L’AN DERNIER en France, presque autant de médecins dits « étrangers » sont arrivés sur le marché du travail que de médecins français à l’issue de leur cursus. Cette affirmation est un peu caricaturale car les situations sont complexes ; elle décrit également un phénomène très conjoncturel, théoriquement appelé à ne se reproduire que deux années encore. Elle n’en est pas moins spectaculaire et symptomatique des difficultés actuelles de la démographie médicale.
Si les médecins « à diplôme français » parachutés en 2009 dans le système de soins sont relativement faciles à identifier – ce sont ceux qui ont commencé leur formation universitaire une dizaine d’années plus tôt, à une époque où le numerus clausus tournait autour de 3 700/3 800 (1) –, il n’en va pas de même pour les praticiens rangés dans la catégorie « à diplôme étranger » qualifiés par l’Ordre la même année.
Ceux-ci, étant données leurs voies possibles de recrutement (voir encadré), ont des profils très divers qui conditionnent d’ailleurs leurs portes d’entrée dans le système. Certains ont été diplômés en Europe – ils sont 1 500 en 2009 –, d’autres à l’extérieur de l’Union – ils sont, très précisément, 1 836 (voir « le Quotidien » du 21 avril). À l’intérieur de ces mêmes catégories mais selon d’autres frontières, certains viennent d’arriver en France (ils sont environ 1 700) ; beaucoup y sont depuis au moins cinq ans, au cours desquels ils ont effectivement exercé à l’hôpital (1 600 personnes). Certains sont en début de carrière mais beaucoup sont des praticiens aguerris, dont l’âge tourne plutôt autour de la cinquantaine. Une partie, enfin, de ces médecins vite étiquetés « étrangers » est tout bonnement de nationalité française (avec là encore, deux possibilités : Français à l’origine, ces médecins ont été formés à l’étranger ; ou bien – et c’est beaucoup plus fréquent – de nationalité initialement étrangère, ils sont devenus français une fois venus, leur diplôme de médecine en poche, exercer leur art dans les hôpitaux de l’hexagone).
Le flux doit se tarir.
C’est en grande partie le processus de régularisation massive des médecins en fait déjà employés par les hôpitaux français (avec des statuts de FFI, de PAC ou d’assistants…) qui conduit à ce match nul de l’Université française et des cursus étrangers – le score de cette rencontre tourne même à l’avantage des praticiens étrangers si l’on verse aux dossiers le chiffre, mal connu (peut-être 3 000 chaque année), des médecins à diplôme français qui choisissent, eux, de s’expatrier...
La procédure d’assimilation des « anciens » devant s’arrêter après 2011, le phénomène – couplé à l’arrivée en fin d’études de générations soumises à des numerus clausus desserrés – perdra après cette date beaucoup de son ampleur. À moins que, sous la pression croissante des besoins non couverts de la population, un « stock » de médecins étrangers ne se reconstitue par la filière des spécialisations (voir encadré). À moins aussi que les Européens, de plus en plus courtisés par les territoires français (voir ci-dessous l’exemple de la Haute-Saône) et dont les flux ne sont pas régulables, se précipitent en masse dans les cabinets et les hôpitaux français.
(1) Le numerus clausus était précisément de 3 583 en 1998, de 3 700 en 1999, de 3 850 en 2000, de 4 100 en 2001.
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