Étude inédite sur le cumul emploi retraite

Médecin retraité actif, pas une sinécure

Publié le 09/11/2015
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Les retraités actifs vivent mal le fait de cotiser à fonds perdus

Les retraités actifs vivent mal le fait de cotiser à fonds perdus
Crédit photo : PHANIE

Les quelque 10 000 médecins libéraux en cumul emploi retraite sont-ils des privilégiés ?

Afin d’évaluer leur ressenti et surtout de cerner leurs attentes, la FARA* a conduit auprès de ces « cumulards » de plus en plus nombreux (graphique) une vaste consultation anonyme, avec le concours de la CARMF. Résultat : près de 4 000 réponses – un taux de retour exceptionnel – mais aussi des centaines de commentaires (parfois plus d’une page manuscrite) qui traduisent une forme de désarroi, du moins le besoin profond de s’exprimer à un moment charnière de la carrière et de l’existence.

Motivations : chute des revenus… et amour du métier

« Le cumul n’est pas un choix mais très souvent une nécessité », résume la FARA. De fait, les retraités actifs expliquent massivement leur décision de cumul par une pension de retraite jugée insuffisante (50 %) et le « matraquage fiscal » au moment où chutent brutalement les revenus. « Je travaille encore pour vivre décemment », commente sobrement un médecin. Nombre de professionnels se disent surpris par la baisse soudaine de leurs revenus et jugent nécessaire de mieux informer les futurs praticiens retraités sur leur pension moyenne et leurs charges.

D’autres événements subis justifient la retraite active comme l’absence de successeur ou le refus d’abandonner d’un coup une fidèle patientèle, confirmant la récente étude de l’Ordre sur le sujet. « L’amour du métier est un critère dominant », positive la FARA, mais cet attachement viscéral peut paradoxalement se transformer en enfermement ou en abandon de liberté.

La FARA précise que les retraités actifs apprécient peu le terme de « cumulant » ou « cumulard » jugé péjoratif, voire blessant. « Ce terme sous-entend la notion de "profiteurs", or le cumul est un mode de fonctionnement dont beaucoup disent qu’il est un piège, le grand gagnant est l’État », analyse la FARA.

Attentes : des aménagements au cumul

Les souhaits les plus marquants portent sur l’amélioration de l’exercice en cumul emploi retraite en particulier pour les petits revenus (réduction de la cotisation retraite, de la cotisation ordinale…).

Mais surtout, les retraités actifs vivent très mal le fait de cotiser à fonds perdus (ne pouvant plus acquérir aucun droit supplémentaire une fois les retraites liquidées). L’enquête rapporte ici de nombreux commentaires qui en disent long sur le sentiment d’injustice : « arnaque », « spoliation », « racket », « hold-up », « vol », « indécent »... Les trois quarts des retraités actifs réclament une cotisation CARMF qui soit génératrice de points. Selon la FARA, nombre de praticiens seraient désireux d’avoir l’avis du conseil d’État, voire de la Cour européenne des droits de l’homme, au sujet de ces cotisations à fonds perdus.

La FARA suggère la création d’un mécanisme d’incitation à la poursuite d’activité (MIPA), chaque année d’activité supplémentaire au-delà de 65 ans procurant un supplément de 5 % de la retraite. Un sigle en forme de clin d’œil à l’histoire : à la fin des années 80, on incitait au contraire les médecins à prendre une retraite anticipée via le mécanisme incitatif du MICA. Mais l’objectif était alors de réduire l’offre de soins ambulatoires.

* Fédération des associations régionales des allocataires et prestataires de la CARMF
Cyrille Dupuis

Source : Le Quotidien du Médecin: 9448