Si le nombre de greffes réalisées en France est en augmentation depuis quelques années, et a atteint 5 273 en 2021, il ne permet pas de répondre aux besoins ; on compte actuellement quelque 18 000 personnes en attente de greffe. Après l’opposition au don — qui constitue le premier motif d’exclusion d’un patient en vue d’un prélèvement — les antécédents de cancer représentent le deuxième motif de refus, motivé par la crainte de transmission de cellules cancéreuses. Une attitude dont le caractère systématique a été remis en question dans le cadre de l’élargissement des critères d’inclusion des donneurs, qui concerne particulièrement le cancer du sein, le plus fréquent chez la femme, avec 60 000 nouveaux cas diagnostiqués chaque année.
Les cancers du sein regroupent toutefois des tumeurs très variées. L’Organisation mondiale de la santé en décrit 34 sous-types histologiques, certains ayant un risque de métastases quasi nul, d’autres, à l’inverse, un pronostic très défavorable à court terme, ou encore un risque ré-évolutif à long terme.
Une revue systématique de la littérature
Une revue systématique et une métaanalyse de la littérature sur les cas de cancers épithéliaux transmis de donneurs à receveurs a souligné le risque significativement plus élevé de transmission en cas d’antécédent de cancer du sein, par rapport aux autres types de cancers épithéliaux (1). Elle a aussi confirmé la possibilité, dans certaines situations, de réaliser un prélèvement d’organe chez une personne antérieurement traitée pour un cancer du sein. Sous réserve bien sûr d’un bilan pré-don adapté, du respect des référentiels et de la sollicitation d’un avis d’expert dans les situations complexes.
Certaines instances internationales ont émis des recommandations quant aux possibilités de prélèvements d’organes chez des femmes ayant eu un cancer du sein, fondées sur de nombreux critères, tels que le type histologique de la tumeur, ses caractéristiques moléculaires ou le délai écoulé depuis le traitement.
En France, le CNGOF a été sollicité par l’Agence de la biomédecine pour affiner les critères de sélection des donneuses et définir celles ayant une contre-indication absolue au prélèvement d’organes et de tissus, celles n’ayant pas de contre-indication et les situations nécessitant un avis d’experts. Un annuaire d’experts a ainsi été constitué, sous l’égide de la Commission sénologie du collège. « In fine, cette approche devrait permettre d’accroître le nombre de donneuses potentielles, tout en limitant au maximum le risque de transmission de cellules cancéreuses, en sachant que le risque zéro n’existe pas et que l’évaluation du rapport bénéfice/risque de la transplantation reste un élément essentiel de la décision », souligne la Pr Carole Mathelin, CHRU de Strasbourg.
En parallèle, le système de traçabilité Cristal donneurs/receveurs, mis en place par l’Agence de la biomédecine, permettra, en cas de développement chez un receveur d’un cancer imputable à la transplantation, de prévenir les équipes prenant en charge les patients ayant reçu d’autres organes du même donneur.
Exergue : « Le risque zéro n’existe pas »
Entretien avec la Pr Carole Mathelin, CHRU de Strasbourg (1) Lapointe M et al. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2023 Jan;51(1):60-7
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