Prévention cardio-vasculaire : les inhibiteurs calciques se dévoilent

Publié le 03/01/2001
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L ES inhibiteurs calciques sont utilisés en première intention dans le traitement de l'hypertension artérielle depuis 1989, date des premières recommandations émanant de l'Organisation mondiale de la santé, aux côtés des IEC, DES bêtabloquants et DES diurétiques.

Il y a quelques années, les inhibiteurs calciques ont fait l'objet de controverses quant à leur place dans la prévention des complications de l'HTA. Différents essais ont été réalisés afin d'étudier précisément l'efficacité antihypertensive et leur retentissement sur la morbi-mortalité cardio-vasculaire, chez les sujets âgés de plus de 55-60 ans.
Trois études, SYST-EUR, INSIGHT et NORDIL, ont successivement démontré le bénéfice des inhibiteurs calciques, respectivement de la nitrendipine, de la nifédipine et du diltiazem, sur la réduction du nombre d'événements cardio-vasculaires.
L'essai SYST-EUR, réalisé chez 4 695 patients présentant une HTA systolique isolée a étudié la nitrendipine (de 6 à 40 mg/j) associée éventuellement à l'énalapril (de 5 à 20 mg/j) et à l'hydrochlorothiazide (de 12,5 à 25 mg/j) pour obtenir une PAS <150 mmHg ou abaissée d'au moins 20 mmHg, versus placebo (« The Lancet », 1997). La durée moyenne du suivi était de quatre ans.
La nitrendipine a réduit la PAS de 10,7 mmHg et la PAD de 7,3 mmHg ; elle a diminué significativement de 31 % le nombre des événements cardio-vasculaires, de 44 % et a entraîné une diminution de 44 % du nombre des accidents vasculaires cérébraux non mortels. De plus, on a observé une réduction de 33 % du nombre des événements cardiaques non mortels. Par ailleurs, les résultats montrent dans le groupe de patients recevant la nitrendipine, une tendance à la diminution du nombre des décès d'origine cardio-vasculaire de
27 % (NS).
L'étude INSIGHT (International Nifedipine GITS/OROS Study Intervention as a Goal in Hypertension Treatment), réalisée de 1995 à 1999 dans les conditions de la pratique médicale de ville, a inclus des hypertendus présentant au moins un autre facteur de risque. Elle avait pour objectif de répondre à deux questions essentielles : la nifédipine permet-elle de diminuer la morbidité et la mortalité des hypertendus à long terme et entraîne-t-elle des effets délétères ?
Un groupe de patients a reçu la nifédipine (30 mg/j), l'autre groupe, une association de deux diurétiques
Ainsi, 6 321 patients ont été inclus, présentant l'association d'une HTA (supérieure à 150/95 mmHg) avec au moins un facteur de risque cardio-vasculaire. Les résultats, présentés au dernier congrès de l'ESH (European Society of Hypertension) à Göteborg, ont montré, en premier lieu, l'efficacité antihypertensive de la nifédipine : 72 % des patients du groupe sous nifédipine ont présenté une normalisation de la pression artérielle. Parmi ceux-ci, 90 % étaient toujours contrôlés après quatre ans de traitement.
La somme de la morbidité et de la mortalité cardio-vasculaire et cérébro-vasculaire avec la mortalité liée à d'autres causes était de
12,1 % dans le groupe Adalate et de 12,5 % dans le groupe diurétiques (différence non significative). Ces taux sont inférieurs de 50 % environ aux estimations faites en l'absence de traitement tenant compte du profil de risque des sujets (fondé sur les données de l'étude Framingham).
L'essai NORDIL (the Nordic Diltiazem Study) réalisé de 1992 à 1999, avait pour objectif de comparer les effets du diltiazem, inhibiteur calcique n'appartenant pas à la famille des dihydropyridines, à ceux d'un diurétique et d'un bêtabloquant chez des hypertendus d'âge moyen.
Dix mille huit cent quatre-vingt et un hypertendus ayant une pression diastolique supérieure à 100 mmHg, à deux reprises ou plus ont été inclus dans cet essai.
Un premier groupe de patients a reçu le diltiazem en une prise par jour à raison de 180 à 360 mg. Lorsque ce traitement était insuffisant, un IEC, puis un diurétique ou un bêtabloquant, lui étaient associés.
Dans le second groupe, le traitement débutait par l'administration d'un bêtabloquant ou d'un diurétique ; puis on associait les deux et, enfin, si cette association était insuffisante, un IEC ou un autre bêtabloquant était adjoint à la bithérapie.
Le critère combiné d'évaluation de l'essai NORDIL était la survenue d'un accident vasculaire cérébral fatal ou non, d'un infarctus du myocarde fatal ou non, ou un décès d'origine cardio-vasculaire. Le premier critère d'évaluation est survenu chez 403 patients dans le groupe diltiazem et chez 400 patients du groupe bêtabloquant/diurétique. Par ailleurs, 159 patients du groupe diltiazem et 196 dans l'autre groupe ont présenté un AVC fatal ou non. Enfin, 183 patients du groupe diltiazem contre 157 dans l'autre groupe ont présenté un infarctus du myocarde fatal ou non.
L'analyse en intention de traiter associant tous les critères primaires d'évaluation, infarctus létal ou non, AVC de toutes causes, et décès cardio-vasculaires montre que les deux traitements ne sont pas différenciables, avec un risque relatif de 1. Néanmoins, le diltiazem s'est montré un peu plus performant pour diminuer le taux d'accidents vasculaires cérébraux, même si ce résultat peut être dû au hasard.
Ainsi, l'essai NORDIL a démontré que le diltiazem, inhibiteur calcique, prévient la mortalité et la survenue d'événements cardio-vasculaires ; ces résultats n'étaient pas différents de ceux constatés avec le traitement antihypertenseur conventionnel par bêtabloquant et diurétique.
Ces trois études ont clos la polémique concernant le rôle des inhibiteurs calciques dans prévention cardio-vasculaire chez les hypertendus.

Drs Brigitte MARTIN et Caroline RIGO

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6828