DÉJÀ ÉCHAUDÉS par le droit de substitution accordé aux pharmaciens, les médecins libéraux avaient accusé le coup lors de la publication, début mai, de la nouvelle convention pharmaceutique. Celle-ci prévoit une rémunération du pharmacien, à concurrence de 40 euros par patient et par an, pour le suivi des patients sous AVK. Les médecins libéraux avaient fait valoir qu’ils effectuaient déjà ce suivi, sans rémunération spécifique.
Après ce pic de tension, l’ambiance semble aujourd’hui se réchauffer entre les deux professions. Sous la houlette de l’assurance-maladie, médecins et pharmaciens entament des discussions interprofessionnelles, tant sur la surveillance des patients sous AVK que sur les médicaments génériques, à l’heure où la CNAM constate un essoufflement. Ces rencontres visent à mettre en place des « bonnes pratiques communes », résument la CSMF et le SML. À MG France, on estime même que ces discussions pourraient déboucher sur un accord interprofessionnel. Le Dr François Wilthien, vice-président de ce syndicat, aimerait ajouter à cet accord un chapitre sur les coopérations interpro.
Le pharmacien pas habilité à modifier un traitement de sa propre initiative.
Une première rencontre s’est tenue à la CNAM dans un climat jugé très confraternel, en présence des syndicats de médecins libéraux et de pharmaciens d’officine. Selon la CSMF, le SML et la FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France), cette séance a permis « de stabiliser des points importants » dont le fait que « le pharmacien n’est pas habilité à modifier un traitement de sa propre initiative [et que] seul le médecin peut le faire ».
Certains praticiens craignaient que l’évolution conventionnelle autorise les pharmaciens à adapter une prescription d’AVK en fonction des analyses du patient. S’agissant de la rétribution des missions, le Dr Claude Leicher, président de MG France, estime que l’assurance-maladie est disposée à étudier aussi le principe d’une rémunération conventionnelle forfaitaire des médecins pour le suivi des AVK.
Les deux professions ont jugé qu’il fallait apporter un soutien renforcé à la politique du générique. Selon les chiffres de l’assurance-maladie, le taux de substitution est passé de près de 79 % fin 2010 à 72 % en avril dernier. « Le générique fait économiser chaque année 1,5 milliard d’euros à l’assurance-maladie, rappelle le Dr Claude Leicher. On pourrait économiser un milliard de plus ». En tout état de cause, les deux professions ont un intérêt commun à soutenir la politique des génériques notamment via les nouveaux modes de rémunération sur objectifs de santé publique qui se développent dans le cadre conventionnel. Et une étude récente de la CNAM a montré que, contrairement à certains discours industriels, les médecins jouent le jeu de la prescription générique (moins de 5 % des ordonnances comportent la mention « non substituable »).
Entretiens pharmaceutiques balisés.
À la Fédération des médecins de France (FMF), on se veut optimiste sur ces sujets. « Faire progresser la prescription et la délivrance des génériques devrait être facile, surtout si les pharmaciens respectent leurs engagements conventionnels et délivrent toujours les mêmes génériques aux personnes âgées », explique le Dr Jean-Paul Hamon, président du syndicat. Quant au suivi du traitement par anticoagulants, il estime qu’« une collaboration entre les deux professions ne pose aucun problème dès lors que les choses sont claires sur les responsabilités des uns et des autres ».
D’autres réunions médecins/pharmaciens sont prévues rapidement. Elles devraient permettre d’avancer sur un protocole de suivi des patients sous AVK, notamment sur le contenu des « entretiens pharmaceutiques » (censés favoriser l’adhésion au traitement, éviter les accidents iatrogènes...) et le retour d’information entre les médecins et les pharmaciens. Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) reste lucide sur le chemin à parcourir : « il faut mettre en place un outil de communication et de coordination entre les médecins et les pharmaciens, tant pour les génériques que pour la surveillance des AVK. Mais tout reste à construire ».
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