Shakespeare est-il soluble dans le politiquement correct ? La tragédie Antoine et Cléopâtre pour être moderne doit-elle être infusée au travers des mélopées orientales ? Peut-être pas. Le projet de Célie Pauthe suscite sur le papier un réel intérêt. Construire en effet un pont entre l'Egypte rêvée de Cléopâtre et le pays actuel, tisser un fil entre le mythe d'hier et l'art d'aujourd'hui, grâce à des chansons et des succès orientaux, s'inscrit peut-être dans la recherche de correspondances déjà à l'œuvre dans le spectacle précédent, Bérénice de Racine. Aujourd'hui en revanche, cette ambition se heurte sur la scène à un texte qui donne à voir l'abîme entre conquête du pouvoir et passion, amour et guerre, intelligence et sensibilité. À la fin, la tragédie est aseptisée, esthétisée. Certes, on ne s'ennuie pas tout au long de ces 3 h 45 de spectacle, ce qui est déjà une performance. Mais jamais ne se produit la catharsis, jamais le spectateur n'est saisi par l'émotion. Dommage.
Antoine et Cléopatre, Odéon théâtre de l'Europe, salle Berthier, jusqu'au 3 juin.
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