Environ 71 000 patients sont pris en charge pour une insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) par le régime général (84 000 au total), dont 39 000 dialysés et 32 000 greffés, a rappelé Francis Fagnani du bureau d'étude spécialisé dans la santé, Cemka-Eval. Ce qui correspond à des dépenses annuelles de 3,8 milliards d’euros (3,1 pour la dialyse et 0,7 pour la greffe et le suivi) ; autrement dit un coût élevé d’environ 45 000 euros par an et par patient, les transports représentant 18 % des dépenses.
Ces chiffres expliquent à eux seuls l’importance de cette pathologie pour les autorités de santé, d’autant que la croissance des dépenses est du même ordre que pour les cancers (+ 4,4 % an).
Multiples recommandations
Si bien que les recommandations se sont multipliées (HAS, Assurance-maladie, Cour des comptes) allant toutes dans le sens d’une pression sur les tarifs et les coûts, tout en veillant à l’amélioration de la qualité : développement de la greffe et de la dialyse à domicile ; amélioration de la prise en charge de la prédialyse, pression sur les tarifs, certification des structures, « parcours de soins IRC ». Cela veut dire que si ce marché est en croissance, on doit envisager des restrictions budgétaires fortes avec, de facto, une forte pression sur la qualité et la recherche. Des contraintes qui s’imposeront à des structures très hétérogènes par leurs tailles et par leurs statuts (privé, privé sans but lucratif, public). Pourtant, conclut Francis Fagnani, on voit mal comment la nécessité d’abaisser les coûts de revient (économie d’échelle, optimisation des achats…) n’imposera pas des stratégies d’alliance ou de croissance.
L’apport des nouvelles technologies
Le Pr Bernard Canaud (Montpellier, CMO du Centre Medical Excellence Bad Hamburg, Allemagne) passe lui aussi en revue les défis épidémiologiques, démographiques, économiques et sociétaux, mais il insiste surtout sur les nouvelles approches de l’IRCT permises par le développement des nouvelles technologies. Première mutation, l’émergence du besoin et de la possibilité d’une prévention et d’une prise en charge personnalisées, tenant compte de la génétique mais aussi de l’environnement et du mode de vie de chaque patient. D’où la PMI (Precision Medicine Initiative) lancée par le Président Obama en 2015.
Certes, reconnaît le Pr Canaud, la PMI n’est pas entrée dans la vie quotidienne des soignants mais ce n’est pas non plus de la science-fiction et nul doute qu’elle aura un impact dans les stratégies de prise en charge des insuffisants rénaux. D’une façon générale, on estime que la valeur des soins délivrés passe par une restructuration totale du système de soins en prenant en compte le bénéfice médical mais aussi la qualité des soins et de vie, le rapport coût efficacité. À ce titre, la révolution digitale aura des conséquences encore mal appréhendées : rôle accru du patient dans les prises de décisions et la surveillance, accès des pays pauvres et des contrées isolées aux technologies modernes, partage des données dans le cadre des réseaux de soins multidisciplinaires ou du big data. Avec à la clé des soins de plus en plus efficients et des patients de plus en plus autonomes et responsabilisés. La néphrologie, comme beaucoup d’autres spécialistes, doit se préparer à cette révolution.
Passés différents, futur partagé
Face à ces défis, Echo et NephroCare disposent de passés et d’atouts différents. Ainsi, comme l’a rappelé Vincent Landi, directeur de l’Echo, cette structure associative, « partenaire génétique de l’hôpital public », offre aux Pays de Loire, un maillage serré du territoire, une offre de soins globale et coordonnée, une place de choix réservée aux patients, une activité scientifique basée sur la recherche clinique et facilitée par la relation privilégiée avec les CHU et ARS. Avec à la clé un bilan impressionnant : 53 % des patients porteurs d’un greffon, plus de 1 500 patients pris en charge en dialyse (230 000 séances), plus de 7 000 consultations par an. NephroCare France est un groupe privé qui regroupe 37 unités réparties à travers la France (11 centres, 17 UDM, 27 UAD assistées, 4 unités de dialyse péritonéale) et assurant la prise en charge de plus de 2 400 dialysés. Comme le souligne Jean-Marc Cabanel, l’une des principales forces de NephroCare est d’être un opérateur de soins intégrés à un groupe vertical, Fresenius spécialisé dans la mise à disposition des produits de dialyse. Cela donne des possibilités en termes de partages de données, d’évaluation des matériels et des process, de benchmark et de synergie entre les centres et régions, de partage d’expériences et de FMC et, enfin, de recherche à travers des essais multicentriques.
Ces différences ne doivent pas cacher des valeurs partagées, des contraintes et des objectifs convergents qu’il s’agisse de la pérennité économique, du maintien de la croissance, de la démarche éthique, du développement de l’activité scientifique, de l’obligation d’une amélioration continue de la qualité et de la gestion des risques. En un mot, du développement durable dans un univers de plus en plus contraint sans compter l’intégration des nouvelles technologies et la transformation progressive de l’organisation des soins. Cela impose à tous des échanges francs et constructifs entre tous les acteurs, à tous les niveaux, ce qui fut le cas lors de la réunion organisée à Nantes.
(1) Réunion organisée par l’Echo de Nantes et NephroCare à Nantes
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