De nombreux travaux récents enrichissent les données épidémiologiques de la rosacée.
Au Royaume-Uni, la prévalence de la rosacée a été estimée à 1,65 % et prédomine après l’âge de 40 ans. En Irlande, une étude sur plus de 1 000 travailleurs établit la prévalence de la rosacée papulopustuleuse à 2,7 %. En Allemagne, une autre évalue la prévalence de la rosacée à 2,3 % sur 90 880 travailleurs de l’industrie. Et en population générale la prévalence est estimée à 5 % Russie, et 12,3 % en Allemagne. « De nombreux patients ne consultent jamais. La prévalence est probablement plus élevée en Europe que ce que l’on pensait », note le Pr Bernard Cribier du CHRU de Strasbourg lors des Journées dermatologiques de Paris.
Certains facteurs déclenchants sont bien connus : nourriture épicée, alcool, stress, activité physique intense, exposition au soleil ou aux UV, bains chauds, boissons chaudes et Demodex folliculorum, un acarien que l'on trouve habituellement sur la peau du visage, même si son rôle exact n’est pas clairement établi. L’effet de la chaleur est également confirmé : les femmes exposées à la très forte chaleur des fours tandoori ont une très nette augmentation de la rosacée par rapport à celles non exposées (38 % versus 5 %). « Les personnes de phototypes clairs sont davantage touchées mais les peaux foncées sont également concernées. Et l'antécédent familial joue un rôle important dans la survenue de cette pathologie », précise le Pr Cribier.
Concernant la physiopathologie, la piste de l’immunité innée se précise. Virus, parasites, mais aussi soleil… la mettent en jeu lorsqu’un évènement stimule les récepteurs TLR et déclenche via des métalloprotéases, l’augmentation de peptides pro-inflammatoires. « Or les cyclines (traitement de référence de la rosacée) agissent sur des métalloprotéases et diminuent ces peptides de l’immunité innée », note le Pr Cribier. À ces phénomènes inflammatoires s’ajoute vraisemblablement une composante neurovasculaire (brûlures, douleurs allodyniques, bouffées vasomotrices…). Des neuromédiateurs vasculaires particuliers sont incriminés.
Le laser améliore la sensibilité cutanée. Il a certainement aussi une cible nerveuse. Une prise en charge de cette cible neurovasculaire pourrait émerger. Des études récentes se sont également intéressées aux comorbidités de la rosacée. La base de données danoise a permis d'établir un lien entre la rosacée et la maladie de Crohn, la rectocolite hémorragique, le côlon irritable et la maladie cœliaque. « Nous savons, par ailleurs, que la rosacée prédomine chez les personnes migraineuses (notamment, les femmes après 50 ans) et celles qui ont naturellement un risque de carcinome basocellulaire », note le Pr Cribier.
Nouveautés thérapeutiques
La prise en charge actuelle de la rosacée devrait s’appuyer désormais sur une nouvelle classification en phénotypes, proposée en 2016 par le groupe d'experts ROSCO. Ces signes cliniques sont les bouffées vasomotrices, érythème, télangiectasies, papulopustules, rhinophyma et autres formes hypertrophiques du visage… Les cyclines représentent le traitement de référence, mais les traitements sont pour l’instant empiriques. Les avancées sont récentes. « La brimonidine gel (AMM 2014) diminue la rougeur par une vasoconstriction purement locale et persiste 12 heures. L’ivermectine topique à 1 % (AMM 2015) a l’avantage par rapport au métronidazole et à l’acide azélaïque d’une application unique par jour, d’une meilleure tolérance et elle a démontré sa supériorité sur les 2 topiques existants et son excipient », conclut le Pr Cribier.
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