« DANS CERTAINES RÉGIONS, les établissements de soins sont saturés et toutes les femmes ne peuvent accéder à une demande d’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans les délais prévus par la loi » souligne d’emblée le Dr Thierry Charasson. « Réaliser une IVG médicamenteuse en consultation ou à domicile est une alternative que les patientes choisissent de plus en plus. » Cette pratique n’est pas nouvelle. Elle est autorisée depuis 2004 mais seule une IVG médicamenteuse sur 5 est réalisée hors établissement, « probablement par méconnaissance de la procédure à suivre en ville » poursuit ce spécialiste.
Ses modalités sont bien codifiées. L’ IVG médicamenteuse hors établissement n’est possible que jusqu’à 7 semaines d’aménorrhée (SA). La demande doit être faite au plus tard à 6 SA (pas de délai raccourci). Le médecin formé à cette procédure, gynécologue libéral ou médecin généraliste (lire encadré), s’engage à recevoir la patiente dans les 5 jours. Les médecins des centres de santé et des centres de planification et d’éducation familiale répondant aux critères de compétence peuvent également les réaliser.
La consultation où la patiente formule sa demande d’IVG est le départ du délai légal de réflexion qui est de 7 jours. À ce stade, il faut évaluer le terme de la grossesse, s’enquérir du groupage sanguin ABO-D, dépister une infection génitale, rechercher le facteur d’échec de la contraception.
La patiente est informée sur les différentes techniques d’interruption de grossesse, messages relayés par un dossier guide remis à la fin de la visite. L’entretien psycho-social est obligatoire pour les mineures. Le praticien vérifie l’absence de critères d’exclusion à l’IVG médicamenteuse (difficulté de compréhension de la méthode, asthme sévère non équilibré, trouble de la coagulation ou prise d’anticoagulants, dispositif intra-utérin en place, anémie importante, insuffisance rénale chronique, porphyrie, insuffisance hépatique, insuffisance rénale, malnutrition).
Contenu du forfait du médecin libéral.
La séquence des consultations suivantes est bien établie. Elles sont comprises dans un forfait codifié par la CPAM à 197,74 euros qui comprend l’achat des médicaments par le médecin. Ce dernier doit passer commande auprès d’une officine en indiquant l’établissement avec lequel il est conventionné et la date de cette convention.
Le forfait médical commence après la période de réflexion de la patiente.
Consultation n° 1 (C 1) : La patiente a choisi l’option médicamenteuse et le terme est compatible. Le praticien recueille le consentement écrit et lui remet une fiche d’information (protocole, coordonnées, centre de référence, effets secondaires).
Consultation n° 2(C 2) : (pas de durée définie entre C 1 et C 2). La patiente ingère en présence du médecin, Mifegyne (mifépristone ou RU 486) qui prépare le col. Il n’interrompt pas la grossesse.
En règle générale, aucun effet n’est ressenti par la patiente. Elle repart néanmoins avec une fiche de liaison, en cas de nécessité, pour le centre de soins référent.
Consultation n° 3 (C 3) : Elle est prévue 36 à 48 heures après la prise de mifépristone pour la prise du 2e médicament, une prostaglandine (misoprostol) qui permet l’expulsion. « Cette troisième consultation n’est plus indispensable car on s’est aperçu avec le recul qu’il était plus confortable pour la patiente de prendre le misoprostol chez elle. Dans 60 % des cas, l’avortement (l’expulsion de l’œuf) se produit dans les 4 heures suivant la prise de ce médicament » explique le Dr Thierry Charasson. « Une surveillance au cabinet médical après la prise du médicament risque de la faire expulser lors de son retour. » Le médicament est donc remis à C 2 et est ingéré 36 à 48 heures plus tard. Ce jour-là, la patiente ne doit pas être seule chez elle et demeurer à moins d’une heure du centre de soins référent et pouvoir joindre le médecin qui la prend en charge. Les contractions utérines provoquent des douleurs semblables à celles des règles. « Une ordonnance d’antalgiques de palier2 à prendre en cas de besoin est délivrée à C 2. Si la patiente est rhésus négatif la prévention de l’allo – immunisation anti D (Rhophylac 200 mcg IV ou IM) est réalisée le jour de la prise de mifépristone (C 2). »
Consultation n° 4 (C 4) : Elle est extrêmement importante. C’est le contrôle d’efficacité qui doit avoir lieu 14 à 21 jours après la 1ère prise de médicament. Elle permet de s’assurer de la vacuité utérine par l’examen clinique, la cinétique des bêta-HCG plasmatique ou une échographie pelvienne. En cas d’échec, l’intervention chirurgicale est systématique. On peut proposer à la patiente un accompagnement psychologique. Une fiche de fin de procédure est envoyée à l’établissement référent. Une nouvelle contraception est instaurée. Aucune contraception n’est contre indiquée sauf le DIU en cas de complication infectieuse. La pilule contraceptive peut être prise le jour de la prise du 2e médicament. Lors de la visite de contrôle, le médecin s’assure qu’une contraception est bien mise en place.
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