Le Comité d'éthique propose des garde-fous pour sécuriser l'échange des données de santé

Par
Publié le 29/05/2019
Données

Données
Crédit photo : Jonny Lindner / Pixabay

En janvier 2017, Marisol Touraine avait saisi le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) afin qu’il rende un avis sur les « données massives » ou Big Data. À quelques jours de la discussion au Sénat de la loi Santé, où il doit notamment être question du Health Data Hub, une plateforme d’exploitation des données de santé, le CCNE a rendu ce matin son avis intitulé « Données massives et santé : une nouvelle approche des enjeux éthiques ».

L’impact de plus en plus grand et la croissance des données massives en santé dans la recherche, l’organisation des soins, la prise en charge des patients soulèvent de nombreux débats éthiques : comment garantir le secret médical, quel consentement pour l’utilisation de ses données, comment protéger les personnes dont l’état de santé peut devenir identifiable ?… Autant de questions sur lesquelles se sont penchés les membres du CCNE. « Il y a une volonté de ne pas se priver des bénéfices que peuvent apporter ces innovations technologiques mais en même temps nous nous demandons comment favoriser cela sans sacrifier aux principes éthiques », explique Pierre Delmas-Goyon, co-rapporteur de cet avis, le 130e rendu par le CCNE.

Éclairer la décision des personnes

Le Comité d'éthique a livré 12 recommandations pour tenter d’éclairer notamment le législateur. Pour protéger au maximum la personne face à l’exploitation de ses données personnelles, le CCNE estime tout d’abord qu’il faut au maximum accompagner le citoyen afin de rendre l’information « compréhensible, adaptée et loyale », sur le recueil des données, leur conservation, leur utilisation… Malgré tout, l’ensemble n’est pas forcément intelligible pour les personnes qui ne sont pas en mesure de comprendre les algorithmes. Il faut donc qu’il existe une relation de confiance entre le titulaire des données et ceux qui les utilisent. Pour assurer cette confiance, le CCNE recommande un contrôle répété des engagements pris par les acteurs et une évaluation périodique des dispositifs juridiques mis en place, mais aussi des sites et applications qui traitent les données de santé.

Pour le Comité d’éthique, le sujet des données massives en santé pose question aussi sur la notion de consentement. « Dans un contexte très évolutif et quand le cheminement des données n’est pas forcément compréhensible, que signifie le consentement a priori ? », interroge Laure Coulombel co-rapporteur de l’avis, qui évoque la piste du « consentement dynamique » qui est déjà mis en place pour certains projets où les individus sont régulièrement sollicités pour redonner leur consentement en fonction des évolutions.

Face à ces évolutions numériques, le CCNE souligne également la nécessité de formation et d’éducation de tous les acteurs, y compris les professionnels de santé aux nouvelles technologies et aux principes éthiques qui leur sont liés. « Il faut également sensibiliser les gens à une utilisation raisonnable des données », ajoute Pierre Delmas-Goyon.

Donner la main à l'humain

Le comité éthique insiste également sur la nécessité de garder la main à toutes les étapes, dans la sélection des données mais aussi dans l’analyse des résultats. Une manière d’éviter notamment les dérives de profilage ou stigmatisation. Par ailleurs la donnée « ne saurait remplacer le dialogue » mais elle a pour but « de libérer du temps pour l’écoute et l’échange en simplifiant le recueil des informations pertinentes », écrit le CCNE. Les pouvoirs publics doivent aussi être vigilants à ce que les citoyens qui n’ont pas accès aux technologies du numérique, pour des raisons financières par exemple, ne soient pas exclus des innovations qu’elles peuvent amener dans la santé.

Les questions éthiques liées aux données de santé sont amenées à être prépondérantes dans les années à venir, la mise en place d’un comité national d’éthique spécifique au numérique, comme demandé par le rapport Villani, est donc en discussion. D’après le président du CCNE, le Pr Jean-François Delfraissy, un comité pilote pourrait être mis en place avant la fin de l’année et le comité national d’éthique du numérique d’ici « 18 à 24 mois ».


Source : lequotidiendumedecin.fr