En Afghanistan, les fermetures des centres de soin, armes de guerre des talibans

Publié le 26/09/2017

Depuis le mois de janvier, près de 200 cliniques et dispensaires ont dû fermer leurs portes, au moins temporairement en Afghanistan. Selon le ministère de la Santé, les insurgés talibans en font un "moyen de pression" afin d'obtenir davantage de cliniques dans les zones qu'ils contrôlent pour y faire soigner leurs combattants. Récemment, de nombreux établissements ont baissé leur rideau sous pression des talibans dans la province méridionale de l'Uruzgan, une des plus pauvres du pays. Dans le district de Charchino, les talibans ont fait fermer des dispensaires. Selon l'OMS, le nombre de centres de soins fermés en 2017 dépasse déjà les 189 enregistrés l'an dernier.

Les centres de soins et leur personnel ont été visés par toutes les parties au conflit, y compris les forces de l'Otan, qu'il s'agisse de priver l'ennemi de soins, de tuer les patients du camp adverse, ou d'établir ses positions et de s'y réfugier. A Kunduz, dans le nord, les forces américaines avaient bombardé par erreur l'hôpital régional opéré par MSF en octobre 2015, faisant 42 morts parmi les patients et le personnel. En mars dernier, une attaque coordonnée contre le grand hôpital militaire de Kaboul, revendiquée par le groupe Etat islamique (EI), a fait des dizaines de morts dans les chambres et jusque dans les salles d'opération.

"Avant 2015, la plupart des attaques se produisaient dans les zones traditionnelles de conflit comme Kandahar ou le Nangahar (est). Mais depuis deux ans, les atteintes aux centres médicaux et à leurs personnels touchent tout le pays", indique David Lai, coordinateur de l'OMS en Afghanistan. Le problème est même plus vaste que ce que suggèrent les statistiques, car la plupart des sites visés ne rapportent même pas les attaques, estime l'organisation indépendante basée à New York "Watchlist on Children and Armed Conflict" dans un récent rapport.

Les personnels de santé sont fréquemment menacés, enlevés ou tués. Au début du mois, une kiné espagnole travaillant pour le Comité international de la Croix rouge (CICR) a été abattue par un patient dans un centre de réhabilitation de Mazar-i-Sharif (nord). Six membres de cette organisation avaient déjà été tués en février dans une embuscade, alors qu'ils circulaient en convoi dans la province septentrionale de Jowzjan: la pire attaque contre des personnels humanitaires, attribuée par la police à l'EI. "Chaque année est pire que la précédente", affirme Thomas Glass, porte-parole du CICR à Kaboul, dont les activités ont été considérablement réduites en Afghanistan après ces drames.

L'OMS essaie de pallier les manques avec des cliniques mobiles, mais David Lai reconnait qu'elles sont loin de répondre aux besoins. Selon lui, deux millions de civils en ont pâti cette année. 


Source : lequotidiendumedecin.fr