Le cancer colo-rectal bénéficie des progrès médicaux, pas du dépistage généralisé...

Publié le 03/01/2001
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E N février 2000, le gouvernement a tranché en faveur d'un « dépistage organisé du cancer colo-rectal garantissant un accès de tous (...) sur l'ensemble du territoire en faisant bénéficier chacun de la même garantie de qualité ». En mars 2000, le Pr Jean-François Bretagne publiait un appel à l'aide des médecins généralistes au nom de la Société française de gastro-entérologie sous le titre : « Cancer colo-rectal : ensemble sauvons 3 000 vies par an ». Chaque année, plus de 33 500 nouveaux cas surviennent dans notre pays et près de 15 000 décès sont constatés bien que les chances de guérison à cinq ans approchent 80 %, si le processus malin est détecté à un stade précoce. Bien que l'on connaisse aujourd'hui parfaitement la population à risque (la polypose adénomateuse familiale), 75 % des cancers colo-rectaux surviennent chez des personnes âgées de plus de 50 ans (soit 12 millions de personnes), considérées en bonne santé, ou pour le moins, sans facteur de risque.

Il est donc urgent d'organiser un dépistage généralisé.
« La Direction générale de la santé est convaincue de l'utilité du dépistage, explique le Pr Bretagne, au point que nous ayons ensemble prévu pour l'an 2001 une semaine de formation au dépistage pour les départementsprêts à s'engager. Une convention a été signée mais, dans la mesure où le cahier des charges n'est toujours pas validé, l'appel d'offres n'est pas lancé. » Le conseil scientifique de la CNAM a également émis un avis favorable à la mise en place d'un dépistage généralisé et encadré. Malgré ces deux avis favorables et à cause du blocage de la Direction générale de la Sécurité sociale qui ne reconnaît pas officiellement l'acte de prévention des médecins généralistes, la situation est au point mort.

Le régime riche en fibres sans effet sur les polypes

En mars 2000, deux études publiées dans le « New England Journal of Medicine » ôtaient quelques espoirs sur l'intérêt d'un régime riche en fibres dans la prévention des récidives de polypes coliques. Des données expérimentales et épidémiologiques suggéraient que les graisses alimentaires augmentaient le risque de cancer colo-rectal, tandis que les fruits et les légumes diminuaient ce risque. Deux études ont été menées parallèlement pour examiner si une intervention alimentaire chez les patients ayant subi une ablation de polype pouvait prévenir la récidive. Dans l'une et l'autre de ces études, l'alimentation a été modifiée afin d'abaisser la teneur en graisses alimentaires et d'augmenter la part en fruits et en légumes, ou de supplémenter en fibres.
Dans l'étude Polyp Prevention, le taux d'adénomes récurrents n'a pas été modifié par l'intervention alimentaire. La Wheat Bran Fiber, le taux de récurrences des adénomes à trois ans, est le même que le régime soit pauvre ou riche en fibres.
Si les interventions sur l'alimentation se soldent par un échec, les anti-COX-2 apporteraient un bénéfice sur la régression des polypes au cours de la polypose rectocolique familiale. Une étude randomisée (« NEJM », juin 2000) menée avec le celecoxib chez 77 patients atteints de polypose rectocolique familiale montre une diminution significative de la taille et du nombre de polypes chez ceux recevant la plus forte dose, soit 400 mg/j.

Une métaanalyse des cancers opérés chez les sujets âgés

La mortalité et la morbidité du cancer colo-rectal opéré sont influencées par l'âge.
Une revue de 28 études indépendantes publiées en septembre 2000 dans « The Lancet » montre néanmoins que l'effet de l'âge est également influencé par plusieurs facteurs.
Le cancer colo-rectal constitue une cause majeure de mortalité et représente le premier cancer chez les personnes âgées : 70 % surviennent après 65 ans.
Chaque fois que cela est possible, le cancer est traité par résection soit curative, soit palliative.
L'analyse menée en Grande-Bretagne par le Colorectal Cancer Collaborative Group montre que, comparativement aux sujets âgés de moins de 65 ans, la mortalité postopératoire est 1,8 fois plus élevée chez les 65-74 ans, 3,2 fois plus élevée chez les 75-84 ans, 6,2 fois plus élevée chez les 85 ans et plus.
Les complications respiratoires étaient également augmentées par rapport aux sujets âgés de moins de 65 ans : la fréquence était multipliée par 2 chez les 65-74 ans, par plus de 2 chez les 75-84 ans et par plus de 3 chez les 85 ans et plus.
Enfin, le taux de survie globale à deux ans était de 0,91 pour les 65-74 ans, de 0,77 pour les 75-84 ans et de 0,65 pour les 85 ans et plus.

Les facteurs prédictifs de l'efficacité de la chimiothérapie

Le sexe féminin, la situation droite de la lésion tumorale et le phénotype MSI seraient des facteurs prédictifs de l'efficacité de la chimiothérapie. Ces résultats obtenus par une équipe australienne ont été publiés dans « The Lancet » en mai 2000. Leur travail révèle que le pronostic des tumeurs - en l'occurrence, un carcinome colo-rectal, grade C de la classification de Dukes traité par fluoro-uracile et levamisole - est meilleur chez les femmes, lorsque la tumeur est localisée à droite et que le phénotype est MSI.
Par ailleurs, une étude multicentrique internationale (« NEJM », septembre 2000) faisait état pour la première fois de la supériorité d'un protocole associant l'irinotécan/ 5 fluoro-uracile/levamisole contre l'association 5 fluoro-uracile/levamisole utilisée comme traitement standard depuis les années quatre-vingt-dix, ou l'irinotécan (ou CPT-11, Campto) utilisé seul, dans le traitement de première intention du cancer colo-rectal métastasé. .
Ce dernier est un nouvel agent qui inhibe la topo-isomérase I, une enzyme cruciale dans la réplication de l'ADN. Son association au traitement standard 5 FU/LV, offre une meilleure probabilité de réponse tumorale objective (39 % contre 21 %), un répit plus long avant la progression de la tumeur (sept mois contre quatre mois) et une survie moyenne également plus longue (quinze mois contre treize mois).

Un gène impliqué dans l'agressivité du cancer et des polypes coliques

Une équipe américaine coordonnée par Anthony P. Heaney a mis en évidence dans les carcinomes coliques accompagnés d'envahissement ganglionnaire la présence quasi constante du gène transformant de tumeur hypophysaire (PTTG1). Ce gène, rencontré également dans certains polypes coliques, serait le marqueur potentiel particulièrement agressif de la tumeur ou du risque marqué de dégénérescence du polype.

Sept engagements pour dépister le cancer colo-rectal

La SNFGE a établi un programme de dépistage national du cancer colorectal qui tient en sept points :
1. une formation prioritaire des médecins impliqués dans le dépistage ;
2. l'information de la population concernée ;
3. la remise du test par les médecins généralistes et les médecins du travail ;
4. la centralisation de la lecture du test par des centres agréés ;
5. un programme d'assurance qualité pour la lecture, la distribution et le suivi du test ;
6. l'identification de la population ciblée à partir des fichiers des caisses de la Sécurité sociale ;
7. une procédure d'évaluation du risque de dépistage.

TEYSSEDOU-MAIRE Anne

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6828