d’entretien).

Toutefois, le contrat pourra prévoir une durée de travail inférieur à 16 heures (ou à cinq heures pour le personnel d’entretien), mais uniquement à la demande du salarié, et dans deux cas : pour lui permettre de faire face à des contraintes personnelles, ou pour qu’il puisse cumuler plusieurs activités, afin d’atteindre une durée globale d’activité correspondant à un temps plein.

Le salarié doit alors vous adresser une demande motivée, par recommandé avec avis de réception ou par remise en main propre. Vous aurez 30 jours calendaires pour lui répondre. Il est prudent d’avoir ce courrier à la signature du contrat de travail.

La période d’essai

Bien qu’elle ne soit pas obligatoire, vous avez bien entendu intérêt à insérer dans le contrat de travail une « période d’essai » qui va vous permettre de vérifier que votre salarié correspond bien au profil souhaité. D’autant qu’un CDI n’est pas simple à rompre…

La convention collective prévoit une période d’essai de deux mois, qui peut être renouvelée une fois, à votre demande ou, ce qui est plus rare, à celle du salarié. Mais vous pouvez prévoir une durée plus courte. La possibilité de renouveler la période d’essai doit figurer dans le contrat de travail.

Attention, si vous mettez fin au contrat de travail, en cours ou au terme de la période d’essai, vous devez prévenir le salarié dans un délai qui ne peut être inférieur à :

- 24 heures en deçà de 8 jours de présence,

- 48 heures entre 8 jours et un mois de présence,

- 2 semaines après un mois de présence,

- et un mois après 3 mois de présence.

Vous n’avez pas à motiver votre décision. Par contre, il faut que vous teniez compte de ce délai de prévenance lorsque vous souhaitez mettre fin à la période d’essai. Notamment, si vous laissez la période d’essai se prolonger un peu plus d’un mois, vous aurez deux solutions : conserver le salarié qui ne vous convient pas quinze jours de plus ou bien vous en séparer et le payer malgré tout deux semaines de plus…

Lorsque c’est le salarié qui met fin à la période d’essai, il doit simplement respecter un délai de prévenance de 24 heures s’il a fait moins de 8 jours de présence et 48 heures dans le cas contraire.

La période d’essai se décompte de manière calendaire. Par exemple, une période d’essai de deux mois qui débute un 15 mars doit prendre fin le 14 mai suivant à minuit, même si ce dernier jour tombe un dimanche ou un jour férié.

Embaucher un étranger

Ce n’est pas toujours une bonne idée. S’il s’agit d’un ressortissant de l’Union européenne, pas de problème, il suffit de lui demander une copie de sa carte d’identité ou de son passeport. Seule exception, les Bulgares et les Roumains doivent obtenir une autorisation de travail ou être titulaire d’un master 2.

Pour un étranger résidant en France, là encore l’embauche est possible s’il vous présente un titre de séjour en cours de validité l’autorisant à travailler en France. Vous devrez malgré tout adresser une déclaration d’embauche à la préfecture pour faire vérifier la validité de ce titre de séjour.

Dans tous les autres cas, la procédure est longue et aléatoire. Attention, si vous employez un étranger sans autorisation de travail, vous risquez une sanction allant jusqu’à 15 000 € d’amende et cinq ans d’emprisonnement !

Le contrat de travail

Il vous faut maintenant rédiger le contrat de travail qui peut être très simple. Il est inutile en effet de recopier le code du travail, il suffit en préambule d’y faire référence, ainsi qu’à la convention collective des personnels des cabinets médicaux.

Néanmoins, dans les renseignements qui doivent figurer, citons :

- les coordonnées du salarié et son numéro de sécurité sociale,

- les coordonnées du cabinet,

- la nature du contrat (CDI ou CDD),

- la date de début de contrat (et la date de fin de contrat pour les CDD),

- toujours pour les CDD, le motif ainsi que le nom du salarié remplacé,

- les horaires de travail,

- l’intitulé du poste, le coefficient et les tâches à accomplir,

- le salaire brut convenu,

- les avantages éventuels (titres restaurant, transport, etc.),

- la période d’essai et son renouvellement,

- les clauses de confidentialité, etc.

Le contrat doit être établi en deux exemplaires, un pour le salarié et l’autre pour vous.

La déclaration préalable à l’embauche

Vous voilà parvenu à la dernière étape du parcours d’embauche ! Et cette étape est très importante. Il s’agit de la DPAE : « déclaration préalable à l’embauche », une déclaration obligatoire qui a de multiples effets. La DPAE a remplacé la DUE (déclaration unique d’embauche).

Comme son nom l’indique, vous devez la faire préalablement à la prise de poste de votre salarié. Le plus simple est de passer par net-entreprises (http : www.net-entreprises.fr/vos-declarations-en-ligne/dpae/).

La DPAE permet de faire en une seule fois les formalités obligatoires auprès de l’URSSAF :

- votre immatriculation en qualité d’employeur au régime général de sécurité sociale et d’assurance chômage, en cas d’embauche d’un premier salarié,

- éventuellement, la demande d’immatriculation du salarié à la CPAM,

- votre adhésion à un service de santé au travail,

- la demande d’examen médical d’embauche du salarié, pour la visite médicale obligatoire,

- le pré établissement de la DADS (déclaration annuelle des données sociales).

Si vous ne remplissez pas la DPAE, vous risquez d’être accusé de « travail dissimulé », ce qui est puni d’une amende de 1 071 euros par salarié…

Jacques GASTON – CARRERE jgastoncarrere@orange.fr

Source : Le Quotidien du médecin: 9634