Nouveaux anticoagulants oraux

Moins d’erreurs malgré la hausse des prescriptions

Publié le 24/04/2014
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Depuis octobre dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) mène un plan d’actions sur les nouveaux anticoagulants oraux (NACO), et c’est dans ce contexte qu’elle vient de publier un état des connaissances et de la surveillance sur les anticoagulants.

L’agence y note que l’exposition aux anticoagulants continue d’augmenter régulièrement, surtout chez les patients de plus de 65 ans : 13,7 % d’entre eux ont été exposés au moins une fois à un anticoagulant en 2013 contre 13,4 % en 2011. Inexistants en 2011, les NACO représentent 125 millions de doses définies journalières en 2013, signant la plus grosse progression.

Les NACO présentent quelques difficultés d’utilisation pour les médecins, car ils font l’objet de recommandations et de dosages différents selon les indications et les facteurs de risque hémorragique. De plus, la survenue d’une hémorragie pose un réel problème en l’absence d’antidote spécifique ou de protocole d’antagonisation validé permettant la neutralisation rapide de l’effet de ces nouveaux anticoagulants.

Un risque hémorragique réel

« Même s’ils peuvent paraître simples d’utilisation, il est important de rappeler que le risque hémorragique est le même qu’avec les antivitamines K », a insisté Lotfi Boudali, chef du pôle cardiovasculaire métabolisme et obésité de l’ANSM. Le risque de saignement non extériorisé doit donc être systématiquement recherché, et la fonction rénale documentée avant l’initiation. Il est même recommandé chez le sujet âgé de renouveler la surveillance rénale tous les quatre mois.

Les NACO en général, et le dabigatran en particulier, présentent en effet un risque d’accumulation si la fonction rénale est réduite.

Seulement 29 erreurs de prescription

Les NACO font l’objet d’une pharmacovigilance renforcée. Dans le bilan de suivi semestriel de novembre 2013, l’ANSM recensait 1 625 incidents signalés avec le dabigatran, dont 802 hémorragies et 175 décès, et 1 566 incidents avec rivoraxaban dont 865 hémorragies et 127 décès. « Cela représente une stabilisation du nombre de notifications, rapporté à l’exposition qui continue à augmenter », explique Lotfi Boudali qui rappelle que « ces produits, de part leur notoriété, génèrent un taux de notifications plus important que des anticoagulants anciens. » Par ailleurs, les rappels réguliers de la HAS et de l’ANSM, semblent avoir porté leurs fruits puisque seulement 29 erreurs de prescriptions ont été recensées dans ce même bilan. « Un autre élément très important est l’adhérence du patient » poursuit Lotfi Boudali. « Les arrêts intempestifs de traitement associés à une augmentation majeure du risque de thrombose. »

Deux études en cours avec la CNAMTS

Pour compléter les données manquantes, l’ANSM a lancé deux études à partir des données exhaustives du Sniiram, qui doivent servir à comparer les risques thrombotiques des NACO et des antivitamines K chez des patients de différents profils. Les statisticiens de l’ANSM vont évaluer les prévalences des événements thrombotiques et hémorragiques dans quatre populations différentes. La première sera composée de patients sous antivitamine K durant toute la période étudiée, la deuxième ne comprendra que des patients ayant changé de traitement pour un NACO, et les deux dernières seront composées de patients chez qui sera instauré un traitement par antivitamine K ou par NACO pendant la période étudiée. Les résultats sont attendus en juin prochain.

« On va pouvoir apprécier dans les conditions d’utilisation de vie réelle l’efficacité et la sécurité des différents traitements », se réjouit Lotfi Boudali. Plus important encore : cette évaluation se ferra dans la pratique française. Plusieurs des études sur la sécurité des NACO qui servent de références aux recommandations proviennent de pays nordiques où l’observance est meilleure. Ainsi, le temps passé par le patient dans la fenêtre thérapeutique, définie par un INR compris entre 1 et 2 dans la fibrillation auriculaire, est 60 % en France contre 70 % au Danemark.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du Médecin: 9321