DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA MALADIE DE PARKINSON, maladie neurodégénérative progressivement invalidante, se traduit par des symptômes moteurs (bradykinésie, rigidité, et tremblement de repos) associés a des symptômes autonomes, émotionnels et cognitifs.
Apres une période initiale de "lune de miel" durant laquelle les symptômes moteurs sont améliorés par le traitement L-DOPA, les patients développent des complications motrices induites par ce traitement, avec des fluctuations d’effet (périodes d’immobilité) et des dyskinésies (mouvements anormaux) qui compromettent la qualité de vie.
La neurostimulation du noyau sous-thalamique est recommandée au stade avancé pour traiter les fluctuations et dyskinésies rebelles au traitement médical. Généralement réalisée 11 à 13 ans après le début de la maladie, elle améliore les symptômes moteurs et la qualité de vie, cependant bon nombre de patients sont à ce stade handicapés par d’autres symptômes notamment cognitifs.
Une seconde "lune de miel" ?
Schuepbach et coll. ont donc évalué si la neurostimulation plus précoce pourrait être bénéfique.
L’étude (EARLYSTIM), menée dans 17 centres universitaires allemands et français, porte sur 251 patients atteints de la maladie de Parkinson et ayant des complications motrices depuis moins de 3 ans (1,5 an en moyenne). Ils ne présentent pas de démence, de dépression majeure avec idées suicidaires, ni de psychose.
Ces patients diffèrent de la population des précédentes études de neurostimulation: avec une durée de maladie de 7,5 ans (au lieu de 11 a 13 ans) et un âge de 52 ans en moyenne (contre 59 a 62 ans).
Ils ont été randomisés afin de recevoir la neurostimulation (Medtronic) en plus du traitement médical, ou le traitement médical seul.
Pour le principal critère de la qualité de vie, mesurée initialement et après 2 ans au moyen d’un questionnaire spécifique de la maladie de Parkinson (PDG-39, score de 0 a 100), on observe une amélioration de 25% (ou 8 points) dans le groupe de neurostimulation/traitement médical, tandis que la qualité de vie ne s’améliore pas a 2 ans dans le groupe traité médicalement.
De plus, la neurostimulation avec traitement médical est supérieure pour améliorer: 1) les symptômes moteurs en condition "off" (score UPDRS-III de 0 a 108, amélioré de 53%; différence de 16 points entre les 2 groupes); 2) les activités de la vie quotidienne (score UPDRS-II amélioré de 30%); 3) les complications motrices induites par la levodopa (score UPDRS-IV amélioré de 61% différence de 4 points entre les groupes); 4) et le temps quotidien de mobilité sans dyskinésie (amélioration de 20% selon le journal du patient; différence de 2 heures entre les groupes).
Depuis moins de 3 ans.
Ainsi, ces patients jeunes sous neurostimulation ont une meilleure qualité de vie, un meilleur fonctionnement social et une meilleure mobilité (évaluée "en aveugle" sur vidéos).
Des effets secondaires sévères sont recensés chez 55% des patients du groupe neurostimulation et 44% des patients du groupe traité médicalement. Trois cas de suicides sont survenus, deux dans le groupe neurostimulation et 1 dans le groupe traité médicalement. Sur 26 incidents sévères liés à l’implantation chirurgicale ou au dispositif de neurostimulation, tous ont été complètement résolus (sauf un cas de légère cicatrice cutanée).
"Sur la base de ces résultats, la neurostimulation peut être offerte aux patients qui ont une maladie de Parkinson dopa-sensible avec des complications motrices depuis moins de 3 ans, s’ils sont traités par des experts", déclare au Quotidien le Pr Günther Deuschl (Université de Kiel, Allemagne). "Un suivi a long-terme de cette cohorte d’impose".
Des critères stricts d’inclusion.
"La preuve de concept d’une opération précoce chez les patients avec maladie de Parkinson est définitivement acceptée, mais il est important de garder à l’esprit que le succès de la neurochirurgie repose sur des critères stricts d’inclusion des patients et sur la qualité d’une équipe clinique pluridisciplinaire expérimentée", souligne dans un communiqué le Pr Yves Agid (CHU Pitié-Salpétrière, Paris), principal investigateur français de l’étude. Il note le soutien des sponsors allemand et français (BMBF, PHRCN) et de Medtronic.
Dans un éditorial, le Dr Caroline Tanner (Université de Stanford, Etats-Unis) offre un avis similaire en concluant que "la neurostimulation du noyau sous-thalamique, pour des patients fonctionnels soigneusement choisis, pourrait apporter de nombreuses années supplémentaires de bon fonctionnement".
NEJM 14 février 2013, Schuepbach et coll.
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